L’islamiste qui poignarde des policiers pour « punir » l’interdiction de la burqa.
Le Monde.fr, 14.06.2012 / Par Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, correspondant)
Brahim Bahrir, un Français de 34 ans qui a poignardé deux policiers à Bruxelles, vendredi 8 juin, comparaissait mercredi devant un tribunal chargé d’examiner son maintien en détention.
Présenté comme un islamiste radical, désireux de « punir » un pays qui interdit le port de la burqa, l’intéressé affirme vouloir assumer la responsabilité de son acte et ne réclamait pas sa remise en liberté. Sa détention préventive a été prolongée d’un mois.
Licencié par la SNCF et séparé de son épouse, l’homme, inconnu des services de police, se serait tourné récemment vers la spiritualité et entendait commettre un acte désespéré et se faire tuer, a affirmé son avocat. Armé d’un couteau, l’individu a blessé deux policiers, dont une jeune femme, grièvement atteinte.
M. Bahrir est arrivé dans la capitale belge à Bruxelles le jour même de son acte, commis dans une station de métro de Molenbeek, dans la banlieue de la ville. Des incidents avaient éclaté quelques jours plus tôt dans cette municipalité après l’interpellation d’une jeune belgo-camerounaise convertie à l’islam. Des policiers ont tenté de la verbaliser pour port du niqab dans un espace public.
Elle s’est rebellée et a frappé deux fonctionnaires au commissariat. Des membres d’un mouvement extrémiste, Sharia4Belgium, ont exploité cet incident et provoqué des heurts qui ont duré deux jours.
Fouad Belkacem, le porte-parole du groupuscule, a été interpellé une semaine plus tard à Anvers. Cet activiste avait posté sur YouTube une vidéo appelant à »briser tous ceux qui lèveront la main sur une femme musulmane ».
M. Belkacem a déjà été condamné pour incitation à la haine. Il a, cette fois, été mis en examen pour incitation à la haine et à la violence contre un groupe de personnes en fonction de leurs croyances. Un porte-parole du parquet d’Anvers l’a décrit comme « un partisan auto-proclamé du djihadisme salafiste ».
LES LACUNES DE L’INTÉGRATION DES COMMUNAUTÉS ÉTRANGÈRES
Condamné à une autre reprise, en avril 2011, pour avoir blessé des représentants des forces de l’ordre, le porte-parole de Sharia4Belgium bénéficiait du fait que les peines de prison inférieures à 1 an ne sont plus effectuées, faute de places disponibles dans les prisons belges.
La ministre de la justice, Annemie Turtelboom, a rapidement indiqué que, compte tenu de cette condamnation, l’homme resterait cette fois derrière les barreaux durant six mois au moins. Mardi, les avocats de M. Belkacem ont estimé que la ministre avait commis une faute pouvant entraîner la libération de leur client.
Ils ont également invoqué d’autres erreurs de procédure et affirmé que l’ordonnance de maintien en détention avait été rédigée par le juge avant même l’ouverture des débats. La chambre du conseil d’Anvers a finalement prolongé d’un mois le mandat d’arrêt délivré à l’encontre de M. Belkacem.
Le gouvernement belge compte désormais interdire Sharia4Belgium et déchoir le porte-parole de Sharia4Belgium de sa nationalité avant de le renvoyer au Maroc, où il a été condamné pour trafic de stupéfiants.
L’affaire survient dans un contexte où la droite flamande entend élargir les conditions pour retirer plus facilement la nationalité tandis que, du côté francophone, le débat fait rage sur les lacunes de l’intégration des communautés étrangères.
Le ministre libéral Didier Reynders a dénoncé récemment un « échec » à Molenbeek où une manifestation doit avoir lieu dimanche 17 afin de dénoncer « les amalgames » dont des habitants se disent les victimes. Un parti populiste annonce parallèlement un défilé contre « le fascisme islamiste ».
Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, correspondant)
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