Retour sur la condamnation « a minima » du juge Burgaud, lequel -comme on sait- n’a été condamné qu’à la plus faible des sanctions possibles, alors qu’il a tout de même fait faire vingt-cinq ans de prison (cumulés..) à une quinzaine de personnes, finalement innocentées; et brisé plus d’une vie…..
On laissera aux blogs spécialisés et aux personnes compétentes le soin de faire des commentaires techniques -comme cela a du reste déja largement été fait….- sur la très extraordinaire bienveillance dont a bénéficié le juge de la part d’autres juges. Nous ne sommes pas des charognards, ni des moralisateurs ou des donneurs de leçons; et nous n’allons donc pas nous acharner sur lui…
Nous nous permettrons par contre de tirer une leçon politique de cette désolante affaire; et elle sera comparable à celle que nous avons déjà tirée lors de l’affaire Kouchner, dans la note « L’affaire Kouchner, ou la révolution pour rien… » (Catégorie « République ou Royauté ? »)….
Nous allons nous contenter en effet de redire la même chose, dans le fond, à propos de cette affaire Burgaud, que ce que nous avions dit à propos de de l’affaire Kouchner; en adaptant juste le propos à la différence de situation des deux protagonistes.
En aura-t-on bassiné des génération d’écoliers avec les fameuses Lettres de cachet, et ce monstrueux arbitraire royal qui pouvait, d’un coup vous envoyer à la Bastille ! Brrrr ! Heureusement, maintenant c’est fini et, grâce à la Révolution, des choses pareilles ne peuvent plus arriver au bon peuple. C’est bien, la Révolution, vraiment bien… Enfin, ça, c’est la version officielle, c’est l’évangile selon Saint Mallet et Saint Isaac. L’affaire Burgaud vient rappeler, avec fracas, que les lettres de cachet, et l’arbitraire du juge, et la prison pour rien etc.. etc…, c’est bel et bien aujourd’hui, ici et maintenant; et que cela peut arriver à tous….
Ce qui est intéressant, donc, dans cette affaire Burgaud, c’est de passer -comme pour l’affaire Kouchner- d’un cas particulier au cas général, du cas d’un juge in-juste (ou du cas d’un enrichissement favorisé avec Kouchner) au cas de la République et de la Révolution.
Mais, pourquoi ? demandera-t-on peut-être; et quel rapport y a-t-il entre ces deux affaires et la République ou la Révolution ?
Eh bien, voilà…..
Quand les révolutionnaires ont massacré leurs opposants, établi le totalitarisme et décrété le premier génocide des temps modernes contre les Vendéens, la raison invoquée par eux pour justifier et même légitimer (!) toutes ces horreurs était qu’ils allaient régénérer, non seulement la France mais l’Europe, et même le genre humain ! Robespierre, Danton, les Conventionnels savaient très bien qu’ils tuaient des innocents (1), mais ils pensaient qu’ils allaient créer un monde nouveau, un Homme nouveau. Lénine, leur héritier-continuateur, n’a-t-il pas dit que la société sans classe serait si belle qu’on ne pouvait même pas l’imaginer ?
Or, l’on ne peut que constater, deux cents ans après cette funeste Révolution, que rien n’a changé, et que même tout a empiré. Ce n’est pas nous qui le disons, dans une sorte d’acharnement incompréhensible, voire béta ou même malhonnête contre un système, mais c’est l’actualité elle-même qui le montre: c’est l’affaire Kouchner, c’est l’affaire Burgaud.
C’est là, donc, qu’intervient notre critique. Non pas sur une personne, et contre elle (Kouchner, Burgaud), non pas sur un, ou deux, cas particuliers mais, à travers ces cas particuliers, pour remonter au cas général; et pour passer de la critique d’une personne, ou deux, à la critique d’un système. Notons d’ailleurs que la même chose peut être dite pour bien d’autres affaires, de Julien Dray aux carnets noirs d’Yves Bertrand, consacrés aux turpitudes de la République….
Des turpitudes et des ministres corrompus, des enrichissements personnels scandaleux, il y en a eu à foison pendant les mille ans de Royauté. Et pareil pour des décisions de justice incompréhensibles, abracadabrantes, ou franchement scandaleuses. Ce n’est donc bien sûr pas là-dessus qu’il faut, en soi, attaquer le système actuel. Mais c’est sur ce fait précis que la révolution a échoué à changer l’Homme et le monde; que sous la République, issue de la Révolution, tout continue comme avant, question corruption et injustice(s), et même avec une échelle démultipliée; et que donc, de ce point de vue là, la révolution n’a servi à rien, et les faits se sont chargés de contredire Robespierre, Danton et les Conventionnels qui voulaient régénérer la France, et qui n’ont rien régénéré du tout (3).
Là est la critique.
La République et la Révolution sont donc condamnables, là où la Royauté ne l’était pas, en soi. Car jamais, dans aucun texte, aucun Roi n’a promis d’apporter le système qui allait éradiquer toute laideur, toute bassesse, toute corruption, toute injustice de la Société. La République, elle, l’a promis/juré. Elle l’a assuré et proclamé, et c’est même pour cela, c’est au nom de cette promesse folle qu’elle s’est autorisée à massacrer et à génocider, en affirmant qu’on allait voir ce qu’on allait voir. Eh bien, justement, on voit : c’est comme avant, c’est même pire qu’avant…
On voit donc bien, par ces quelques réflexions sur l’affaire Kouchner et sur l’affaire Burgaud, que ce qui nous intéresse là ce n’est pas Kouchner ou Burgaud en eux-mêmes. C’est le fait que perdurent corruption et injustice, parce que cette corruption et cette injustice sont inadmissibles, si l’on se réfère aux promesses des origines révolutionnaires du système actuel..
Ce qui était inadmissible et fou, ce qui est et reste la corruption fondamentale, substantielle, de tout système politique issu de l’idéologie révolutionnaire, c’est, en soi-même, la prétention à changer radicalement l’homme et la société, à engendrer, en un sens quasi-religieux, un homme nouveau, quand il apparaît si difficile de seulement vouloir l’améliorer un peu …
(1) : « Les scènes des Cordeliers, dont je fus trois ou quatre fois le témoin, étaient dominées et présidées par Danton, Hun à taille de Goth, à nez camus, à narines au vent, à méplats couturés, à face de gendarme mélangé de procureur lubrique et cruel. Dans la coque de son église, comme dans la carcasse des siècles, Danton, avec ses trois furies mâles, Camille Desmoulins, Marat, Fabre d’Eglantine, organisa les assassinats de septembre.…
Danton, plus franc que les Anglais disait, : « Nous ne jugerons pas le Roi, nous le tuerons. » Il disait aussi : « Ces prêtres, ces nobles, ne sont point coupables, mais il faut qu’ils meurent parce qu’ils sont hors
de place, entravent le mouvement des choses et gênent l’avenir. » (Mémoires d’Outre-Tombe, La Pléiade, Tome I, pages 298/299).
(2) : toutes sorties d’elle et d’elle seule, qui est l’unique matrice : c’est le mérite de Soljénitsyne de l’avoir bien manifesté dans son discours des Lucs sur Boulogne (que vous pouvez lire dans la Catégorie Grands Textes, en Grands Textes I).
(3) : Saint Just a tout de même osé dire, et écrire: « Je ne juge pas, je tue » (au procès de Louis XVI) et « Une nation ne se régénère que sur des monceaux de cadavres »…
Les résultats catastrophiques d’Outreau, ne sont pas qu’à mettre au débit d’un « petit juge » vite laché par sa hiérarchie, mais plutôt à celui d’un système judiciaire obsolète.
Il existe, dans les pays occidentaux, deux grands types de procédure pénale, opposées dans leur esprit.
Les pays anglo-saxons, Etats-Unis compris, ont adopté la procédure de type accusatoire : ne disposant pas de pouvoir d’investigation, le juge y apparaît comme un simple arbitre entre deux parties à égalité d’armes, à savoir l’accusé et l’accusateur, lequel doit apporter les preuves à l’appui des charges dont il soutient l’existence. C’est la victime qui déclenche le procès, où les débats sont contradictoires et publics.
La procédure de type inquisitoire (héritée de l’Inquisition)comme celle de la France repose sur le « culte de l’aveu ». Le magistrat n’est pas arbitre mais imposé aux parties.
Le juge d’instruction, pour les affaires criminelles, dispose de pouvoirs d’enquête très importants pour la recherche de la preuve. La procédure est secrète, écrite et non contradictoire donc sujette à tous les arbitraires.
Quant à Bernard Kouchner, l’arrivée au Quai d’Orsay de cet apôtre du « droit d’ingérence » marque évidemment un
tournant historique dans l’histoire politique française, et confirme l’intention de Sarkozy d’en finir avec l’exception française en matière de politique étrangère, c’est-à-dire avec la tradition d’indépendance héritée du général de Gaulle à laquelle aucun gouvernement de droite ou de gauche n’avait réellement renoncé depuis bientôt cinquante ans.
Pour les pays arabes, en particulier, la nomination de Bernard Kouchner est une très mauvaise nouvelle, car le nouveau ministre des Affaires étrangères, durant toute sa carrière politique, a constamment soutenu les gouvernements israéliens.
Kouchner évoque constamment la Tchétchénie, la Somalie, le Darfour et l’Afghanistan, mais il n’a jamais parlé de l’occupation israélienne et n’a jamais eu un mot de compassion pour les Palestiniens.
Ce qui peut constituer un problème pour Nicolas Sarkozy, celui-ci ayant déclaré que la « construction de l’union méditerranéenne » serait l’une de ses priorités.
La nomination de l’atlantiste, turcophile et russophobe Bernard Kouchner laisse sceptique sur la sincérité de cette dernière affirmation.
D’accord avec le sieur Thulé.
Vos commentaire sur cette affaire démontre que vous êtes politiquement correct