Pour ceux qui connaissent la passionnante histoire de l’Action française, la Revue Universelle, son seul nom, évoque à la fois : le souvenir du héros de la Grande Guerre, Pierre Villard, qui, par un legs, à Charles Maurras, d’un million de francs germinal, avait permis que cette revue fût fondée, en 1920, selon un projet que les dirigeants du mouvement d’Action française avaient formé au lendemain de la guerre; le souvenir de Jacques Bainville qui la dirigea, avec le génie qui était le sien, jusqu’à sa disparition, en 1936, et d’Henri Massis qui en était le rédacteur en chef; enfin le souvenir, le rappel des objectifs même que la Revue Universelle s’était fixés et qui restent, aujourd’hui, parfaitement actuels : « Rassembler tout ce qui, dans le monde, prend parti contre la destruction, fortifier et étendre les relations entre les groupes dévoués à la cause de l’esprit ».
Or, les abonnés d’aujourd’hui à ce qui est devenu, dans ce même esprit, la Nouvelle Revue Universelle, ont reçu, ces jours-ci, la livraison du 3ème trimestre 2012 et ils y auront remarqué les signes d’un nouveau départ, d’une novelle dynamique, dont ils ne manqueront pas de penser qu’il y a là un motif d’intérêt accru, d’attention plus soutenue, pour les futures publications de la revue.
Christian Franchet d’Espèrey en devient le rédacteur en chef, après la disparition de Xavier Walter, et, tout aussitôt, il en redessine le cadre, l’orientation : la « crise – qui n’en finit pas de ne pas finir – n’est plus niée par personne, mais ses causes profondes continuent de l’être. L’éventualité, la vraisemblance, l’imminence d’évènements graves, voire dramatique, sont devant nous, mais, comme les « aveugles » de Bruegel, les Français marchent en se soutenant par l’épaule, espérant, sans y croire, que l’aveugle de tête sait où il va. La vérité c’est que nous vivons une veillée d’armes. »
Mais si nous comprenons bien, aux côtés du rédacteur en chef, la Revue Universelle, a, désormais, un responsable, un inspirateur éditorial qui sera Antoine de Crémiers, que, bien-sûr, les lecteurs de Lafautearousseau connaissent bien et, d’ores et déjà, dans cette dernière livraison de la revue, il fixe un cap : « si l’on veut éviter l’alternative du diable qui nous propose soit l’ordre glacé de la finance internationale et du meilleur des mondes, soit la guerre civile résultant logiquement de la dissolution des sociétés, nous devons lancer un « appel à l’intelligence », en faire le pari, pour une « disputaio », dont la Nouvelle Revue Universelle devrait être un lieu privilégié. » Il s’agira, donc, d’une redynamisation rédactionnelle mais aussi, au sens large, intellectuelle et politique.
Tout est à lire dans cette dernière livraison de la Revue Universelle. Nous ne signalerons que trois articles, sans négliger les autres : celui de Jean-Pierre Péroncel-Hugoz, « Journal d’un royaliste au Maroc », un journaliste qui se souvient d’avoir souvent assisté au Rassemblement des Baux de Provence; celui, toujours excellent, de François Reloujac, « La tyrannie de la concurrence, dans un marché que l’on prétend libre »; enfin, celui, remarquable, tout à fait pertinent, lucide et novateur, d’Alain Bourrit, « Sur la démocratie ». Ce dernier, les lecteurs de Lafautearousseau, les participants à nos Cafés Politiques de Marseille, le connaissent bien aussi et l’apprécient.
Nous n’en dirons pas plus. Simplement, on l’aura compris, nous conseillons de lire la Nouvelle Revue Universelle et de s’y abonner.
C’est un vrai bonheur de voir « La nouvelle Revue Universelle » trouver une jeunesse nouvelle avec une équipe particulièrement compétente. Les ouvertures programmatiques de Christian Franchet d’Espèrey et d’Antoine de Crémiers sont à cet égard très prometteuses.
Je voudrais préciser simplement, en ce qui concerne la présentation ci-dessus, que le legs de Pierre Villard a été effectué pour moitié en faveur de Charles Maurras et pour moitié en faveur de Jacques Maritain. De fait, c’est Maurras et Maritain qui, conjointement et grâce à cet héritage, ont pu fonder « La Revue Universelle » placée sous la direction de Jacques Bainville en versant pour cela chacun 50 000 francs à la Revue. Jacques Maritain y assura la chronique de philosophie de 1920 à 1926 à la demande de Bainville. Sa collaboration ne s’arrêta donc qu’avec la « condamnation » de l’Action française en décembre 1926.