Massat, c’est cette petite ville du Sud-Ouest où le maire, communiste, qui boit du petit lait, met l’église du village -qui compte aussi deux chapelles- en vente…. Certains ne voient pas l’enjeu, d’autres en sourient, parlant même (on l’a entendu à la télé !…) de Peppone et Don Camillo.
Patrice de Plunkett livre une analyse intéressante et assez juste de cette « affaire », à laquelle il nous semble que l’on pourrait malgré tout rajouter deux ou trois choses.
L’analyse de Plunkett, d’abord:
« …Les rieurs se trompent : à Massat, ce n’est pas Don Camillo. Dans l’Italie de Guareschi (1948), la petite ville de Brescello a une église, qui est pleine chaque dimanche. Dans la France de 2009, le village de Massat a une église et deux chapelles. Elles ne sont pas vraiment pleines chaque dimanche. Cette situation ne justifie pas l’agressivité de M. Galy-Gasparrou, mais elle lui donne beau jeu. D’autre part, Brescello est coupée en deux : la moitié des habitants sont paroissiens, l’autre moitié communistes, même si une partie des communistes (dont Peppone lui-même) paroissianisent en cachette ; le fils de Peppone est baptisé par don Camillo, sous le triple prénom de « Libero-Camillo-Lénine ». C’est le charme mélancolique des temps qu’évoque Guareschi : une époque de convictions opposées mais jumelles, enracinées dans les profondeurs de la culture populaire.
Rien à voir donc avec Massat en 2009, qui ressemble au reste du désert mental français si l’on en croit le maire. Pas de bloc populaire « noir », pas de bloc populaire « rouge »… Mais le vide spirituel et culturel : un vide attesté en d’autres lieux par ces procès (intentés par des bobos néo-villageois) pour faire taire les cloches, les coqs et les tracteurs. Là où on le constate, d’où vient ce vide ? Sur le versant religieux, de la disparition des catholiques. On peut réagir aux esclandres du citoyen Galy-Gasparrou de deux manières. Ou bien dans le registre « cabinet des antiques », en hurlant à la cathophobie, au complot, etc. Ou bien dans le registre réaliste, en tenant compte de l’image qu’offre la chrétienté française en 2009. Relisez l’enquête IFOP toute récente (cf. ici le commentaire de D. Ridder sous la note du 12/08) : une population vieillissante, sociologiquement enlisée, politiquement déséquilibrée… et religieusement si mal formée qu’elle ignore souvent les positions de l’Eglise à laquelle elle est censée appartenir ; et qu’elle cède à des réflexes qui lui aliènent la jeunesse. Pas assez de foi, pas assez d’audace, l’une et l’autre étant liées ! Le jour où les populations catholiques françaises feront un autre effet, les lieux de culte seront plus fréquentés – et les Galy-Gasparrou retrouveront le chemin de la modération…. »
Chapelle de l’Ave maria, Massat
Oui, bien sûr, ce que dit Plunkett est juste. Il pose d’ailleurs la bonne question : D’où vient ce vide ?…..
Mais, justement, il nous a semblé qu’il fallait parler aussi de l’une des origines du pourquoi du comment de cet affaiblissement du catholicisme (cette note), et bien voir (note de demain) que la tourmente dans laquelle se trouve la catholicisme est, de toutes façons, une tourmente générale, dépassant de beaucoup le seul catholicisme, et que celui-ci n’est pas le seul à souffrir dans un monde où tout se porterait bien (culture, éducation, moeurs, mouvements politiques etc…).
Ce « vide » dont parle Plunkett -qui est le « rien » dont parle Mattéi- ne se sont pas faits tout seuls, ils ne se sont pas produits tout seuls, par génération spontanée. Ils sont aussi -et peut-être même surtout- le fruit d’une longue et incessante guerre politique de tous les instants menée depuis plus de deux siècles par les Lumières, puis par la Révolution, puis par la République idéologique française, héritière de cette Révolution qui est avant tout et essentiellement antichrétienne. Et cette guerre est dirigée contre le seul catholicisme (observez qu’il ne se passe quasiment pas un jour à la télé ou a la radio sans que l’on aie un sujet sur l’Islam, et le plus souvent laudatif; le christianisme, lui, on en parle le moins possible, et lorsque on en parle, c’est presque toujours en dérision…).
La République idéologique n’a que le mot de laïcité à la bouche. Mais c’est un grossier mensonge et une grossière supercherie; sa soi-disant laïcité n’est qu’un laïcisme militant dirigé en permanence contre le seul catholicisme. Et pour faire disparaître ce catholicisme abhorré -ce qui est sa raison d’être essentielle et substantielle- elle est prête à ouvrir toutes grandes les portes à n’importe quelle autre culture ou n’importe quelle autre religion.
Et d’ailleurs, elle est elle-même une religion, ce qui dit bien que sa laïcité n’est que de façade: la seule chose qui lui importe, répétons-le, c’est la disparition du catholicisme. Là est sa raison d’être, et qu’on le remplace par ce qu’on voudra, par sa religion à elle ou par l’Islam, cela lui est égal: seul compte l’extirpation du catholicisme. C’est le rôle historique que la Révolution s’est fixée….
Qu’il n’y ait donc « pas assez de foi, pas assez d’audace » chez les catholiques, comme le dit Plunkett dans sa dernière phrase, certes. Mais cet affaiblissement a aussi des raisons bien précises….. (à suivre…).
Dans son ouvrage « La religion dans la démocratie », Marcel Gauchet fait apparaître que le ressort primordial de la croyance n’est plus l’au-delà, mais l’identification de soi ici-bas.
Les catholiques ont cessé de croire qu’en n’allant pas à la messe tous les dimanches, ils cessaient d’être de bons chrétiens. La notion de » faute grave « , de « péché mortel », a perdu presque toute crédibilité. Nombre de croyants raisonnent à la façon de Brigitte Bardot, qui déclarait : « Les curés, je n’y crois pas trop.,Ma religion, c’est Dieu et moi. Je n’aime pas les intermédiaires « .