Nous ne sommes évidemment pas les seuls à l’avoir dit, mais il est des occasions où il faut savoir répéter des évidences…
Ce fut une erreur que de réintégrer le commandement unifié de l’Otan – qui n’a plus de raison d’être, depuis la chute de l’Empire marxiste-léniniste et la fin du Pacte de Varsovie; et qui n’est plus que le cache-sexe de la volonté de main-mise des États-Unis sur tout ce qui bouge, en dehors de chez eux…
Et, si on la réintégrait, au moins un autre ministre des Affaires étrangères plus compétent (genre un Védrine…) aurait-il peut-être pu mieux négocier cette réintégration.
On nous avait doctement expliqué que nous partions, au loin, combattre « la » base du terrorisme, pour ne pas l’avoir « ici ». Et, coucou, qui voilà ? : un rebelle d’ANSAR DINE, à Tombouctou, à deux pays de chez nous…
Puis c’en fut une autre que de se lancer, en suiveurs des États-Unis (tiens donc…), dans cette guerre d’Afghanistan, qui ne nous concerne pas directement, en essayant de nous faire croire qu’on y combattait « la » base du terrorisme mondial, alors que celui-ci est disséminé partout dans le monde : qui donc a lancé cette idée baroque d’une terrorisme partant et pensant depuis l’Afghanistan ?
C’en fut encore une autre que de se mêler de cette affaire de Libye, dont on voit mal quels avantages concrets la France en a tiré. Mais dont on commence, par contre, à bien voir quels dangers – bien concrets, eux – elle signifie maintenant pour nous, dans ses retombées inattendues. On peut dire un grand merci – ironiquement s’entend… – à Bernard-Henry Lévy, et à ceux qui l’ont écouté et suivi en haut lieu…
Jean-Claude Besida – une sorte d’anti BHL en ce qui concerne l’observation sérieuse et réaliste des faits, et des faits seuls… – fait remarquer combien la destruction des mausolées de Tombouctou est le fait « de groupes…(qui) partagent bien la même iéologie salafiste » (et d’ailleurs – mais est-ce si curieux ? – la destruction de ces mausolées de Tombouctou fait furieusement et irrésistiblement penser à celle des Bouddha de Bâmiyân, en 2001, par les Taliban…).
Besida fait aussi remarquer que, maintenant, « ce foyer du nord du Mali attire. On y signale entre autres des Pakistanais, des Qataris, et des Nigérians de Boko-Haram. Le corollaire de cette montée en puissance des salafistes est la marginalisation de leurs partenaires-adversaires, les rebelles indépendantistes touaregs, qu’ils ont chassé de Gao fin juin après les avoir expulsés en mars de Tombouctou. Au-delà du cas du nord du Mali, c’est toute l’Afrique sahélienne – de la Mauritanie jusqu’à la Somalie – qui est fragilisée. Et c’est un vrai problème… »
On ne saurait mieux dire : c’est un vrai problème.
Nous sommes enlisés au loin, très loin, en Afghanistan, alors qu’un nouveau front se confirme aus sud, pas très loin : le cas-type que n’importe quel stratège amateur/débutant chercherait à éviter !….
C’était bien la peine de jouer les carpettes vis-à-vis des USA, de nous montrer dociles vassaux et d’envoyer nos soldats se faire tuer dans le lointain Afghanistan, si ce devait être pour que l’Afghanistan se déplace et se rapproche si près de nous maintenant. Ceci étant une des conséquences directes de l’écroulement du régime de Khadafi, auquel son éminence insensée BHL a, en quelque sorte, présidé : le reflux vers le Sahel d’armes et de combattants pro-Khadafi de Libye était prévisisble, en cas de chute du dictateur. Prévisible, mais pas prévu… par BHL !
Alors, maintenant, deux interrogations réellement inquiétantes doivent retenir notre attention :
1. Que va faire l’Algérie ? On sait que – que cela plaise ou non – ce qui touche et concerne l’Algérie affecte la France, et vice-versa…
2. Que vont faire, en France, les musulmans « français » ou « résidant en France » ? Si tous ne sont évidemment pas de dangereux terroristes salafistes en puissance, ils sont pourtant nombreux – n’en déplaise à ceux qui ne veulent avoir qu’une vison irénique des choses – ceux qui constituent un vivier où les mots d’ordre les plus extrêmistes sont assurés de trouver un écho. Surtout parmi les plus jeunes, qui sont les moins intégrés et, souvent, les plus excités….
Non vraiment, comme le dit la chanson, « c’était pas la peine, c’était pas la peine, assurément… » de partir combattre un terrorisme aussi loin, en Afghanistan, si, dans le même temps, une politique insensée en Libye devait contribuer à nous créer un autre Afghanistan, bien plus réel et bien plus dangereux pour nous, parce que bien plus près, cette fois….
Pourquoi isoler le cas du nord Mali ? C’est la totalité de notre politique arabe qui a été dissoute. Normal 1er n’est pas responsable. Mais l’héritage de 5 années de catastrophe diplomatique du prédécesseur. Qu’on en juge par les évènements de cette semaine. En cabotant le long de la côte, autant de pays où nous étions historiquement présents : en Tunisie Marzuki tente de donner le change, devant une situation qui lui échappe, et où la maigre émancipation des femmes est compromise; en Libye la béachélisation des esprits (l’expression est de Chevènement) demande de s’extasier devant les élections qui viennent d’avoir lieu, et les media couchés suivent ce grand connaisseur du monde arabe, très loin de commentaires inquiets (voir ce lien algérien, http://www.liberte-algerie.com/international/une-transition-a-equations-complexes-en-libye-le-cnt-cede-le-pouvoir-au-congres-general-183446), et hier soir débat intéressant France 24 sur l’Egypte, avec Robert Solé et Jean Maher (copte), qui ont décrit une situation explosive et une prise en main de tous les pouvoirs par le seul parti de Morsi. Pour la Libye un lien bien documenté sur l’attitude du trio Sarkozy-Juppé-BH pour obtenir la résolution 1973 (http://globe.blogs.nouvelobs.com/archive/2011/03/23/libye-histoire-secrete-de-la-resolution-1973.html). Tambouille, coups de menton et petits muscles. Jean François-Poncet vient de nous quitter, on se prend à rêver …
Bernard Lugan et quelques autres authentiques africanistes et orientalistes écrivent ce qu’il faut savoir. Loin de l’exécrable caquetage de la faisanderie UMPS …
Le titre du dernier article de Robert Fisk pour son journal The Independent « En conclusion tout ce que cherchent Israel et ses alliés occidentaux, est de casser l’Iran, par la Syrie » (Robert Fisk: In the end, all Israel and her Western allies want to do is to break Iran – via Syria)
Fisk est certainement l’un des meilleurs connaisseurs du Levant; journaliste de terrain, de l’Afghanistan à l’Egypte, depuis 30 ans. Détesté par les Etats Unis et les Israéliens, car il décode assez vite ce qu’il faut comprendre des évènements de l’Orient compliqué.
Jean-Louis FAURE a raison de rappeler que l’actuelle Présidence n’est pour rien dans l’absurde politique étrangère analysée ici, par le blog et par lui-même.
A contrario, il semble que – soit par répulsion à agir, soit réflexion politique – HOLLANDE et FABIUS ne sont pas sensibles au chant de la sirène BHL et ne sont pas prêts à lancer la France dans une aventure syrienne. Tant mieux.
SARKOZY et FILLON le leur ont publiquement reproché. Persévérance dans l’erreur et médiocres calculs politiciens en sont la cause. Minable !