(Pour ceux qui ne connaissent pas la maison du Chemin de Paradis, voici un album de 95 photos, Une visite chez Charles Maurras)
« Parlement, Mistral et Durance sont les trois fléaux de la Provence » : tous les Provençaux connaissent bien le dicton, et le redoutent, ce satané mistral, ce « vent furieux » contre lequel nul ne peut rien, et dont Maurras lui-même écrit (dans « Les collines battues du vent », dédié « A Jacques Bainville ») : « … à voix basse, comme un Ancien, je prie le vent furieux d’épargner, ce soir, ma colline… »
Ce vent furieux, ce mistral, qui est pourtant, toujours pour Maurras, « la sixième beauté de Martigues… » s’était malheureusement invité depuis la veille, du Rhône jusqu’au Var. Il n’aura, malgré tout, pas gâché la fête, même si on ne l’avait pas invité, et qu’on s’en serait bien passé…
Voici donc, avant la vidéo et nos commentaires sur l’hommage à Maurras, et les réactions qu’il a suscitées, un rapide mais fidèle compte-rendu de la journée, soigneusement imaginée dans ses moindres détails depuis longtemps déjà : c’est pour cela qu’elle a été si réussie.
(Illustration : Le « Coup de Mistral », santon créé en 1952 par Paul Fouque).
Dès le début, il avait été prévu que la journée se déroulerait en deux lieux, et en cinq parties : la première partie à Roquevaire, sur la tombe familiale des Maurras; les quatre autres à Martigues.
1. A Roquevaire : Tandis que Nicole Maurras était déjà à Martigues, pour accueillir les participants, Dominique Paoli réunissait autour d’elle, dès 9 heures, celles et ceux qui avaient souhaité, et pu, se rendre à Roquevaire, devant le caveau de la famille Maurras.
Elle était entourée, entre autres (on comprendra que nous ne pourrons citer tout le monde, et on nous en excusera…) d’Hilaire de Crémiers, directeur de Politique magazine et Délégué général de la Restauration nationale, accompagné de son épouse; de Jean Gugliotta, président de la Fédération Royaliste provençale, d’Yves-Henri Allard, de Joël Broquet…
Il n’y a pas si longtemps, Pierre Navarranne, lors de son passage de témoin à Philippe Lallement, à Toulon, rappelait combien de fois nous nous étions retrouvés, en ce lieu symbolique, n’omettant jamais de réciter le Je vous salue Marie, dont Maurras avait écrit la transcription en provençal :
Te saludo Mario, plèno de gràci,
Lou Sègne Mestre es emé tu.
Benesido siés entre touti li fèmo,
E benesi lou fru dou ventre tiéu, Jésus.
Santo Mario,
Maïre de Diéu,
Prègo per nàutri, li pecadou,
Aro, e dins l’ouro de la mor nostro.
Ansin siègue.
2. A Martigues (I), la Messe : La Messe était prévue à 11h15. Pour honorer sa promesse d’être à Martigues ce 1er septembre, d’y célébrer et d’y prononcer l’homélie – ce qu’il fit – l’Abbé Guillaume de Tanouärn, en Pologne la veille, dut prendre trois avions ! Pas plus que l’homme n’est maître du mistral, il n’est maître des contraintes horaires et des retards…
On attendit donc le célébrant, occasion de se retrouver entre vieux amis et d’accueillir de nouveaux venus, de nouveaux visages : on venait de Paris (Georges Rousseau et son épouse…), de Nice (Gérard de Gubernatis…), de Perpignan, du Languedoc (Henri Bec et son épouse, Pierre Daudé…), d’Aix, de Ventabren, de Marseille… et bien sûr, de Martigues : avec la présence des Anciens (des « Avi », comme les chantait Mistral), on côtoyait ceux qui avaient connu Maurras, pour qui il n’était que « Charles », tout simplement; et ces anciens retrouvaient trois frères, les petits-fils de leur ami et parent Émile, qui fut l’un des neuf fondateurs de la section d’Action française de Martigues : Tradition, transmission…
Enfin l’abbé de Tanouärn arriva, célébra et prononça son homélie : il y évoqua, entre autres, la grande et belle figure de l’abbé Penon – qui devait devenir évêque – et qui tendit la main au tout jeune Charles, atteint d’une très sévère déficience auditive (voir le bel ouvrage d’Axel Tisserand : Dieu et le roi : Correspondance entre Charles Maurras et l’abbé Penon (1883-1928) – Privat).
2. A Martigues (II), le repas de « midi » : « De midi », mais presque à l’heure espagnole !
Heureusement, Martigues n’est pas si grande, et le restaurant est à un jet de pierre de « la cathédrale » (c’est ainsi que les martégaux appellent, volontiers, l’église de l’Île, ou de la Madeleine) : une trentaine de mètres, tout au plus, sur ce magnifique « miroir aux oiseaux », quai Brescon, qui est le quai natal de Charles Maurras. Celui-ci est né dans une maison très étroite, située exactement à l’autre extrémité (ouest) de ce quai, dont vous voyez ici l’extrémité est, et qui s’étire en forme de parenthèse, regardant vers le sud…
La centaine de convives ne put ni manger en terrasse, évidemment (sauf quelques amis arrivés un peu après, comme Danièle et Michel Masson…), ni même prolonger ce bon moment, vu le retard pris par la Messe; il n’empêche : répartis en une douzaine de tables, par groupes de six à douze, dans ce restaurant à plusieurs niveaux à l’intérieur, le temps du déjeuner fut fort chaleureux, et Nicole Maurras, passant de table en table pour s’assurer que tout allait bien, voyait qu’effectivement, « tout allait bien »…
2. A Martigues (III), dans le jardin du Chemin de Paradis : Heureusement, la partie du jardin où était prévue l’évocation forme un espace relativement protégé : la sono a pu ainsi « tenir », malgré le « vent furieux », et les paroles être entendues, et enregistrées.
C’est un Jacques Trémolet de Villers lyrique et chaleureux qui prit la parole en premier : venu en voisin de sa chère Corse, il enchanta l’auditoire en présentant avant tout et surtout, et d’abord, Maurras poète, car Maurras était poète, et il était poète parce qu’il aimait, comme le dit également Thibon dans l’extrait magistral que donne de lui le récent Cahier de l’Herne…
On ne s’étendra pas ici sur les interventions, puisque vous les écouterez dans la vidéo qui vient; et vous pourrez même lire la deuxième d’entre elles, celle de Jean-François Mattéi : lui qui, d’habitude, improvise, s’en est tenu, cette fois-ci, à ses notes; et, comme il nous l’avait promis samedi, il vient de nous envoyer le scripte de sa magistrale réflexion, dans la quelle il rebondissait sur les propos de Jacques Trémolet de Villers et se livrait également à une fine analyse des neuf contes du livre de Maurras Le Chemin de paradis.
A la suite de Jean-François Mattéi, Jean-Baptiste Donnier se montra, une fois de plus, clair et rigoureux, comme il nous y a habitués à chacun des Cafés politiques où il est intervenu.
Enfin, il appartenait à Hilaire de Crémiers de conclure, en revenant lui aussi sur ces neuf contes du Chemin de Paradis, dont on sait qu’il en propose une analyse très fine et très érudite sur son Blog, (analyse que nous relayons dans l’une de nos Pages).
2. A Martigues (IV), à la Villa Khariessa : où règne le souvenir de Maurice Pommé, fervent admirateur et disciple fidèle de Maurras.
Les meilleures choses ont une fin. En l’occurrence, le mot « hélas » est – hélas – le seul qui convienne ! Il a bien fallu finir par se résoudre à quitter ce jardin presqu’enchanté, ces intervenants enchanteurs.
La dernière séquence avait été programmée Villa Khariessa, et permit à tous de se retrouver une dernière fois – pour cette fois… – de partager encore quelques instants d’amitié, de sympathie, de bonheur simple, dû à la réussite de cette journée que l’on venait de vivre.
On était tout au bord de l’Etang de Berre, à un jet de pierre de ces « deux frères » qu’évoque Maurras dans son magnifique poème Où suis-je ? : « ..de la conque de Fos aux Frères de La Mède / Laissez-moi chanter : Je suis vous ! »
C’est d’ailleurs « en poésie », et par ce poème, Où suis-je ?, puisque l’on a tant parlé de Maurras poète, que nous finirons notre récit de cette magnifique journée. On mesurera encore mieux la beauté de ce poème lorsqu’on y verra la force d’âme de l’homme : Maurras écrit ce poème en 1945, après avoir été injustement condamné; il sait qu’il ne reverra plus jamais « son » Martigues, sa maison, son jardin… Mais il écrit :
Ce petit coin me rit de toutes de les lumières
De son magnifique soleil ;
Ô mon Île natale, ô jardin de Ferrières,
Qui fleurira sur mon sommeil,C’est peu de vous crier que mon cœur vous possède,
Mon Martigues plus beau que tout,
De la conque de Fos aux Frères de la Mède,
Laissez-moi chanter : Je suis Vous !Mes cinq arpents de fruits, de fleurs, d’herbes arides,
De pins dorés, de cyprès noirs,
Et ma vieille maison que nul âge ne ride,
Est-il besoin de vous revoir ?Que l’agave, métèque aux écorces barbares,
Dise à sa fleur qui le tuera
D’arborer notre deuil tant qu’une grille avare
De ses barreaux nous couvrira !Mais vous, mes oliviers, vous, mon myrte fidèle,
Vous, mes roses, n’en faites rien ;
Je n’ai jamais quitté nos terres maternelles,
Frères, Sœurs, vous le savez bien !Vous vous le murmurez au secret de vos branches,
Nous sommes nés du même sang,
Et ma sève est la vôtre et nos veines épanchent,
Dans un tumulte éblouissant,La forme ou la couleur que, pareillement belles,
Fomenta le plus beau des dieux ;
Quand, surgeons d’Athéna, de Cypris, de Cybèle,
Il nous nourrit des mêmes feuxDont il brûla mon cœur et qui m’emportent l’âme
Pour la ravir de ciel en ciel,
Partout où retentit sur un verdict infâme
Le grand rire de l’Immortel.
David Gattegno sur Jean-Éric Schoettl : « Le parquet de…
“Que de confusions lexicales ! … Récapitulons un peu, autrement il serait impossible de regarder clairement…”