Dans le Politique Magazine de décembre (n° 69), Yvan Blot a consacré à l’ouvrage de Simon Sebag Montefiore Le jeune Staline (1), la note de lecture que nous reproduisons ci-dessous.
Comme nous le disait Jean-François Mattéi lors de son intervention à la soirée du 21 janvier 2008 (2) la révolution française a bien perturbé, non seulement la France bien sûr, mais aussi toute l’Europe et même le monde, ne s’arrêtant pas à la Russie mais allant nourrir aussi, jusqu’en extrême-orient, un Mao, un Ho Chi Minh, un Pol Pot.
« La révolution française a vraiment nourri la sensibilité des communistes bolchéviques….. le mouvement bolchévique ne tire pas du tout ses racines intellectuelles de la Russie mais bien de l’Occident et singulièrment de la révolution française. »
« Voila une plongée dans les eaux du communisme soviétique à ses débuts. Staline, jeune séminariste en Géorgie, fils d’un père violent et alcoolique, Besso Djougachviili dit « le dingue », devient très vite chef de bande avec une spécialité : le braquage des banques ! Pas n’importe quel braquage : le braquage sanglant la plupart du temps. Lorsque sa première épouse meurt de tuberculose ou de typhus, il déclare qu’il n’a désormais plus de sentiment pour l’humanité ! Staline tuera 39.000 personnes (nombre de condamnations à mort qu’il aurait signées) et par sa politique, il fait des dizaines de millions de victimes (famine qu’il organise en Ukraine notamment). Le jeune Staline (le livre va jusqu’à la révolution de 1917) est un personnage vraiment étrange : braqueur de banque que Lénine apprécie (il a toujours besoin d’argent pour la révolution), tueur sans scrupules, véritable Don Juan comme beaucoup de ses complices, il est aussi un dévoreur de livres et poète à ses heures. Là encore, le français devra battre sa coulpe : c’est en lisant Victor Hugo et Emile Zola qu’il devient socialiste de coeur; Karl Marx, dont il connaît l’oeuvre à fond, apporte l’armature doctrinale. Il déclare qu’il est devenu athée en lisant Darwin. Bref, Staline est intellectuellement, non pas un prouit de la Russie mais de l’Occident : la France, l’Allemagne et l’Angleterre lui ont donné ses bases idéologiques. Dans les multiples réunions et commémorations auxquelles il participe, il est frappant de voir que le chant qui retentit est la Marseillaise ! La révolution française a vraiment nourri la sensibilité des communistes bolchéviques !
On s’étonnera peut-être du mélange de gangstérisme et de communisme du milieu géorgien, juif et russe dans lequel Staline commence sa carrière. En fait, Lénine l’apprécie justement pour cela : il est un des rares à être un doctrinaire marxiste de haut niveau (avec une spécialité : la théorie des nationalités) et un praticien de hold-up et de l’assassinat politique. C’est ce mélange détonnant qui fait qu’il est apprécié. C’est un organisateur hors pair totalement dévoué à sa passion révolutionnaire. Glacial envers ses semblables, il est très affectif en même temps : lorsque sa première femme meurt, il ne veut plus quitter le cercueil sur lequel il s’est jeté ! Il adore la poésie, les chants géorgiens et la musique classique. Emprisonné ou exilé en Sibérie, il montre une fermeté à toute épreuve. C’est un criminel de roman : exilé en Sibérie, il trouve le moyen de séduire une fille de paysan de 13 ans ! On voit d’ailleurs que le régime tsariste est plus anarchique que dictatorial. Les exilés en Sibérie sont en réalité peu surveillés. Il est vrai qu’avec moins 30 l’hiver, il leur est difficile de s’échapper. La police secrète -l’Okhrana- semble partout et pourtant, la plupart du temps, Staline lui échappe : il est le roi du déguisement. Son coup favori semble être de se couvrir de pansements comme un grand blessé et de se recroqueviller dans un coin ! Les policiers qui perquisitionnent laissent libre ce moribond. Ils rendent compte et reçoivent l’ordre de le chercher : entre temps Staline a disparu !
Le personnage montre très tôt ses travers criminels : c’est ce qui lui permet de faire carrière ! On voit bien ici le côté criminel de ces milieux révolutionnaires , mais en même temps, le marxisme est pour eux une véritable religion. On est vraiment dans le monde si bien décrit par Dostoïevski dans Les Possédés !
Le livre fourmille d’anecdotes. Il apporte des informations précieuses, non seulement sur Staline mais sur le milieu révolutionnaire de bandits qui l’entoure et montre qu’en fait, le mouvement bolchévique ne tire pas du tout ses racines intellectuelles de la russie mais bien de l’Occident et singulièrement de la Révolution française ! »
(1) : Le jeune Staline, de Simon Sebag Montefiori. Calmann-Lévy, 500 pages, 25 euros.
(2) : Voir la note du mercredi 6 février 2008 « Les trois vidéos intégrales du 21 Janvier 2008 à Marseille…. » dans la catégorie « Documents Vidéo ».
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