L’argument principal est d’ordre éthique: il s’agit de défendre la part de « civilisé », de « spirituel » de tout un chacun face à l' »homo economicus »; il s’agit d’arracher un jour au « fric », c’est à dire à l’activité marchande; il s’agit de se rappeler ainsi que l’Homme n’est pas fait « que » pour le travail, ni même surtout et « essentiellement » pour le travail; et qu’il est bon d’avoir un temps pour soi, pour souffler, se poser (1) et se reposer, se cultiver, pratiquer un sport, passer du temps avec les siens etc….Et bien sûr, pour les croyants, sanctifier ce jour (2): Benoit XVI ne disait-il pas récemment que « sans le Dimanche, nous ne pouvons pas vivre. » Il prend évidemment le mot « vivre » non pas dans son sens premier, purement matériel (avec un « v » minuscule: manger, dormir…) mais -avec un « V » majuscule- dans son sens fort, tiré des Écritures: « L’Homme ne Vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. » (3).
Mais aussi, dans le domaine purement économique et pratique, on peut contester l’argument selon lequel l’ouverture des commerces le dimanche développerait l’activité, et défendrait donc l’emploi; il s’agit là, en fait, d’une demande hypocrite des grands groupes, qui peuvent s’offrir cette dépense, et qui sont evidemment favorisés par rapport au petit commerce (il y a donc, d’une certaine façon, risque de concurrence déloyale…), mais l’activité économique n’est pas ou pas forcément augmentée; en tout cas pas de beaucoup, pas d’une manière vraiment significative: certains reporteront simplement au dimanche, par commodité, un achat qui pourrait parfaitement se faire en semaine; mais la consommation n’est pas mécaniquement dopée par un jour d’ouverture en plus. Sinon, si le simple fait, en soi, d’ouvrir les magasins faisait tourner davantage les économies, alors poussons le raisonnement jusqu’a l’absurde: pourquoi ne pas supprimer les vacances et tout ouvrir, partout, en juillet et en août? Et vingt quatre heures sur vingt quatre, tant qu’on y est! Les partisans de l’ouverture dominicale pensent-ils sérieusement que les problèmes économiques de la France en seraient supprimés d’un coup?….
(1): souvent, dans la Bible, on trouve cette invitation: « assieds-toi!… »; il est bon, à intervalle régulier, de cesser toute activité; de faire cesser le mouvement qui devient tourbillon et agitation; de faire silence et prendre du recul…
(2): il est utile de se souvenir que, dans les langues latines, le mot « dimanche » dérive de « dominus »: le jour du Seigneur; alors que les langues germaniques, nordiques, anglo-saxonnes, ont conservé (ces peuples ayant été évangélisés un peu plus tard, ceci explique peut-être cela…) l’idée primitive du « jour du soleil » (sunday en anglais, sontag en allemand…); mais soleil avec un « s » minuscule, le seul vrai Soleil étant le Seigneur, le Christ…
(3): sinon, n’est-il pas l' »un de ces morts que le courant de la vie entraîne… »? (Mauriac, « Thérèse Desqueyroux »).
Cording1 sur Ce crime impuni, contre l’honneur paysan
“Le monde paysan selon Gustave Thibon est mort depuis longtemps. Les paysans sont plus entrepreneurs de…”