C’est Clochemerle à Plan-de-Cuques, Bouches-du-Rhône. Avec deux personnages aux déclarations impayables: le maire de Plan de Cuques, Jean-Pierre Bertrand, et Roland Povinelli, conseiller général.
Mais d’abord, de quoi s’agit-il ?
De trois fois rien, mais qui va nous permettre de déboucher sur quelque chose. On vient de construire un Collège à Plan de Cuques, mais, deux ans après, ce collège n’a toujours pas de nom. On fait donc voter les intéressés et, ô surprise, c’est le nom d’Olympe de Gouges qui sort (il y avait trois possiblités: Rosa Parks, Simone Veil et ladite Olympe).
Surprise et dépit du maire et du conseiller, qui auraient préféré Simone Veil. Et, première énormité, ils confient à la presse leur désarroi devant ce choix d’une « révolutionnaire méconnue » (sic) ! La suite de l’article qui relate tout ceci (1) est encore plus savoureuse: « Lors d’une réunion à ce sujet, Roland Povinelli, conseiller général du canton s’est même inquiété de savoir pourquoi on l’avait guillotiné… On s’est renseigné, elle n’aurait rien fait de répréhensible » Re-Sic !
On appréciera tout particulièrement le conditionnel « elle n’aurait… »
On est partagé entre l’effarement devant tant d’inculture -pour des élus, tout de même…- et le franc éclat de rire, idéal pendant la période des vacances: voilà une journée qui commence bien !…..
Faisons donc une rapide remise à niveau historico-culturelle pour notre maire et notre conseiller général. Des devoirs de vacances, en quelque sorte…
Non, elle n’avait rien fait de répréhensible, Olympe de Gouges (pas la peine de rester dans le flou « elle n’aurait »: elle n’a !). Pas plus que les milliers de morts guillotinés sous la Terreur, ni, plus généralement, les 6 à 700.000 victimes de la Révolution. Et, non, elle n’était pas révolutionnaire. Et si elle est méconnue de MM Bertrand et Povinelli, on ne sait pas qui est le plus à plaindre de cette ignorance, d’elle ou d’eux….
Son vrai nom est Marie Gouzes. Royaliste, comme tout le monde (il n’y avait pas dix républicains en France, selon le mot de Saint Just), elle adopta l’enthousiasme des idées nouvelles au moment où, pour tout le monde, cette révolution semblait n’être que l’évolution nécéssaire dont avait rêvé, par exemple, un Mirabeau. Mais assez vite, par la suite, révoltée et effrayée par les horreurs dont Marat, Danton, Robespierre et consorts se rendirent coupables, et lucide sur les conséquences de ce qui ne pouvait plus que déboucher sur le Totalitarisme, Marie/Olympe redevint la royaliste qu’elle avait été.
Elle eut le courage, la noblesse de coeur et la grandeur d’âme de défendre Louis XVI et de rédiger des pamphlets contre Marat et Robespierre. Mais les conventionnels lui interdisirent d’aider concrètement Malesherbes à défendre le Roi, au cours de son procès. Un tel courage ne pouvait bien sûr pas rester impuni: Robespierre la fit guillotiner le 3 novembre 1793, trois semaines après Marie Antoinette, à qui elle avait crânement adressé le préambule de sa « Déclaration des Droits de la Femme et de la Citoyennne ».
Il est attesté qu’elle monta à l’échafaud en faisant preuve d’un grand courage et d’une grande sérénité, illustrant le naufrage des Lumières dans la Terreur….
Bon choix, le nom d’Olympe de Gouges pour votre collège, monsieur le maire, et monsieur le conseiller général.
Et bonnes vacances, maintenant que vous savez tout ou -du moins- que vous en savez assez pour ne plus être pris en défaut dans vos prochaines déclarations à la presse …..
(1) : La Provence, mercredi 15 juillet.
Votre billet sur Marie Gouze dite Marie-Olympe de Gouges, femme politique et polémiste, me plaît.
Cette femme, auteur de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, qui a laissé de nombreux écrits en faveur des droits civils et politiques des femmes et de l’abolition de l’esclavage des Noirs … est née sous le nom de Gouze, d’un père boucher, en 1748, à Montauban, elle serait en vérité la fille naturelle du poète Jean-Jacques Lefranc, marquis de Pompignan, membre de l’Académie française et souffre-douleur de Voltaire.
Devenue emblématique des mouvements pour la libération des femmes, pour l’humanisme en général, et du rôle qu’elle a joué dans l’histoire des idées a été réévaluée à la hausse dans les milieux universitaires.
Point ne faudrait oublier qu’elle fut une des premières franc-maçonnes, à la suite de Maria Deraismes (14/01/1882 dans la loge Les Libres-Penseurs au Pecq) … On pourra aussi noter que Gouges et Royal, nées respectivement Marie et Marie-Ségolène, ont chacune escamoté en elles le prénom marial … etc.