Merci à DC qui, en guise de réaction aux propos de Daniel Cohen nous a envoyé, dans les « Commentaires » un très intéressant article de Jacques Sapir, La crise, ses causes, ses dilemmes, ses solutions.
« Sans pouvoir faire état des différents tableaux et graphiques venant à l’appui de cette démonstration, faute de place, la note ci-dessous de Jacques SAPIR est claire et significative sur ce qui nous attend. » dit DC, dans son commentaire. Il est bien dommage en effet qu’il n’ait pu nous joindre les »‘tableaux et graphiques », qui, de fait, ne « rentrent » pas dans les « commentaires ». Nous avons pensé que nos lecteurs aimeraient peut-être disposer, néanmoins, de l’article sous une forme plus aisément consultable : le voici donc en PDF, et merci encore à DC…..
Jacques Sapir La crise ses causes ses dilemmes ses solutions.pdf
Ce papier se veut il académique ? Il est particulièrement confus. En se voulant didactique en macro économie, il mêle des situations très différentes.
Il n’identifie pas l’origine des dettes par pays, alors que les causes sont très variables : investissements immobiliers délirants en Espagne, villes nouvelles vides et autres aéroports flambant neufs jamais utilisés (le tout sans corruption?), corruption généralisée en Grèce avec une comptabilité nationale ou fausse ou inexistante, une économie souterraine en Italie qui échappe là aussi à tout contrôle, et la France avec un système d’aides sociales unique en son genre que l’on ne peut plus se payer, mal financé, et un tissu industriel qui fond.
Il insiste beaucoup sur les écarts de compétitivité, mais sans entrer dans le détail et son texte fait peu de place aux pays émergents. Alors que les centres de gravité de l’économie mondiale ont glissé vers la Chine et l’Inde. Quant à l’intérieur de l’Europe même, tout le monde sait que la frontière de moins en moins virtuelle est le différentiel de productivité entre le Nord (il n’y a pas que l’Allemagne !) et le Sud dans lequel nous sommes désormais catalogués.
Il fait partie de l’école d’économistes qui rejettent le ratio dépenses publiques / PIB comme un marqueur, paramètre au contraire important pour beaucoup d’autres.
Au total ce papier est une mauvaise synthèse du niveau d’une feuille syndicale. Sapir est à l’ultra gauche, et fut un des rares à trouver un bien être dans l’économie soviétique. Quand le mur de Berlin est tombé, les Allemands de l’Ouest ont découvert un champ de betteraves à l’Est, et l’état sanitaire de la Russie était au niveau de léproseries africaines, saignée par un complexe militaro-industriel dément.
A mes yeux un économiste très peu crédible.
Très bien Jean Louis FAURE, mais nous aimerions connaître
quels sont les propos tenus dans cet article, par Jacques
SAPIR, que nous ne devrions pas croire, et savoir pourquoi,
selon vous, de sorte que vous puissiez affirmer que Jacques
SAPIR n’est que très peu crédible.
Bien entendu, un certain nombre de pays ont fait des erreurs
de gestion, mais avant même que la crise n’intervienne, ces
différences de compétitivité entre les différentes économies
européennes existaient déjà et étaient difficilement
compatibles avec l’existence d’une monnaie unique plutôt
que commune, sauf à ce que l’Union européenne se soit
donner de vrais moyens de coopération, de solidarité, de
croissance et de protection entre ses membres, et vis à vis
de l’extérieur, au lieu d’une concurrence sauvage « libre et
non faussée ? » du chacun pour soi, dont l’Allemagne a été le
pays principalement bénéficiaire si l’on examine les balances
commerciales de ses « partenaires » européens déficitaires.
Mon commentaire est d’une grande clarté, mais je veux bien recommencer.
Agiter l’épouvantail de la grande dépression est sans rapport avec la situation actuelle, bulle financière totalement artificielle, faite de dettes, donc d’emprunts, dans beaucoup de pays déconnectées de l’économie réelle, en particulier du travail.
Il est extrêmement suspect que l’on disserte à longueur de pages sur le cas de la Grèce, représentant moins de 3% du PIB européen, alors que ce n’est que très récemment que l’on a enfin parlé de l’Espagne. Emblème de toutes les dérives budgétaires que l’on n’aurait jamais pu imaginer. Une montagne d’investissements farfelus, en particulier dans l’immobilier, n’a pu atteindre des sommets qu’avec une chaine de complicités, y compris à Bruxelles. Mais ce pays est d’une toute autre dimension, car autour de 13% du PIB européen ; on change d’échelle. Et sa dette est de 2.400 milliards Eur soit 2 PIB annuel !!!
Les dogmes marxistes de Sapir sont très connus et sa campagne pour déboucler le montage européen aussi. Objectif qui fait saliver les « gaullo-cocos ». A aucun moment, pas plus dans ce papier que dans d’autres (il écrit régulièrement dans Marianne), il n’analyse dans le détail la situation spécifique de chaque pays. Conduire une analyse macro économique en agrégeant des situations très différentes est un très mauvais travail, pas crédible, je le maintiens. Pas plus qu’à l’instar de ses adeptes, il ne chiffre le coût d’un débouclage du système. A titre personnel je n’ai pas d’objection que l’on sorte de l’euro, à condition de nous chiffrer l’opération …
Particularité de la France, sa dette sociale placée sur le marché international via un organisme créé spécifiquement à cet effet, la CADES (pourcentage variable, mais autour de 50 % de la dette selon le mode de comptabilité international adopté, rapport Pébereau). Notre économie ne peut pas alimenter une dérive des dépenses publiques, qui ne seront donc financées que par plus d’emprunts.
Il est devenu une mode d’accuser l’Allemagne de profiter de l’euro. Outre que l’on n’explique rien par ces jérémiades, les performances des Allemands seraient les mêmes si les monnaies nationales avaient été conservées, et Volkswagen aurait dégagé l’équivalent en Deutsche Mark des 15 milliards de résultat (excusez du peu …) annoncés en 2011.
Technique comptable régulièrement serinée : si nous avions gardé notre monnaie, la dette pouvait être effacée par des dévaluations. Exact mais rien d’autre que de la comptabilité ; en oubliant qu’une dévaluation est la dégradation de la valeur du travail.
Votre développement sur le différentiel de compétitivité est une maladie connue depuis très longtemps par les économistes, mais exposée et admise que depuis peu de temps dans le grand public. Le cahier des Echos de Octobre 2011 avait identifié 7 grandes raisons à notre sous performance. En premier lieu, un coût du travail prohibitif. Hurlement de la gauche et de ses réservoirs à penser, avec quelques situations cocasses comme François Chérèque dénonçant pour son compte cette pénalisation dramatique. Sapir sera crédible le jour où il fera de l’économie avec des photographies justes …
En réponse à Jean Louis FAURE, qui expose ses arguments en
partie recevables d’un certain point de vue, je dirais à
titre personnel, dès lors qu’il ne s’agit pas de se faire l’apôtre
de Jacques SAPIR, mais de prendre en compte ses
observations :
– qu’affirmer qu ‘ » A aucun moment, pas plus dans ce papier
que dans d’autres, il n’analyse dans le détail la situation
spécifique de chaque pays « , ceci n’est pas exact, au
contraire, il explique très bien les différences de situation.
LISEZ VOUS VRAIMENT TOUTES SES NOTES ?
Ici même, il y fait allusion
» À cela, on peut ajouter des causes spécifiques dans les
différends pays, comme la faible efficacité de l’administration
fiscale en Grèce, les conséquences des impayés publics en
Espagne, etc… »
et que dire de sa démonstration relative aux cas particuliers
cités, des pays baltes et du Canada.
« L’erreur de perspective est induite par les comparaisons qui sont fréquemment faites. En effet, des politiques d’ajustement budgétaires ont été menées avec succès dans certains pays, comme le Canada ou les pays Baltes. Mais, la volonté d’en extrapoler des recommandations pour les pays européens a produit l’oubli des conditions spécifiques qui ont pu expliquer leur succès à un moment donné. »
Vous parlez du coût du travail mais vous savez aussi que les écarts de compétitivité peuvent avoir pour cause un manque d’investissements, de recherche, de spécialisation ou de créativité, que par ailleurs, les ajustements monétaires ont des conséquences sur la compétitivité (les Chinois en usent et en abusent alors que leur coût du travail faible, devient déjà trop élevé par rapport à d’autres pays émergents). Nous ne pourrons jamais baisser notre coût du travail au niveau de ces pays, car notre niveau de développement y est supérieur; donc c’est une préoccupation, mais ce n’est certainement pas en baissant les salaires que nous parviendrons à des résultats, quant aux charges sociales cela mérite un débat sur l’avenir et le financement de notre modèle social.
Enfin, s’agissant du coût de la fin de l’euro, il y aurait beaucoup à dire, dès lors qu’il ne s’agit pas de mettre fin à l’euro, mais de le maintenir uniquement en tant que monnaie commune de réserve et d’échange avec l’extérieur (hors Union européenne) et de rétablir les monnaies nationales qui seraient alors non convertibles, sauf en euros. La spéculation étant de fait rendue impossible, je ne vois pas en quoi le coût de ce nouveau dispositif pourrait affecter lourdement nos finances. Au contraire, cela redonnerait de l’oxygène à chacun des Etats membres de l’Union plutôt que de leur interdire de dévaluer au sein de la zone.
J’avais oublié un point important à l’adresse de Jean Louis
Faure,
« quand rebattrons nous monnaie ? »
Il me semble qu’historiquement cela va de pair avec la
souveraineté, et que ce n’est plus le cas depuis 1973, alors
que les Etats-Unis fervents défenseurs du libéralisme
économique, battent toujours monnaie, eux, et les Chinois
bien sûr.
A moins que nous soyons « condamnés » à dépendre des seuls
marchés financiers et banques pour financer notre économie ?
Un référendum à ce sujet serait sans doute intéressant.
Qu’en pensez-vous Jean Louis Faure ?
Certains (suivez mon regard) s’en réjouissent, qui voient dans cette crise la preuve que leur hostilité à la construction européenne était parfaitement justifiée. Avec la crise de l’euro, disent-ils, c’est le dogme de l’irréversibilité de la construction européenne qui s’apprête à s’écrouler. Telle n’est pas ma position. Il n’y a en réalité aucune raison de se réjouir de la disparition éventuelle de l’euro, dont le principal bénéficiaire seraient les Etats-Unis, qui craignent depuis longtemps de voir l’hégémonie mondiale du dollar menacée par la naissance d’une nouvelle monnaie de réserve.
Mais il n’y a aucune raison non plus de confondre la construction européenne avec l’actuelle monnaie unique. L’euro et l’Europe ne sont pas synonymes. En témoigne déjà le fait que certains pays de l’Union européenne (Danemark, Suède, Royaume-Uni) ne sont
jamais entrés dans la zone euro.
L’instauration de l’euro aurait été une chose excellente à condition de respecter deux conditions : que le niveau de la monnaie unique ne soit pas indexé sur l’ancien mark, et que sa mise en place s’accompagne d’un système de protection commerciale aux frontières. Or, aucune de ces conditions n’a été remplie. Au lieu d’assurer une protection communautaire, c’est la carte du libre-échangisme intégral que l’on a décidé de jouer. En 1994, on a assisté au démantèlement du tarif extérieur commun qui, jusque là, protégeait en partie l’Europe de la concurrence dans des conditions de dumping social des pays à bas salaire. La surévaluation chronique de l’euro a ensuite accentué les déséquilibres. En même temps, on a artificiellement plaqué une monnaie unique sur des économies divergentes à tous égards. La crise était dès lors inévitable.
Le problème de fond de l’euro découle de cette évidence qu’il ne peut y avoir de monnaie unique associant des pays de niveau structurellement divergent. On ne peut en effet appliquer
la même politique monétaire, c’est-à-dire le même taux de change (qui détermine importations et exportations) et le même taux d’intérêt à des économies de structures et de niveaux différents. Une telle zone se transforme inéluctablement en zone de tranferts, les plus riches devant payer pour les plus pauvres afin de pallier leur faiblesse économique. C’est ce qu’a démontré la crise grecque.
Philippe Séguin l’avait dit dès le 5 mai 1992, à la tribune de l’Assemblée nationale : « Dès lors que, dans un territoire donné, il n’existe qu’une seule monnaie, les écarts de niveau de vie
entre les régions qui le composent deviennent vite insupportables. Et en cas de crise économique, c’est le chômage qui s’impose comme seule variable d’ajustement ». Nous y sommes ,c’est là le vrai problème !
@thulé
Je partage votre analyse sur chaque point mais je me permets de la compléter sur le rôle des Etats Unis dans l’échec que nous connaissons.
Les deux chiffres de base de l’économie sont en comparaison un PIB de 16.300 milliards USD pour l’Europe, et de 15.000 milliards USD pour les USA
La démographie est de 350 millions d’habitants aux USA contre 500 millions environ pour l’Europe.
El le professeur Alain Cotta de conclure qu’il est inexplicable que l’Europe soit restée un nain politique. En réalité les Etats Unis ne laisseront jamais détrôner le dollar, ni construire une Europe politique avec l’aide de leur porte avion britannique. Ils deviennent littéralement fous dès que la moindre tentative est faite. Il est dit dans certains cercles confidentiels que les leaders Saddam Hussein et Gadhafi furent assassinés parce qu’ils avaient émis le projet de ne plus accepter le dollar en paiement des hydrocarbures.
L’embryon de service diplomatique dont l’Europe s’est dotée a été confié à la délicieuse britannique Lady Cathy Ashton. Il fallait la voir sur BBC World en conversation intime avec mme Clinton. Pas pour parler recette de pudding. Ni de la France …
Partageant les propos de Thulé, Jean-Louis Faure partageant
l’analyse de Thulé sur chaque point,
Jean Louis Faure devrait
pouvoir partager également mes propos ? Donc à suivre …