Mais qu’avons-nous donc contre la démocratie ?
Nous n’avons rien contre la démocratie en soi. Il ne fait pas de doute qu’aucun pouvoir ne peut subsister s’il n’a pas le consentement des gouvernés. Ce consentement ne s’exprime pas nécessairement de manière formelle, par un suffrage ; cependant le suffrage est toujours nécessaire à un moment ou à un autre. Or, nous sommes forcés de dire que la démocratie telle qu’elle existe dans notre pays ne nous donne pas satisfaction. Pourquoi ?
1. D’abord parce qu’elle prétend être autre chose que ce qu’elle est. Elle prétend réaliser l’égalité des citoyens et elle perpétue des oligarchies. Elle annonce sans cesse qu’elle est un progrès par rapport aux régimes antérieurs et elle ne fait qu’appliquer les vieilles recettes qui donnent le pouvoir aux plus riches, aux plus puissants, à ceux qui ont le plus de relations. Nous ne nous en indignons pas, c’est ainsi depuis le commencement des temps ; mais nous trouvons qu’il ne faut pas nous en conter.
2. Ensuite parce que la démocratie, en France plus qu’ailleurs, est inséparable d’une idéologie qui l’impose, non pas comme une technique juridique, mais comme l’instrument pour l’avènement d’un homme nouveau. Le résultat est que, comme toute idéologie, cette vision constructiviste et finaliste des choses n’admet la volonté du peuple que lorsqu’elle s’exerce dans le sens souhaité : Europe, peine de mort, nationalité, mondialisme, métissage, tels sont, avec bien d’autres, les sujets sur lesquels l’opinion de la majorité est sans valeur si elle ne va pas dans le sens espéré. Sur chacun de ces sujets, l’homme politique s’érige en instituteur destiné à apprendre à vivre aux peuples dont ils sont censés exécuter la volonté.
3. Il en résulte qu’elle n’est pas assez démocratique. Depuis qu’elle est devenue la religion d’Etat, en 1875, le seul souci des gouvernants a été d’encadrer le vote, de le contrôler ; et chaque fois qu’une réforme est faite sur les institutions, c’est pour réduire la marge de manœuvre de l’électeur qui est forcé de choisir dans un cadre étroit, afin de maintenir le pouvoir des coteries. Deux tours aux élections, afin que les partis puissent éliminer les nouveaux venus comme des marchands dans une salle de ventes. Des quorums de plus en plus stricts pour se maintenir au second tour, des listes de soutiens de l’établissement de plus en plus contraignantes. Le résultat est une abstention de plus en plus massive.
Ne nous étonnons pas non plus que le suffrage y soit constamment bafoué. Les électeurs votent pour un programme dont chacun sait qu’il ne sera pas respecté. Les politiciens accumulent sans honte des promesses dont ils savent qu’elles ne sont que mensonges et les électeurs savent qu’ils mentent. Le résultat est catastrophique pour le civisme : l’électeur se sait floué d’avance et méprisé par les rhéteurs, le candidat dévalorise la fonction politique, la plus haute qui soit, il méprise et se sait méprisé. Il n’y a rien de plus triste. Du reste, les décisions importantes échappent à l’électeur. Soit on ne lui demande pas son avis, comme pour l’immigration, soit on ne tient pas compte de son avis comme pour le traité de Lisbonne.
4. Ensuite parce que le suffrage tel qu’il est donne une image instantanée et fausse de la collectivité. Il ne prend nullement en compte l’identité historique du pays et sa destinée. Il ne tient compte que d’une abstraction, de sorte que la nation n’est plus qu’une entité administrative sans réalité autre que conventionnelle. De nombreuses décisions sont prises par le pouvoir sans tenir compte des intérêts à long terme de la nation et des français. Ainsi, les excédents sur les retraites des années 70 ont-ils été gaspillés, voire pillés, alors même que nous savions que le collapsus démographique était devant nous, parce que les politiciens ne tiennent compte que de leur réélection et qu’ils ne prennent donc pas en compte le long terme. La règle est l’insouciance et la démagogie.
Certes, nous savons que certains, lisant ces lignes, estimeront que nous sommes mécontents de ce système parce qu’il ne nous laisse aucune place. Il est vrai qu’il serait naïf de notre part de croire que les choses peuvent changer : la pente est glissante et le déclin s’accélère. De toute façon, tant que l’idéologie qui structure l’Etat gouvernera les consciences, il sera vain d’espérer un redressement. Si toutefois l’idéologie qui nous impose le sens unique venait à se desserrer, et cela arrivera bien un jour, alors une démocratie non idéologique pourrait renaître.
< p class="MsoNormal" style="text-align: justify; line-height: 150%; text-indent: 35.45pt; margin: 0cm 0cm 0pt;">1. Elle ne prétendrait pas changer l’espèce humaine, mais seulement consulter et laisser à chaque niveau le soin de s’organiser. Elle prendrait en compte les différences entre les hommes, sans chercher à les effacer, mais aussi sans les cacher, de sorte que les responsabilités collectives pourraient jouer dans l’intérêt des collectivités. Elle ne prétendrait pas représenter l’humanité mais seulement le groupe consulté. Les groupes devraient avoir un champ très large d’auto-organisation, constituant ainsi autant d’entités indépendantes pour tout ce qui les concerne, y compris le droit des personnes. Tout cela ne peut exister que si l’individualisme dogmatique qui imprègne notre droit depuis la révolution est abandonné.
2. Elle ne laisserait pas l’élu tromper l’électeur en le trahissant sitôt élu. Il existe un moyen d’éviter cette tare : le mandat doit être impératif, comme il l’était sous l’ancien régime. Si l’élu ne respecte pas ses engagements, une procédure de rappel doit être mise en place, permettant de démettre avant la fin de son mandat celui qui a escroqué les électeurs. C’est la procédure de la destitution populaire qui existait sous l’ancien régime, et qui existe encore dans certains états américains (recall).
3. Le vote ne serait pas instantané, mais holiste. La représentation doit tenir compte de la collectivité dans toute sa dimension historique : les morts, les vivants et les enfants à naître. Le but est donc, non pas de recréer la nation à chaque instant, mais de la continuer. Pour cette raison, la notion mathématique « one man, one vote » chère à DC ne peut répondre à cette fin, car il faut représenter, non des individus, mais des familles, des communautés. De plus, la société n’étant pas fondée sur un contrat social, la notion de souveraineté, noyau mystérieux du commandement, ne peut être laissée à un suffrage prosaïque : il faut lui restituer son caractère sacré sans lequel l’être social périclite.
4. En revanche, dans le cadre des institutions, toutes les méthodes de la démocratie directe et semi-directe peuvent être exploitées : initiative populaire, référendum, pétitions d’enquête, tribunat, juridiction des empiètements, etc.. La méfiance que l’esprit républicain manifeste pour la démocratie (voir à ce sujet les intéressants développements de Chantal Delsol) ne doivent plus être de mise dès lors que la question du souverain est tranchée.
Cela dit, il est évident que rien ne peut fonctionner de tout cela tant que l’esprit public n’a pas été débarrassé de son finalisme idéologique. La question n’est pas simple car cette idéologie est la résultante de toute l’évolution de notre culture depuis au moins 7 siècles. Vaste programme.
La démocratie n’a pas pour but de déterminer la vérité. Elle est seulement le régime qui fait résider la légitimité politique dans le pouvoir souverain du peuple. Ce qui implique d’abord qu’il y ait un peuple. Au sens politique du terme, un peuple se définit comme une communauté de citoyens dotés politiquement des mêmes capacités et liés par une règle commune à l’intérieur d’un espace public donné.
Se fondant sur le peuple, la démocratie est aussi le régime qui permet à tous les citoyens de participer à la vie publique, qui affirme qu’ils ont tous vocation à s’occuper des affaires communes. Osons un pas de plus : elle ne proclame pas seulement la souveraineté du peuple, mais a vocation à mettre le peuple au pouvoir, à permettre au peuple d’exercer lui-même le pouvoir.
On assiste depuis des années, à une dénaturation de la démocratie de la part d’une Nouvelle Classe politico-médiatique qui, pour sauvegarder ses privilèges, souhaite en restreindre le plus possible la portée. L’idée dominante est qu’il ne faut pas abuser de la démocratie, faute de quoi on risquerait de sortir de l’état de choses existant.
A contrario, il ne s’agit pas non plus de représenter le peuple comme un être « naturellement bon », aliéné et corrompu par des méchants. Le peuple n’est pas sans défauts. Mais on peut penser, que les défauts du vulgaire ne se distinguent pas fondamentalement de ceux des princes – et que, dans l’histoire, ce sont surtout les élites qui ont trahi.
D’acord avec l’article,nous sommes mal gouvernés c’est la Démoncratie,par des « salauds » TOUS AUSSI CORROMPUS;
La démocratie est la substitution de la dictature d’un seul par celle du plus grand nombre, rien de plus.
Permettre à des gens de décider du sort d’un pays alors qu’ils en sont incapables et sont manipulés est injuste et scandaleux.
Pas étonnant que les élus ne pensent qu’à leur carrière pour la rendre la moins éphémére possible en flattant l’électeur de base et que les campagnes des candidats soient de la poudre aux yeux et l’objet de magouilles financières.
De toute évidence, mon cher Antiquus, débarasser « l’esprit public de son finalisme idéologique » revient à s’opposer au droit naturel moderne qui, sous l’influence chrétienne pose que les principes fondamentaux de la société et de l’Etat sont à déduire des propriétés inhérentes à un homme considéré en soi, sans attache sociale ou politique particulière.
Tous ces facteurs appellent une refonte en profondeur des pratiques qui ne peut s’opérer qu’en direction d’une véritable démocratie (directe, participative etc…) telle que vous la définissez.
Dans une société qui tend à devenir de plus en plus « illisible « , celle-ci aura en effet pour principal avantage d’éliminer ou de corriger les distorsions dues à la représentation, d’assurer une meilleure conformité de la loi à la volonté générale, et d’être fondatrice d’une légitimité sans laquelle la légalité institutionnelle n’est que pur simulacre.
Soulignons une fois encore que le principe politique de la
démocratie n’est pas que la majorité électorale décide, mais que le peuple soit souverain.
Le vote n’est lui-même qu’un simple moyen technique de consulter et de révéler l’opinion. Cela signifie que la démocratie est un principe politique qui ne saurait se ramener à une idée purement arithmétique ou quantitative.
Cette conception de la démocratie s’oppose directement à la conception libérale qui aboutit au règne des gestionnaires, des experts et des techniciens.
La démocratie, en fin de compte, repose moins sur la forme de gouvernement proprement dite que sur la réelle participation du peuple à la vie publique.
Dénoncer des mots qui ont une valeur : démocratie,
république, sous prétexte que certains, censés les
incarner, les garantir ou les mettre en pratique, ne les
respectent pas, pour confisquer le pouvoir au profit d’une
oligarchie, n’a pas de sens.
Devrions-nous aussi dénoncer la monarchie royale, sous
prétexte que certains, dans le passé, au lieu de la servir,
pensaient avant tout à se servir ?
Une voix, un homme n’est pas une notion mathématique,
mais seulement l’affirmation que chaque être est unique
et donc, chaque individu a effectivement le droit de faire
valoir son opinion à titre personnel.
Bien entendu, chacun appartient à toute une série de
groupes différents, familiaux, sociaux, professionnels …
mais organiser la démocratie sur une base
communautariste est non seulement dangereux, mais
nuisible à l’harmonie et à la concorde dans la société.
Devrions nous voter selon notre appartenance religieuse,
ethnique, sexuelle, par exemple ? Antiquus s’égare sur ce
point. Sébasto fait la part des choses.
Mon Cher DC, si j’ai bien compris, Antiquus propose surtout une amélioration de la représentation, par la mise en oeuvre de la démocratie sous une autre forme; rendue possible dans une société débarrassée de son carcan idéologique.
Une telle réorientation apparaît même aujourd’hui d’une nécessité accrue du fait de l’évolution générale de la société.
L’Etat de droit républicain d’aujourd’hui, n’apparaît pas de nature à corriger cette situation. En effet, reposant sur un ensemble de procédures et de règles juridiques formelles, il est devenu indifférent aux fins spécifiques du politique.
Les lois y ont autorité du seul fait qu’elles sont légales,
c’est-à-dire conformes à la Constitution et aux procédures prévues pour leur adoption. La légitimité se réduit dès lors à la légalité.
Cette conception légaliste de la légitimité invite à respecter les institutions pour elles-mêmes, comme si celles-ci constituaient une fin en soi, sans que la volonté populaire puisse les modifier et en contrôler le fonctionnement.
Or, en démocratie justement, la légitimité du pouvoir ne dépend pas seulement de la conformité à la loi, ni même de la conformité à la Constitution, mais avant tout de la conformité de la pratique gouvernementale aux fins qui lui sont assignées par la volonté générale.
La légitimité du droit ne saurait, de même, être garantie par la seule existence d’un contrôle juridictionnel : il faut encore, pour que le droit soit légitime, qu’il réponde à ce que les citoyens en attendent et qu’il intègre des finalités orientées vers le service du bien commun.
Enfin, on ne saurait parler de légitimité de la Constitution que lorsque l’autorité du pouvoir politique est reconnue comme toujours susceptible d’en modifier la forme ou le contenu.
Ce qui revient à dire que le pouvoir politique ne peut être totalement délégué ou aliéné, qu’il continue d’exister et reste supérieur à la Constitution et aux règles constitutionnelles, même quand celles-ci procèdent de lui.
Enfin, la problématique communautaire que vous écartez , revêt un regain d’intérêt dans le cadre d’une interrogation sur le pluralisme et le « multiculturalisme » des sociétés contemporaines.
Et surtout, dans la perspective d’un retour à de petites unités de vie collective se développant à l’écart de grands appareils institutionnels, bureaucratiques ou étatiques qui ne parviennent plus aujourd’hui à jouer leur rôle traditionnel de structures d’intégration.
Sous ce dernier aspect, la communauté apparaît comme le cadre naturel d’une démocratie de proximité — démocratie organique, démocratie directe, démocratie de base —
fondée sur une participation plus active et sur la recréation de nouveaux espaces publics à tous les niveaux.
Cher Sébasto,
Une meilleure représentation, certes.
Une démocratie plus ouverte, certes.
Mais il ne s’agit pas pour autant de concevoir une
démocratie sans partis politiques.
Les partis politiques concourent au suffrage universel en
proposant un programme politique de gouvernement, le
temps d’une législature.
Il est nécessaire qu’ils travaillent exclusivement à cela et
demeurent à leur place, ni plus, ni moins.
La tête de l’Etat et l’arbitrage politique doivent être libérés
de l’accaparement des partis pour que le Roi puisse y
remplir sa mission en toute indépendance, en vue du bien
commun, garant de la res-publica.
Le Sénat peut très bien être réformé pour venir faire
contrepoids à l’assemblée nationale, par une meilleure
représentation du corps électoral: par exemple, par une
représentation des corps intermédiaires aux côtés des
partis politiques qui pourraient bénéficier d’une
proportionnelle intégrale.
La démocratie de proximité existe déjà par les lois de
décentralisation, elle peut être aussi réformée pour y
associer les corps intermédiaires, l’on peut aussi étendre
l’usage du référendum sous certaines conditions, interdire
le cumul des mandats, ouvrir des Etats Généraux
consultatifs sur différents sujets, et que dire de la
démocratie économique et sociale dans l’entreprise à
repenser complètement …
En effet, la démocratie mérite d’être plus vivante, plus
proche des citoyens, mais pas n’importe comment. C’est
la monarchie royale qui permettra d’engager cette
nouvelle révolution au service du bien commun, avec
toutes les structures représentatives, partis politiques
compris.
Il y aurait, me semble-t-il, une très grande différence dans le fait que les futures « structures représentatives », qu’envisage DC, existeraient « partis politiques compris », alors qu’aujourd’hui elles sont constituées par les « partis politiques, exclusivement ».
S’ils concourent, pour l’instant, à l’expression du suffrage, c’est, en effet, à titre exclusif.
Ce ne sont pas les partis et groupements politiques qui sont critiquables, en soi, c’est plutôt, à mon avis, qu’ils détiennent, sur le plan national, le monopole de la représentation.
Une autre remarque, par ailleurs : si l’on considère l’ensemble des réformes – d’ailleurs fort intéressantes – que préconise DC, y compris, bien-sûr, s’agissant de la fonction suprême, il faut bien se rendre compte que ce qu’il appelle le « bloc constitutionnel » actuel serait tout de même, substantiellement différent …
En quoi, sans vouloir m’immiscer dans le débat DC / Antiquus, ce dernier ne « s’égare » sans-doute pas autant que cela …
Vous avez raison ma chère LORI, renouer avec l’esprit démocratique implique de ne pas se contenter de la seule démocratie représentative, mais de chercher à mettre en oeuvre à tous les niveaux une véritable démocratie participative ( » ce qui touche à tous doit être l’affaire de tous « ).
Il s’agit pour cela de désétatiser le politique, en recréant des espaces citoyens à la base : chaque citoyen doit être un acteur de l’intérêt général, chaque bien commun doit être désigné et défendu comme tel dans la perspective d’un ordre politique concret. Le client consommateur, le spectateur passif et l’ayant-droits privé ne seront dépassés que par une forme radicalement décentralisée de démocratie de base, donnant à chacun un rôle dans le choix et la maîtrise de son destin.
La procédure référendaire pourrait être également réactivée par l’initiative populaire. Contre la toute puissance de l’argent, seule autorité suprême de la société moderne, il faut une entité – le Roi – seule capable d’arbitrer et d’ imposer la séparation entre la richesse et le pouvoir politique.
Boutang, caractérisant la monarchie, avait eu – au moment de la parution de son Reprendre le Pouvoir – cette fort belle définition : « le seul pouvoir qui ne s’achète pas par l’argent ».
Lors des campagnes présidentielles – par exemple aux Etats-Unis – il est bien connu que le candidat élu est, généralement, tout simplement, celui qui a recueilli le plus de fonds. Montants souvent considérables et qui, semble-t-il, font la différence …
Ira-t-on jusqu’à penser que cette différence marque déjà, en soi-même, un choix de la volonté dite générale ? Je trouve que ce serait, tout de même, un point de vue assez trivial.
Quant à l’exercice du pouvoir, ainsi désigné, il n’est pas douteux que l’influence des forces d’argent qui l’ont, en quelque sorte, institué, ne manquera pas, ensuite, de jouer à plein.
C’est pourquoi, il faut, à mon sens, adhérer tout à fait, à l’heureuse formule de Sébasto : « Contre la toute puissance de l’argent, seule autorité suprême de la société moderne, il faut une entité – le Roi – seule capable d’arbitrer et d’ imposer la séparation entre la richesse et le pouvoir politique ».
Tout royaliste se devrait de la garder présente à l’esprit. Et devraient aussi y réfléchir, je crois, tous les citoyens français – pour l’instant, majoritaires dans notre pays – qui ne le sont pas encore devenus.
Il appartient en effet aux royalistes, tout particulièrement,
de considérer qu’une fois, la tête de l’Etat libérée de
l’emprise absolue des partis, il est possible d’engager
grâce au Roi, une révolution, cette fois, royale, qui
permettra précisément aux partis politiques de remplir
leur rôle essentiel de mouvements de pensée pour la
définition de programmes politiques à mettre en oeuvre,
avec une meilleure représentativité des petites formations
politiques, tout en associant à la fois au parlement, dans
les structures décentralisées, et dans les entreprises, une
nouvelle citoyenneté en ouvrant et en repensant les
modes de représentation et de décision, notamment dans
le domaine économique et social, aux côtés des syndicats.
J’avoue que je ne peux réprimer un sourire en lisant que DC constate mes « égarements » au sujet du principe «Une voix, un homme ». On dirait, à le lire, que j’ai commis un blasphème, et la preuve, c’est que DC résume les fondements de ce principe dans le caractère « unique » de « chaque être! », ce qui est une expression réservée par le christianisme (et l’Islam) à l’âme humaine, absolument pas à son expression comme par exemple le suffrage. Désolé, je ne me sens pas foudroyé. Le caractère trompeur de ce propos apparaît d’ailleurs si l’on s’interroge sur le poids respectif d’un suffrage selon qu’il s’exprime dans le cadre d’une majorité relative: combien de voix faut-il pour élire un député qui ne bénéficie pas de report au second tour, par comparaison avec celui qui en a? Les mathématiciens électoraux affichent un rapport de 1 à 35. Ou lorsqu’ un découpage électoral transforme une minorité en majorité? DC condamne t-il l’état fédéral au motif qu’il est impossible d’y appliquer son principe? Plutôt que de se prosterner devant l’icône, mieux vaut, à mon sens, rester lucide à son égard. En ce qui concerne le communautarisme, ce n’est peut-être pas une solution enthousiasmante, mais c’est la seule qui nous reste, à nous français de tradition, si nous voulons encore exister.
Salutations à Antiquus,
Que l’on se comprenne bien, je ne parlais « d’égarements »
qu’au sujet de voter selon une appartenance à tel ou tel
groupe, avec le risque possible d’une dérive
communautariste.
Il serait intéressant que vous nous expliquiez, car cela
semble difficile à comprendre, comment vous concevez
l’expression du suffrage universel direct, en dehors de
donner à chaque individu la possibilité d’exprimer par la
voix de son suffrage, sa position sur tel ou tel sujet, ou
sur l’élection de ses représentants.
Quant à l’Etat fédéral, bien que cette forme d’Etat ne soit
pas du tout adaptée à la France, je n’ai rien contre les
Etats fédéraux en soi. Lorsqu’ils sont démocratiques, l’on
constate que chaque individu peut effectivement voter et
représenter une voix. Je précise spécialement à votre
attention, que bien entendu, je ne réduis pas la
démocratie à ce seul principe de base, qui existe aussi
dans les « démocraties populaires » à parti unique.
Il faudrait quand même nous expliquer, ce que signifie ce
nouveau groupe des Français de tradition, dont
apparemment, je ne dois pas faire partie, tout au moins
selon vos critères ?
Tradition et démocratie ne feraient-ils pas bon ménage ?
Ce serait problématique de le penser.
Cher DC, Vos réflexions me rappellent ce que disait un de mes professeurs : Quand on n’est pas compris, ce peut être parce qu’on s’est mal exprimé ou parce que son interlocuteur ne veut pas comprendre. Je présume donc que, dans votre cas, c’est la première hypothèse qui est la bonne. Je vais donc, au risque d’être un peu lourdaud, résumer et répéter mon propos.
Vous me dites que le suffrage « un homme, une voix » donne à « chaque individu la possibilité d’exprimer par la voix de son suffrage, sa position sur tel ou tel sujet, ou sur l’élection de ses représentants ». Non, non et non ! Le suffrage n’est pas censé être une voie d’expression. Pour cela, il existe le parvis du Trocadéro, le café du Commerce, la chanson engagée, les looks et les pin’s. Non, le suffrage est censé donner un pouvoir. Or ce pouvoir, j’ai tenté de vous le montrer par maints exemples, n’est qu’une illusion trompeuse car le savoir-faire des professionnels excelle à le dévier, le détourner ou même l’écarter totalement. Je le dis carrément, les français, avec le suffrage tel qu’il est – et tel que vous le souhaitez- n’ont pas voix au chapitre. Le mot essentiel du consensus, l’adjectif « démocratique » que vous invoquez sans cesse comme un sésame, n’est qu’une imposture, une sorte de tour de bonneteau qui dupe les français. Atomisés, isolés, livrés à des pouvoirs divers, discrets ou apparents, les français sont manipulés et seuls. C’est pourquoi je propose leur regroupement au sein d’une communauté : celle des français de tradition, par opposition aux français de papier ou aux français dépossédés de leur identité. Ainsi, nous n’aurions plus ce communautarisme discriminatoire actuel, dans lequel tous réclament des privilèges au nom de leur communauté (black, beur, homos, musulmans, etc..), tout en prétendant frapper d’un interdit absolu (interdiction même de la nommer !) une seule communauté, celle des français autochtones et conformes aux principes reçus, qui sont censés payer pour les autres, se repentir et se taire, véritables hilotes, membres d’un peuple vaincu et humilié. Vous me posez la question de savoir si vous faites partie de cette « communauté ». Je me garderai bien de répondre à cette question car seule une personne peut le faire : vous-même. Pour moi, vous êtes bienvenu au club.
Enfin, vous vous interrogez sur les rapports entre la tradition et la démocratie. Comme nous nous sommes efforcés de l’expliquer à de nombreuses reprises, tout dépend de quelle démocratie on parle. S’il s’agit de la démocratie idéologique, elle est fondamentalement traditio-incompatible, voir à ce sujet les œuvres de Chantal Delsol et a contrario celles d’Olivier Duhamel. S’il s’agit d’une simple technique juridique, si on la fait descendre de sa chaire de vérité, autrement dit si elle n’a pas pour objet de changer l’Homme, si elle ne se veut pas universelle, bien sûr qu’elle est compatible avec la tradition. Cher DC, j’espère que maintenant vous avez compris ce que je voulais dire.
Si je pouvais risquer un commentaire, je dirais que la crise de la démocratie est en fait celle de la réprésentation.
La démocratie est la forme de gouvernement qui répond au principe de l’identité des gouvernés et des gouvernants, c’est-à-dire de la volonté populaire et de la loi.
Cette identité renvoie elle-même à l’égalité substantielle des citoyens, c’est-à-dire au fait qu’ils sont tous également membres d’une même unité politique.
Dire que le peuple est souverain, non par essence mais par vocation, signifie que c’est du peuple que procèdent la puissance publique et les lois. Les gouvernants ne peuvent donc être que des agents d’exécution, qui doivent se conformer aux fins déterminées par la volonté générale. Le rôle des représentants doit être réduit au maximum, le mandat représentatif perdant toute légitimité dès qu’il porte sur des fins ou des projets ne correspondant pas à la volonté générale.
Or, c’est exactement l’inverse de ce qui se passe aujourd’hui. Dans les démocraties libérales, le primat est donné à la représentation, et plus précisément à la représentation-incarnation.
Le représentant, loin d’être seulement « commis » pour exprimer la volonté de ses électeurs, incarne lui-même cette volonté du seul fait qu’il est élu. Cela veut dire qu’il trouve dans son élection la justification qui lui permet d’agir, non plus selon la volonté de ceux qui l’ont élu, mais selon la sienne propre — en d’autres termes, qu’il se considère comme autorisé par le vote à faire ce qu’il juge bon de faire.
Pour répondre à la fois à Antiquus et Sébasto, je dirais que
la question est à la fois, de mieux représenter les
attentes, les volontés et les propositions des Français, tout
en veillant à ce que les mandats ne soient pas seulement
de simples blanc seings, destinés à exercer le pouvoir,
sans que les Français n’aient plus leur mot à dire
jusqu’aux élections suivantes, ou pire, employés à être
détournés de leurs engagements, ou de leurs promesses
d’origine.
C’est précisément pour cela, qu’il faut au sommet de l’Etat
un espace arbitral, libre, garant du bien commun et de la
démocratie, le Roi, et à la base, une représentation plus
diversifiéé associant les corps intermédiaires aux élus
politiques, dans le processus des prises de décision, ainsi
que des outils de contrôle permettant de s’opposer à
certaines dérives, par le biais de pétitions induisant des
recours ou des possibilités de s’en remettre à des
référendums locaux ou nationaux d’initiative populaire,
sans tomber pour autant dans l’excès inverse, celui du
diktat de la rue et des factions.
Si c’est cela qu’il fallait comprendre, je partage ce point
de vue.