Du « Capitaine de pédalo » à « Flanby », en passant par le « Hollande président, on rêve !.. » de Fabius, et d’autres encore… les surnoms peu flatteurs n’ont pas manqué à « François »…
« Monsieur Tiers » sera, de toutes façons, plus « politique », et plus vrai : car, comme le rappelle Alexis Brézet (dans Le Figaro magazine du 22 juin) « 52% des sièges, c’est beaucoup; mais quand se lève la tempête, 16,5 des inscrits (29% des suffrages exprimés pour le PS au premier tour) c’est fort peu…
Encore Alexis Brézet ne parle-t-il pas des 9 à 10% de non-inscrits sur les listes électorales, c’est-à-dire, tout de même entre 4 millions et 4 millions et demi de Français…
Parfaitement légales, les élections telles qu’elles se déroulent depuis longtemps maintenant confient le pouvoir à des gens qui représentent vraiment trop peu de citoyens : la « légitimité » de cette légalité décroît d’autant…
Et voilà comment notre Président – par-delà les basses jalousies polémiques, et pour s’en tenir à du « politique »… – est « Monsieur Tiers »…
Non. La légitimité du pouvoir politique – par opposition à sa simple légalité – ne provient ni du nombre des votants, ni du nombre de votes favorables. Lorsque ceux-ci sont faibles, le pouvoir légal sorti des urnes aura simplement plus de difficultés à gouverner, il sera plus faible ; s’ils sont élevés, il aura plus de facilité mais il n’y gagnera pas ce que nous nommons légitimité, qui est d’un autre ordre.
Sarkozy, bien élu en 2007, du point de vue du nombre, a perdu le peu de « légitimité » dont la présidentielle l’avait très provisoirement revêtu, en moins de temps qu’il ne faut à la terre pour tourner autour du soleil.
Ainsi, Hollande, élu, non par adhésion mais par rejet et avec un nombre de votants, et un écart, en voix, plus faibles que Nicolas Sarkozy, en 2007, n’est pas moins légal et ne dispose pas davantage d’une « légitimité ». Les « politologues » emploient pour caractériser sa popularité actuelle, l’image du toboggan : pour l’instant il siège au sommet du toboggan mais lorsqu’elle s’amorcera, la chute sera rapide … Vertigineuse ? Nous verrons bien.
Or, la légitimité se caractérise, entre autres choses, par la capacité à durer longtemps, parce qu’elle est ressentie, reconnue comme telle sans besoin d’un quelconque vote.
En effet, paradoxalement, contrairement à ce qui est communément admis, une légitimité qui dure, ce qui est presque un pléonasme, une légitimité qui passe une ou plusieurs décennies, une ou plusieurs générations, un ou plusieurs siècles, n’est jamais sortie d’un vote.
Ainsi, Louis XVIII, dans son exil de près de vingt-cinq ans, puis à son retour, datait ses ordonnances de la Xème ou de la XXème année de son règne… , comme si ni la Révolution ni l’Empire n’avaient jamais existé. Il disposait d’une légitimité ressentie comme telle depuis plusieurs siècles, dont il pensait qu’elle surplombait ces tristes évènements.
Ainsi De Gaulle, dans son discours du 29 janvier 1960, pouvait parler, je cite : « au nom de la légitimité nationale que j’incarne depuis vingt ans », sans que cette légitimité ait alors jamais été établie, en ce qui le concernait, par le moindre vote populaire, et tout à fait comme si la IVème république n’avait pas eu d’existence. Il disposait d’une légitimité fondée sur la mythologie de la seconde guerre mondiale et de sa légende de sauveur de la Patrie, tel qu’il en avait lui-même forgé l’imagerie.
De même, Pétain avait-il disposé, dans le sentiment populaire, d’une légitimité qui ne résultait nullement du vote de l’Assemblée Nationale, réunie à Vichy, pour lui remettre les pleins pouvoirs, mais parce qu’il était, aux yeux des Français, le vainqueur de Verdun. Pour fonder une légitimité quelconque, il est, d’ailleurs à noter que la victoire des armes est un élément, à tous les sens du terme, primordial.
La légitimité historique ne résulte donc jamais d’un vote populaire. Et lorsqu’elle existe, que l’Histoire l’a établie, plus ou moins solidement, plus ou moins durablement, c’est pourtant l’autorité, l’institution qui la détient ou qui l’incarne, qui recueillera le plus large, le plus stable, le plus fervent assentiment populaire.
Ce type de légitimité sortie de l’Histoire a de quoi en rendre jaloux, les dirigeants les mieux élus qui ne sont, en comparaison, que des bouchons de liège sur les remous, les humeurs, et les rejets perpétuellement alternés de l’opinion toujours changeante, toujours versatile, toujours ingrate…
La complexification des conflits de « légitimité » a pour conséquence que ceux-ci ne tranchent plus « hiérarchiquement »,comme à l’époque où une légitimité en primait tout naturellement une autre. Confrontée à cette crise, les hommes politiques s’en
remettent aux résultats des sondages, qu’ils consultent obsessionnellement comme les patriciens romains consultaient autrefois les haruspices. Mais les instituts de sondages, qui se trompent souvent, sont avant tout formés à réaliser des études de
marché. Evaluant les intentions de vote à partir de « panels représentatifs » d’électeurs disposant d’un certain pouvoir d’achat, ils n’obtiennent jamais de réponses qu’aux questions qu’ils posent, ce qui leur permet d’ignorer celles que les électeurs se posent. La démocratie politique se transforme en démocratie d’opinion,
et l’action politique en « pure gestion des contraintes économiques et des demandes sociales » (Alain Finkielkraut). Cette opinion publique n’a évidemment plus rien à voir avec la volonté générale.
En complet accord avec Jaco. Prenons l’exemple de la reine
Elisabeth II, et de ses 60 ans de règne; en dépit de toutes les
crises qu’a pu connaître la monarchie britannique, sa
légitimité est non seulement intacte, mais même renforcée.
Il est clair que l’engagement permanent au service de la
nation est un élément moteur de reconnaissance de
légitimité. Or, cet engagement permanent ne peut s’inscrire
que dans le temps long, celui de l’histoire de la nation.
C’est ainsi, que les Princes entretiennent leur légitimité, qui
n’est pas seulement la référence au prestige d’un nom
illustre, l’accomplissement d’un sacrement religieux, ou le
seul fait d’un héritage historique, même si tout cela
en fait également partie.
C’est ce que l’on attend des Rois et Princes, un sacerdoce qui
ne doit rien à l’élection et se veut spontané et volontaire.