Un juge d’instruction instruit à charge et à décharge. A Jules Michelet, à qui l’on peut faire un Himalaya de reproches, il faudra savoir gré d’avoir écrit sur Jeanne ces mots superbes : « Souvenons-nous toujours, Français, que la Patrie est née cbez nous du coeur d’une femme, de sa tendresse et de ses larmes, du sang qu’elle a donné pour nous ».
A l’aube de cette année Jeanne d’Arc, viennent de sortir un film, Jeanne captive, et un livre de Max Gallo, Jeanne d’Arc, jeune fille de France brûlée vive (XO Editions, 368 pages, 19,90 euros).
Voici trois extraits particulièrement significatifs des propos qu’il a tenus à Diane Gautret, qui l’a interrogé sur son ouvrage….
1. A la question de savoir comment notre époque perçoit Jeanne d’Arc, il répond :
« A droite, elle est récupérée par le Front national. A gauche, la tendance de fond est de dire que la France s’identifie à la République. C’est un peu contre ces deux écueils que j’ai écrit ce livre.
Je me situe en disciple de Michelet. Ma tâche est de rappeler que la France commence bien avant la Révolution, et doit énormément à la monarchie et au catholicisme. De même, je crois qu’il est stupide de nier à la fois la piété de Jeanne et le soutien populaire qu’elle apporta aux ambitions dynastiques de Charles VII. »
2. Autre question, Quelle est la modernité de Jeanne d’Arc ? :
« Le souvenir de Jeanne d’Arc n’a jamais été effacé de la mémoire. Il continuera à briller tant qu’on se demandera si la France a un sens (questions sur son identité et sa souveraineté). Aujourd’hui, nous traversons une crise nationale de longue durée, commencée aux lendemains de la Première Guerre mondiale. Il est naturel qu’on cherche sans le savoir l’image de quelqu’un qui croit en la France, et n’admette pas sa disparition. Face à un pays divisé, à une France au fond de l’abîme, que fit Jeanne ? Elle se tourna vers la Tradition, avec le sacre de Reims. En même temps, elle paria sur l’avenir, sur la modernité de la France de l’époque. »
3. Enfin, sur la question de savoir quel fut le rôle de Charles VII, Gallo a ces paroles :
« Majeur ! Charles VII a commencé par la reconnaître, par l’armer, par suivre ses conseils. Lui aussi était fasciné. Mais, dès le sacre de Reims, il est redevenu un politique, cherchant à négocier, en divisant l’alliance anglo-bourguignonne. De ce point de vue là, Jeanne d’Arc n’avait plus de place, il l’a laissée suivre son cours solitaire. En 1431, tout le monde avait intérêt à ce qu’elle disparaisse de la scène : c’est sinistre mais c’est ainsi. Ensuite, il a tout de même mis en oeuvre le procès en réhabilitation pour laver la tâche du premier procès »
Je suis bien d’accord pour affirmer que Jeanne d’Arc est le modèle même de notre identité nationale.
Il faut lire aussi « Le Roman de Jeanne d’Arc »,beau livre qu’a écrit le critique littéraire juif américain,-qui choisit la France,dans les dernières années du XIXe siècle pour y passer une année sabbatique-et,fasciné par la sainte,composa ce remarquable ouvrage.Il le ramena à son employeur,le New-York Times,alors qu’il devait lui rapporter une étude sur les critiques littéraires britanniques !
Pardon,j’ai omis de citer le nom -fort connu d’ailleurs- de Mark Twain.