Directeur de recherches au CNRS, Michel DREYFUS est historien du mouvement ouvrier, auteur d’ouvrages sur le syndicalisme, les Assurances sociales et le communisme. Il viendra présenter mercredi (1) le dernier ouvrage qu’il a publié, sur l’ « Antisémitisme à gauche » qui n’est pas le fait de quelques déviants mais qui est d’ordinaire peu évoqué.
Michel Dreyfus y montre que toutes les composantes de la gauche ont tenu des discours antisémites – soit pour dénoncer le « capitalisme juif », soit pour fustiger sur un mode raciste des ennemis de la nation. Aussi violent que celui des nationalistes, l’antisémitisme de gauche s’estompe après l’affaire Dreyfus mais on le retrouve dans le pacifisme de l’entre-deux-guerres puis à l’ultra-gauche à la fin du siècle dernier…
Le sujet est passionnant et, à plus d’un titre, fondamental. Il est bon de l’aborder de front avec ceux qui, comme Michel Dreyfus, ne l’esquivent pas. Existe-t-il ou a-t-il existé un antisémitisme spécifique à la gauche ?, peut-on lire dans le résumé de l’ouvrage en quatrième de couverture. En tout cas, il y a bel et bien un anti-sémitisme (ou judéophobie, ou anti-judaïsme) dans les Lumières. Fait souvent méconnu par beaucoup, volontairement occulté par certains, voire parfois nié par d’autres.
Anti-judaïsme car, au terme d’antisémitisme, consacré par l’usage mais inexact puisqu’englobant la haine des Juifs et des Arabes, P.A. Taguieff préfère le néologisme de « judéophobie ». D’où le titre d’un de ses ouvrage La judéophobie des Modernes; des Lumières au Jihad mondial, dans lequel il consacre un chapitre à l’antisémitisme des Lumières, avec des auteurs comme Voltaire ( « …ces ennemis du genre humain… », un « peuple barbare, superstitieux, ignorant, absurde ») et le baron d’Holbach ( « …ce peuple de brigands et de tueurs… »), lequel a présenté une vision très particulière (!) et très édifiante du récit biblique de l’Exode…
Ainsi « la responsabilité des philosophes dans la formation de l’antisémitisme en tant que forme moderne de judéophobie, culminant dans le racisme antijuif, apparaît immense », écrit Taguieff, qui montre aussi la connexion entre le scientisme et l’antisémitisme moderne, notamment nazi…
Oui, le sujet est réellement passionnant…
(1) : Mercredi 16 décembre, 17, rue des Petits-Champs, Paris 1er, 4e étage. La conférence commence a 20 heures très précises (attention: pas de réunion les mercredi 23 et 30 décembre, en raison des vacances de Noël).
348 pages, 23 euros
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