Ou plutôt, le Bac est devenu, en mal, ce qu’est devenu le Tour….
Il ne faut voir dans cette note, et dans ce titre un brin provocateur, qu’une exaspération contre ceux qui cassent et l’un, et l’autre car, que l’on ne s’y trompe pas, nous faisons partie de ceux qui aiment bien et le bac, et le Tour…
Oui mais voilà, soyons sérieux. Qu’est-ce que c’est que « ce » Tour (et non pas « le » Tour…) où le nombre de kilomètres parcourus a considérablement augmenté depuis plusieurs décennies alors que, chaque année, quoi qu’on fasse et quoi qu’on dise, la vitesse moyenne du peloton augmente ? Il y a évidemment un truc (euphémisme, euphémisme….).
Mais c’est pareil avec le Bac. Non seulement aujourd’hui tout le monde l’a, mais maintenant c’est la mention que tout le monde a. Cette année, avec 78,4 % de réussite au premier coup ( et 86,6% après le rattrappage) soit une progression de trois points, on a encore amélioré les résultats (comme sur le Tour !…) mais, avec 47 pour cent de mentions, là on les explose. Carrément. Les mentions « Très Bien » sont passées de 0,3% en 1967 à 4,9% en 2006 ! Les mentions « Assez Bien », de 4,4 à 13,6% ! Il n’y a que les « Assez Bien » qui sont restées relativement raisonnables, progressant seulement de 27,1% à 27,8%.
Là, il n’y a vraiment que deux solutions : ou bien la France est en train de devenir, sous nos yeux, une nation de surdoués et d’hyper-compétents ; ou alors…..
Soyons sérieux. Qu’on arrête le délire ! Qu’on arrête de casser ainsi un diplôme qui a sa valeur et son utilité ! Qu’on arrête de mentir à tout le monde. C’est Jean-Robert Pitte qui a raison, et qui a lancé le bon slogan : Stop à l’arnaque du Bac ! Jeunes, on vous ment ! (et on ment aux parents aussi, d’ailleurs, et à la société toute entière… )
P.S. : au moment où nous rédigions cette note, nous recevions le message suivant, transmis par Jean-Philippe Chauvin. Lui aussi proteste contre la « dévalorisation » du Bac sous pretexte de le « démocratiser ». Son exaspération rejoint la nôtre…..
Madame, monsieur,
Professeur d’histoire-géographie, j’ai corrigé 50 copies de la session 2009 du baccalauréat et fait passer les oraux de rattrapage ce mercredi matin. Or, je refuse d’être payé pour ce travail, pour des raisons d’éthique professionnelle, et j’ai fait transmettre la lettre ci-dessous au centre de paiement des examens pour signifier ma colère et ma déception.
En bref, je suis fort fâché contre l’Education nationale et, surtout, contre l’hypocrisie qui peut y régner, en particulier quant à cet examen du baccalauréat qui n’est plus qu’un rite vidé de son sens premier et condamné à n’être qu’une triste mascarade dont nos élèves sont les premières victimes alors qu’ils mériteraient plus de soins et de considération. Je suis certes très content de la réussite de mes élèves et des autres, mais je suis furieux contre cette institution scolaire qui dévalorise le travail des professeurs en dévaluant sciemment le bac et sa qualité : certains me disent que cette stratégie de l’Education nationale vise à « démocratiser » l’accès aux études supérieures, je leur réponds que cela n’est ni à l’honneur de la démocratie ni à celui de l’Education nationale !
Voici la lettre transmise au centre de paiement des examens aujourd’hui même :
Madame, monsieur,
Considérant que le baccalauréat n’est plus qu’une triste mascarade, en particulier au regard de la teneur des sujets proposés et des consignes démagogiques et antipédagogiques données aux correcteurs, le plus souvent oralement,
je vous indique, par la présente lettre, mon refus d’être payé pour mes corrections de cette session 2009 (50 copies) : je refuse les « 30 deniers » versés par l’Education nationale pour ce bac 2009 qui n’est rien=2 0d’autre qu’une double trahison, celle de l’intelligence et de l’espérance.
Trahison de l’intelligence, car le bac créé il y a 200 ans par Napoléon 1er ne couronne plus des compétences ou des savoirs mais les « efforts » des candidats (comme l’expliquait un IPR d’histoire il y a deux ans) sans juger des qualités intellectuelles et du travail véritablement accompli…
Trahison de l’espérance, car de nombreux élèves d9établissements moins favorisés que celui où j’enseigne se font du bac une idée qui n’est plus, dans la réalité, qu’une illusion : d’où les désillusions postérieures, les ressentiments et un triste gâchis…
Professeur d’histoire-géographie de l’enseignement public, je le suis par vocation, passionné par mon métier comme par les matières que j’enseigne, par ce devoir de transmission et d’éveil des intelligences : ainsi, cette mascarade d’examen me navre et me paraît être une insulte à l’honneur de la fonction et de la mission confiées par l’Etat à mes soins comme à ceux de mes collègues.
D’autre part, en période de crise et de disette financière, au moment où nos collègues enseignants de Lettonie, pays de l’Union Européenne, voient leur traitement presque divisé par deux (!), à l’heure où tant de nos concitoyens, souvent parents d’élèves ou anciens élèves, souffrent du chômage et d’une perte importante de revenus, il me paraît indécent de toucher une prime pour la correction d’une épreuve malheureusement vidée de son sens et de sa portée originels.
Je tiens à signaler que ce refus d’être payé pour mes corrections de 50 copies du bac (session 2009) est et reste un acte individuel, assumé et revendiqué seul : il n’engage aucun de mes collègues, bien sûr, mais veut signifier que=2 0je préfère renoncer de moi-même à ce petit privilège financier, au nom de mes convictions professionnelles et de l’honneur de ma vocation.
Veuillez recevoir, madame, monsieur, mes salutations distinguées.
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