On ré-edite le François Huguenin de 2006, Le conservatisme impossible :
395 pages, 21,40 euros (2006)
Fort bien. Voilà qui aurait du faire, tout simplement, l’objet d’un signalement, sur ce Blog comme ailleurs, afin de porter le fait à la connaissance de ceux qui ne l’auraient pas su.
D’autant plus que, dans La Nef (n° 169) Christophe Geffroy en a fait l’honnête recension suivante :
« Sur le plan politique, la Révolution française a suscité deux principaux courants de pensée qui se sont opposés à l’idéologie du Progrès qu’elle ne cesse de véhiculer depuis deux siècles : le courant réactionnaire et le courant libéral, deux mouvances qui, en France, ne se sont jamais rencontrées. L’originalité et l’intérêt profond de cet essai brillant de François Huguenin est de nous proposer un vaste panorama de ces deux courants de pensée sur plus de deux siècles et, surtout, d’établir un « dialogue » entre eux, c’est-à-dire en fait d’examiner s’il est possible de retenir chez l’un et l’autre le meilleur pour aboutir à une synthèse politique concrètement utilisable pour l’avenir.
Du côté réactionnaire, trois principaux auteurs sont longuement analysés par Huguenin : Bonald, de Maistre et Maurras, auxquels il faut ajouter l’Anglais Burke qui est en réalité inclassable dans ces catégories bien françaises. À bien des égards, ces trois auteurs s’inscrivent dans une tradition « classique » : cependant Huguenin a raison de souligner avec Pierre Manent qu’en rejetant « l’idée même de principes politiques universels, valant pour l’homme en tant qu’homme » (p. 236), ils rompent radicalement avec cette tradition classique héritée de la Grèce antique. C’est un paradoxe de ces contre-révolutionnaires qui sont aussi des modernes.
Le courant libéral est numériquement plus important : le lecteur découvre ainsi des auteurs aujourd’hui peu lus comme Constant et Guizot, mais il est surtout dominé par le fort génie de Tocqueville, dont Huguenin donne un aperçu passionnant. Au XXe siècle, ce courant est représenté par Jouvenel et Aron.
La partie la plus originale du livre est celle où Huguenin pose « les conditions d’un dialogue » (cinquième partie). Il y développe les analyses de son maître, Pierre Boutang, lui-même disciple de Maurras à l’égard duquel il a su garder la distance nécessaire pour élaborer sa propre pensée politique. Il reprend les apports de Maurras sur le Bien commun, en décantant sa pensée de ses excès (antisémitisme, nationalisme,…), et y intègre un grand absent : la nécessité du consentement populaire. Puis, dans cette synthèse, il reprend chez les libéraux une certaine vision de la liberté, expurgée de toute absolutisation. Il corrige également leur approche du consentement qui fait de la démocratie une fin en soi, indépendamment de toute question du Bien ; c’est alors la majorité limitée par rien qui crée la norme morale, instituant le règne mortifère du relativisme. Le résultat rejoint finalement pour l’essentiel… l’enseignement de l’Église sur la Cité !
Tout cela pour en arriver là, pourrait-on être tenté de dire. En réalité, non seulement le détour n’est pas inutile, mais il donne l’occasion à François Huguenin de consacrer quelques pages parmi les plus lumineuses du livre sur la façon dont l’Église est arrivée, entre le XIXe et le XXe siècle, à sa synthèse sur la liberté, à la fois en innovant tout en ne se contredisant point (pp. 360-373). « Affirmer le droit à la liberté politique (la liberté religieuse en constituant un des aspects), tout en ne relativisant pas la notion de vérité, telle est la ligne de crête de la position politique de l’Église catholique »
Voilà, on aurait pu en rester là, signaler la ré-edition, la chronique de Geffroy, et passer à autre chose…. (à suivre)
Henri sur Journal de l’année 14 de Jacques…
“D’abord nous remercions chaleureusement le Prince Jean de ses vœux pour notre pays et de répondre…”