Trois nouvelles en provenance des mondes musulmans se sont télescopées, en ce début du mois d’octobre. Il n’est pas inutile de les rapprocher, malgré leur manque total de rapport entre elles à priori, car elles sont autant de signaux forts -et contradictoire- concernant la nébuleuse islamique. Et on va voir qu’on peut en tirer une leçon….
La première vient d’Algérie. Les deux autres viennent d’Egypte et de Jordanie…..
Commençons par l’Algérie, où les islamistes dictent désormais leur loi sur les campus. Dans ce beau pays, on le sait, l’idéologie soi-disant progressiste a pris le pouvoir après 1962, et n’a eu rien de plus pressé que de gâcher l’énorme potentiel créé par les 130 ans d’effort précédents. Ce fut « en arrière toute, les écrevisses », et le FLN au pouvoir, en alignant ce malheureux pays sur le modèle périmé de l’URSS (on fait court, on résume à grands traits….) l’a fait entrer à reculons -comme les écrevisses- dans le XXIème siècle. Et ce n’est pas fini. Maintenant que, là comme ailleurs, les mirages révolutionnaires se sont effondrés, c’est l’Islam intégriste qui prend la relève. Et qui continue de plus belle la marche en arrière imposée à tout un peuple opprimé.
Dernier acte de cette main-mise de plus en plus absolue, et de plus en plus étouffante: la suppression de la mixité dans les universités algériennes. Après quinze jours de contestation -parfois violente- les étudiants de Bou-Merdés (ex Rocher noir, à 35 km d’Alger) ont dû se plier à la fatwa du Ministère de l’Enseignement supérieur: « l’année 2009-2010 sera celle de la fin de la mixité à l’Université ». En Algérie, c’est clair, l’intégrisme n’est plus rampant, il est triomphant.
En Egypte et en Jordanie, à l’inverse, on a eu deux décisions radicalement contraires à celle des tenants de la politique de l’écrevisse algérienne.
On apprenait d’abord (1), le 3 octobre, en Egypte, que le cheikh de la prestigieuse mosquée cairote d’Al-Azhar, Mohammed Sayed Tantaoui, était déterminé à interdire le port du niqab (voile intégral ne laissant qu’une fente pour les yeux, ndlr) dans les lycées qui dépendent de lui. Une décision qui a provoqué « une tempête en Egypte », relate le site d’information arabe Elaph. L’affaire a commencé le 3 octobre, lors d’une tournée d’inspection effectuée par Tantaoui dans les lycées relevant d’Al-Azhar afin de s’assurer de l’application des mesures d’hygiène pour lutter contre la grippe A H1N1. Dans un lycée pour jeunes filles, le cheikh « a été surpris de voir l’une des élèves en niqab alors qu’elle était en cours. Le cheikh s’est alors emporté et lui a demandé d’enlever son voile, affirmant : « Le niqab n’est qu’une tradition, il n’a pas de lien avec la religion ni de près ni de loin. » A la suite de cet incident, il a décidé d’interdire le port du niqab au sein des lycées d’Al-Azhar, en précisant que son port est facultatif à l’extérieur de ces établissements. »
« …La décision du cheikh d’Al-Azhar arrive au moment où le ministre de l’Enseignement supérieur, Hani Hilal, a décidé d’interdire l’accès des cités universitaires aux étudiantes portant le niqab », précise Elaph.
Puis, le 7 octobre, on apprenait que le roi Abdallah de Jordanie venait de limoger un haut responsable religieux, membre du Conseil des grands oulémas, la plus haute autorité religieuse du pays. Pour avoir critiqué la mixité autorisée dans une nouvelle université ouverte le 23 septembre. Lors de l’inauguration de ce premier établissement mixte du pays, doté des dernières technologies, le roi avait souhaité qu’il devienne « une maison du savoir et un lieu de tolérance ». Dans un entretien télévisé, le religieux, cheikh Saad Al-Chithri, avait dénoncé la mixité « un grand péché et un grand mal », proposant par ailleurs qu’un comité islamique s’assure que l’établissement n’enseigne pas des « idéologies étrangères », telles que la théorie de l’évolution. Depuis son arrivée au pouvoir en 2005, le roi Abdallah s’est opposé, à plusieurs reprises, aux religieux les plus conservateurs du pays (2).
Voilà pour les faits.
Quelles() leçon(s) et quel(s) enseignement(s) en tirer ? Au moins deux…
D’abord, éviter absolument, et en tout, de faire de l’Islam un bloc, et de le considérer comme totalement uni ou totalement monolithique. Il l’est, certes, en partie, voire en grande partie. Mais ses divisions sont réelles et notre intérêt n’est pas de les coaliser. Il est d’éviter absolument de souder entre elles, en les rejetant indistinctement, toutes les composantes du monde musulman. Il faut bien admettre qu’il y a, en terre(s) d’Islam, des gens raisonnables et mesurés, avec qui l’on peut – et l’on doit – discuter. Leurs préférences religieuses, leurs débats internes ne sont pas ce qui doit orienter notre politique à leur égard. Ce qui nous importe, c’est leur attitude envers nous, leur politique dans leur relation avec nous : amicale ou hostile, compatible, ou non, avec nos intérêts nationaux. Le reste serait, de notre part, une inutile – voire nuisible – politique d’ingérence.
Ce qui nous amène à une deuxième conclusion. L’erreur de trop de gouvernants occidentaux (et de ceux des USA en particulier) est d’avoir -d’une façon quasi constante- fait fond sur les mouvements islamistes plutot que nationalistes arabisants laïques. Les Usa ont, par exemple, cru malin de mettre Ben Laden en selle pour contrer les Russes, envahissant l’Afghanistan: beau manque de perspicacité ! Au risque de surprendre, et peut-être même de choquer, n’aurait-on pas mieux fait -et ne ferait-on pas mieux- de soutenir, au contraire, des régimes laïques ? Nasser hier, en Egypte, ou les Assad en Syrie, Ben ALi en Tunisie et même… Saddam Hussein en Irak ? Tous régimes, certes, très imparfaits, voire voyous, mais qui au moins ne cherchaient pas à lancer une guerre politico-religieuse contre nous, et s’occupaient (s’occupent toujours, en Syrie, en Tunisie) de contenir les islamistes ?
(1): source: le blog de Patrice de Plunkett ( http://plunkett.hautetfort.com/ ).
(2): source : Le Monde du 7 octobre, article de Stéphanie Le Bars.
VERDU sur Éloquence : Tanguy à la tribune,…
“Il est bon !!”