Nous connaissons tous les péripéties de l’affaire Florange. A ce jour, la seule certitude reste que personne ne sait ce qui va vraiment se passer et si la « solution » du gouvernement en est bien une.
Sans sous-estimer l’approche économique, privilégions donc un point de vue politique.
Le mot de « nationalisation » (qui inclut « national ») a constitué un espoir pour les uns, une menace pour les autres. A qui donc nuirait une nationalisation ? Pas aux « petits » ouvriers lorrains mais aux grosses entreprises mondialisées : c’est ainsi qu’il faut interpréter l’intervention de Mme Laurence Parisot jugeant « scandaleuse » toute éventualité de cet ordre. Rien de nouveau, en fait : déjà, il y a quelques mois, la présidente en exercice du MEDEF, c’est-à-dire d’un patronat qu’on aurait pu benoîtement croire « français », avait pris position, contre les intérêts français et pour les intérêts des groupes financiaro-industriels mondialisés, en soutenant (contre M. Claude Guéant) un immigrationnisme forcené (profitable à certaines entreprises, catastrophique pour le pays).
Certes, on (de grands économistes, aux analyses impeccables, comme M. Elie Cohen) nous a bien expliqué que la nationalisation – fût-elle temporaire – du site Arcelor-Mittal de Florange constituerait une sorte d’hérésie. Certes, cela pourrait ne pas être « rentable », en tout cas certainement pas immédiatement. Mais l’avis des économistes, comme celui des militaires en temps de guerre, ne doit pas avoir d’autre valeur que celle de conseil. D’ailleurs, quelle est la rentabilité d’un agent de police ou d’un professeur de géographie ? Des choix, politiques, seront toujours à faire C’est au politique de décider et ses critères ne sauraient se limiter à un seul domaine.
Un Etat ne peut en effet se cantonner à l’exercice de ses quatre fonctions propres – police, justice, armée et monnaie – fonctions dites « régaliennes », c’est-à-dire relevant de l’Etat « royal » (soit rappelé en passant), auxquelles l’Etat de ce pays a en grande partie renoncé, Europe et austérité obligent (inutile de détailler). L’Etat a aussi et conjointement le devoir, donc le droit, de conserver et sauvegarder la réalité nationale concrète : il en découle forcément, n’en déplaise à Mme Laurence Parisot et à M. Lakshmi Mittal, mais aussi à la Commission de Bruxelles et au F.M.I, qu’il exerce (en principe) directement ou indirectement et par tout moyen jugé utile, le contrôle (ce qui ne signifie pas la (re)nationalisation intégrale) de toutes les infrastructures et entreprise stratégiques – c’est-à-dire tout ce qui est susceptible de constituer, en des mains entièrement étrangères, une menace, de quelque ordre qu’elle soit, pour le pays et ses habitants.
On voit que nous sommes loin du compte. Cela aura(it) un prix, pardon un « coût ». Mais, soyons-en sûrs, cela pourrait aussi rapporter (sinon, pourquoi le privé serait-il intéressé par la gestion – souvent prédatrice – de l’eau, des autoroutes, du téléphone, etc. ?). Et, de toute façon, cela doit être car toute féodalité est, par définition, un ennemi mortel pour la nation. Enfin, cela pourrait être le retour du politique.
Certes. Mais il faut prendre en compte que l’Inde s’apprête à nous acheter nos avions Rafale. Ce n’est pas en nationalisant les investisseurs que nous allons les attirer.
Le danger d’une nationalisation, c’est de faire du « soviétique ». ou alors, il faut une gestion de droit privé et non une fonctionnarisation de l’industrie nationalisée.
On peut envisager la gestion des entreprises de deux manières, la gestion par l’état(nationalisation), la gestion par le privé. Aucun de ces modes de gestion n’est parfait. Mais la gestion étatique, on le sait par expérience, conduit à des décisions, politiques par définition, et en pratique dénuées de fondement économique car destinées à satisfaire tel ou tel groupe de pression et permettant la gabegie de fonctionnaires irresponsables aux frais de la nation toute entière. Faut-il rappeler la lamentable faillite du Crédit Lyonnais dirigé par un énarque incompétent et irresponsable mais bien en cour. La nationalisation de Gandrange conduirait au même gaspillage car les hauts fourneaux lorrains n’ont plus d’avenir pour la raison que leur prospérité était basée sur la proximité du minerai lorrain et du charbon lorrain ou allemand qui sont les principales matières premières pour la fabrication de la fonte. Ces deux atouts ont disparu depuis plusieurs années déjà et les coûts de transport obèrent considérablement le prix de revient. Il est malhonnête de laisser croire aux ouvriers lorrains qui subissent ces contraintes en bout de chaîne que l’on peut continuer l’exploitation indéfiniment; il serait plus approprié de les engager dans une reconversion vers d’autres activités, éventuellement dans l’aval de la sidérurgie, en y consacrant les sommes qui seraient immanquablement gaspillées dans le maintien temporaire des hauts fourneaux.
De plus, la nationalisation des moyens de production, c’est la main mise de l’état sur l’économie et c’est faire peser sur les citoyens un pouvoir qui n’a plus et ne tolère plus de contrepartie. On appelle cela la dictature; soixante dix ans de communisme en URSS, les souffrances endurées par le peuple et le fiasco final devraient conduire à un peu de prudence avant de soutenir des nationalisations inutiles.
La gestion privée, à condition qu’elle soit concurrentielle et non oligopolistique, est d’une bien meilleure efficacité car elle oblige à des décisions économiquement raisonnables sous peine de la sanction de la faillite. Ceci étant, elle n’est pas parfaite non plus et il est évident que les multinationales, ainsi qu’il est dit au sujet de l’immigration, ne voient que leur intérêt à court terme. Elle constituent une réelle menace lorsque leur puissance échappe au contrôle des états et qu’elles vont jusqu’à dicter les décisions des pouvoirs publics. C’est le défi auquel nous sommes confrontés dans ce processus de mondialisation qui nous dépasse. Il serait bon d’en prendre conscience et d’y faire face avant que le monde de Globalia décrit par Jean Christophe Ruffin ne nous ait tous asservis.
Le dilemme n’est donc pas dans le choix de l’étatisme ou de la privatisation mais dans les moyens à mettre en oeuvre pour établir un contrôle démocratique de l’état et des entreprises privées, nationales ou multinationales.
Vous rappelez que la sidérirgie était « Lorraine » parce que les minerais, fer et charbon, étaient extraits sur place.
Pourquoi n’a-t-on jamais entendu ce raisonnement biblique de simplicité ?
Aujourd’hui la place de la sidérurgie à partir de minerais importés est en bord de mer : Fos, Dunkerque.
Pourquoi ne pas le dire honnêtement aux ouvriers, qui ne sont pas dénués de bon sens, et les amener à une reconversion dans leur métier, mais en aval.
Question de politique ou manque de courage ? Peut-être hélas, les deux.
L’approche d’Arnaud Montebourg était sans doute la meilleure.
Le gouvernement socialiste actuel, tout comme l’était celui de
Nicolas Sarkozy se couche face aux financiers, à l’ultra
libéralisme, aux diktats de Bruxelles.
Combien de temps encore, le peuple français va-t-il accepter
de brader sa souveraineté à des intérêts étrangers, et
étrangers, à ceux de son avenir et de sa cohésion sociale ?
Quant aux « royalistes » qui défendent ce système, sur ce blog,
on peine à trouver leur cohérence. L’Etat était puissant avec
la monarchie française, il n’apparaît pas que celle-ci ait été
soviétique avant l’heure, tout cela n’a aucun sens. Les
Etats-Unis n’ont-ils pas des secteurs protégés ?
Il serait bien aussi que nos Princes fassent entendre leurs
voix, et si possible, hors des sentiers battus. La
mondialisation telle qu’elle se présente aujourd’hui, n’est pas
compatible avec l’oeuvre des Capétiens.
Bravo pour votre blog!