C’est traditionnellement, au 12 octobre que l’on place la signature de la Charte de fondation de l’Abbaye de Solesmes. Traditionnellement, et par conjecture, car il existe une incertitude historique sur le jour même où cette Charte fut promulguée.
Mais, en vérité, un peu plus tôt ou un peu plus tard, le jour exact importe peu, face à l’immensité du témoignage apporté par les moines qui, à Solesmes, prient et chantent depuis mille ans.
« Kyrial » par le Choeur des Moines de l’Abbaye Saint-Pierre de Solesmes (Album complet)
Site : Abbaye Saint-Pierre de Solesmes
L’abbaye Saint-Pierre de Solesmes est une abbaye bénédictine située à Solesmes dans la Sarthe, dont les origines remontent à 1010. Elle fait partie de la congrégation de Solesmes, ou congrégation de France, au sein de la confédération bénédictine.
Ouest France a publié (mercredi 30 septembre 2009) un intéressant reportage sur les moines de l’Abbaye de Solesmes, sous le titre Ils chantent et prient à Solesmes depuis 1000 ans. Le voici.
Du lever au coucher, une soixantaine de moines louent Dieu sous les voûtes de l’altière abbaye bénédictine de la Sarthe. La congrégation fête en octobre ses dix siècles. Notre reporter a passé une journée aux côtés de ces hommes discrets, vêtus de noir, qui perpétuent la tradition de saint Benoît.
« Derrière la clôture, nous sommes libres et heureux de louer Dieu », assurent les moines de Solesmes.
5 h. La cloche incitant au réveil est agitée depuis une demi-heure par un frère habitué aux aurores : un fils de boulanger. Les moines, ombres noires, quittent leur cellule spartiate pour le choeur de l’église abbatiale : « Notre journée commence par la prière. »
« Ne rien préférer à l’amour du Christ. » C’est à la lumière de ce précepte énoncé au VIe siècle par saint Benoît, leur maître, que prient, travaillent, vivent et meurent les moines de Solesmes.
7 h 30. Le petit-déjeuner est terminé. Déjà, la cloche, pressante, sonne pour un deuxième office. Appelant à un temps de méditation ponctué de prosternations et de psaumes chantés en grégorien. Des chants en latin, aériens, lumineux, qui font la réputation mondiale de Solesmes. « Chanter, c’est prier deux fois », explique le père Paul-Alain, citant saint Augustin.
10 h. Le soleil darde par les vitraux de l’église abbatiale. Les prêtres, qui invitent à l’Eucharistie, revêtent leur chasuble verte pour ce temps fort de la journée. Chacun file ensuite vaquer à ses occupations. Ils sont professeurs, portier, cuisinier, sacristain, jardinier, tailleur… « On gagne notre pain à la sueur de notre front », fait remarquerle père Thierry.
11 h. Le frère Lionel, 39 ans, accueille des errants. La congrégation leur offre gîte et couvert. Le frère ne les juge pas. « Ils me donnent une espérance. Il y a en eux quelque chose qui peut jaillir. » Ébéniste proche de la nature, Lionel restaurait des meubles anciens à Nantes avant d’entrer à Solesmes, voilà douze ans. Il y poursuit son métier « d’humilité ». Il réalise aussi des oeuvres d’art, comme la crosse de l’évêque du Mans, sur un modèle du XIIème siècle.
13 h 12. Le grand réfectoire, hérissé de piliers, cheminées monumentales et longues tables en bois massif, accueille ses convives. Le silence, hors le bruit des couverts, est de mise. Ce jeudi, carottes râpées, rôti, pâtes et prunes du verger. Des moines, tablier sur la robe de bure, assurent le service. En haut d’une chaire, un autre lit, d’une voix douce, presque irréelle, la vie du tsar Alexandre II écrite par Hélène Carrère d’Encausse. « Nous avons le souci intellectuel », explique le père Paul-Alain. La lectio divina, la fameuse lecture quotidienne de textes sacrés, est (aussi) la clé de voûte de cette quête de savoir.
14 h 30. Dans son bureau d’accueil, le père hôtelier, 38 ans, distribue des chambres aux « retraitants » venus se ressourcer à Solesmes. En échange d’une participation aux frais (« à votre bon coeur »), ceux-ci partagent la vie de l’abbaye. Mais les cellules et le chœur de l’église restent réservés aux moines. L’hôtelier a connu Solesmes à 11 ans. Il y venait avec une chorale paroissiale du Doubs et fut fasciné par la vie monacale et le chant grégorien. « Je me disais : c’est beau ! » Ce grand gaillard souriant a revêtu l’habit de moine à 18 ans, faisant le choix d’une vie de célibat, de retrait.
16 h. Ce jeudi, certains rattrapent leur retard de lecture. D’autres vont se dégourdir les jambes. Les novices, accompagnés de leur maître, quittent un temps la clôture. Moment de détente hebdomadaire apprécié. Mais c’est déjà l’heure des vêpres, à 17 h 30. « Toute notre vie est rythmée par la louange de Dieu », résume le père Thierry, maître des novices, originaire de Vendée.
18 h 30. Le père Bertrand, longiligne moine de 49 ans, règne sur une bibliothèque de neuf niveaux, qui renferme 300 000 livres : « L’une des plus importantes de France. » La collection d’ouvrages liturgiques, en particulier des XVIIe et XVIIIe siècles, « est unique ». Radieux, il révèle : « On ne peut être moine si on n’est pas heureux. Le moine d’aujourd’hui ressemble à son frère d’il y a mille ans. »
20 h 30. Après le dîner, la nuit tombe déjà. Les moines prient encore lors des Complies. Commence alors le temps du silence absolu dans les cellules, jusqu’à l’extinction des feux, au plus tard à 22 h. ■
À propos de l’ensemble des Abbayes de France, on pourra consulter avec profit la très commode et très utile « fiche technique » de renseignements pratiques sur toutes les abbayes de notre pays. (Cliquez sur le lien).
Première publication le 12.10.2010 – Actualisé le 12.10.2021
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