On sait que, dans la Postface de son Reprendre le Pouvoir ( postface dont on retrouvera un extrait significatif dans notre Grand texte n° III) Boutang émet l’idée d’une « légitimité révolutionnaire, d’une révolution pour instaurer l’ordre légitime et profond ».
Car, explique-t-il, « ….Notre société n’a que des banques pour cathédrales ; elle n’a rien à transmettre qui justifie un nouvel « appel aux conservateurs » ; il n’y a, d’elle proprement dite, rien à conserver. Aussi sommes-nous libres de rêver que le premier rebelle, et serviteur de la légitimité révolutionnaire, sera le Prince chrétien. »
Et nous avons ici même proposé de troquer ce terme confus, compliqué et lourd à porter de contre-révolutionnaires pour celui d’alter-révolutionnaires (1). La révolution ayant en effet, et malheureusement, triomphé chez nous et ailleurs, et étant devenu le fait établi, nous sommes bien révolutionnaires de cet ordre-là, qui n’est que désordre, lorsque nous souhaitons retrouver « l’ordre légitime et profond » dont parle Boutang.
Voilà pourquoi nous ne pouvons qu’approuver le cri de colère, de dégout et de rejet de Patrice de Plunkett qui écrit, dans sa note du 21 novembre, Si c’est ça l’ordre établi, alors vive la révolution ! et qui choisit, pour illustrer son propos, une image très suggestive du Titanic faisant naufrage.
Le point de départ de sa réflexion se trouve dans deux reportages proposés, la veille, sur TF1 et FR2, et consacrés à la famille, « qui ne s’est jamais aussi mal portée ». Il en profite pour livrer une analyse que l’on retrouve aussi, bien sûr, chez Benoît XVI et que nous ne pouvons que faire nôtre, entièrement et sans réserve; et dans laquelle on retrouve tout le dégoût que causait à Pierre Boutang le spectacle de cette « désolante pourriture », sur laquelle aucun « État légitime » ne peut être « greffé ou plaqué »….. :
Notre société économique tout entière fonctionne contre le familial, parce qu’elle fonctionne contre le stable, le durable et le « désintéressé » : autrement dit, le non-marchand. Elle est même parvenue à injecter ce délire dans l’esprit des individus : d’où leur extrême et anxieuse nervosité, leur peur panique de tout ce qui ressemblerait à des liens humains dans la durée – parce que ces liens sont mal vus de la société présente. C’est le stade suprême du capitalisme : l’enfermement dans le rentable à vue basse et à très court terme.
Maintenant tout est clair. Les conservateurs libéraux ont perdu la partie : leur démarche achève de perdre toute crédibilité. On ne peut pas vouloir à la fois le « libre jeu des lois (?) économiques » et le maintien de la famille, ou de la patrie, ou de l’Etat, ou du spirituel, de tout ce qui en principe ne se vend ni ne s’achète. Vouloir le primat du business revient à vassaliser, puis à dissoudre tout ce qui n’est pas métabolisable par le business. A l’époque de l’emploi rare, nomade et jetable, l’employeur (réticent) ne veut avoir affaire qu’à des individus orphelins et célibataires : des atomes faciles à manier. C’est pourquoi le système en place va détruire le familial aussi radicalement qu’il le pourra, aussi longtemps qu’on le laissera faire. Défendre telle ou telle « valeur », défendre la famille, défendre le droit à la vie, est utopique dans un système qui considère les « valeurs », la famille et la vie comme des survivances précapitalistes et des freins à la rentabilité. Si c’est ça l’ordre établi, alors vive la révolution. »
Oui, pour retrouver l’ordre légitime et profond, dont le serviteur sera le Prince chrétien, le premier rebelle…..
(1) : Voir la note « Alter-Révolutionnaires », du 29 mai 2007, dans la Catégorie « Révolution, république, totalitarisme ».
L’analyse me parait réelle et logique,mais décidément je n’aime pas ce mot révolutionnaire.Il convient de chercher autre chose.