Voici donc M. Hollande dans le rôle du « chef », grâce à la vertu des institutions de la Ve République. Nous ne nous en plaindrons pas mais, s’il faut bien entendu souhaiter que les résultats de l’opération Serval soient à la hauteur des mots employés (c’est « la guerre », « il faut les détruire »), rien ne doit venir occulter les questions politiques que pose la passe d’armes initiée au Mali.
D’abord, pourquoi la France s’est-elle trouvée si longtemps seule et se trouve-t-elle désormais si peu soutenue de façon concrète par ses « partenaires » privilégiés que sont les Européens ? Réponse : l’Europe n’est pas défaillante, elle est inexistante. Donc continuer de réduire les dépenses militaires, en prenant notamment comme prétexte que nous ne serions plus qu’une composante d’un ensemble européen, comme le font les gouvernements successifs depuis des années, relève au mieux de l’aveuglement. Certes, il serait de bonne politique de contracter de solides alliances militaires avec nos proches voisins. Mais ne faisons pas comme si c’était fait. Alors qu’on célèbre le cinquantenaire du traité de l’Elysée, signé par le général De Gaulle et le chancelier Adenauer le 22 janvier 1963, il serait peut-être temps de poser le problème. D’autant qu’il sera très difficile à résoudre car, pour l’Allemagne (ou la Grande-Bretagne), toute action militaire doit s’inscrire dans une démarche chapeautée par les Etats-Unis d’Amérique, toute action de défense européenne passe par l’OTAN.
Nous devons donc forcément nous interroger sur les Etats-Unis d’Amérique. L’Histoire récente nous enseigne que les Américains ont toujours été hostiles à la présence française en Afrique (comme le montre leur position durant la décolonisation – y compris pour l’Algérie) et qu’ils ont constamment œuvré par tous les moyens et dans tous les domaines (non seulement économique et commercial mais aussi culturel et diplomatique) pour nous évincer de ce continent. Ils sont l’Empire et, en Afrique aussi, ont la prétention de régenter les choses. Dans ces conditions, tout abandon de souveraineté – comme le réalignement récent de la France par le retour dans le commandement intégré de l’OTAN – peut être dangereux pour notre indépendance nationale et constituer de ce fait une faute impardonnable. La ligne à suivre est claire : alliés, oui ; sujets, non. A défaut, il faut renoncer à exister en tant que puissance qui compte.
Enfin, comment ne pas s’interroger sur les incohérences de notre politique arabo-africaine. Certains de ces « djihadistes » que nous combattons au Mali faisaient partie des rebelles libyens auxquels nous avons, de façon irresponsable, parachuté des armes : qui sait si la balle qui a tué le lieutenant Boiteux n’est pas une balle française ? Certes, l’engagement français en Libye était le fait de l’improbable attelage Lévy-Sarkozy. Mais, en ce qui concerne la Syrie, c’est bien M. Hollande qui a pris l’initiative de reconnaître les insurgés – dont la plupart sont des islamistes qui – ce n’est un secret pour personne – sont armés et financés par des états du Golfe – dont notre très cher Qatar. On ne peut pas prétendre lutter contre la nébuleuse islamiste sans désigner ses bailleurs de fonds, par ailleurs très actifs et entreprenants jusque dans nos cités. Il est vain de s’imaginer que le wahhabisme est soluble dans quelque « modernité » que ce soit et il faudra bien en tirer les conséquences.
M. Hollande est pour l’instant à son avantage comme chef des armées. Il faut espérer qu’il saura aussi, malgré ses antécédents idéologiques, être à son avantage comme véritable responsable de la politique étrangère de la France.
Il est grand temps que nous Européens soyons capables de nous défendre .Il est temps de nous éloigner des Etats unis .Nous devons sortir de l’Otan comme de l’Onu ( le machin) comme disait le général de gaule. La plus belle chose c’est une armée Franco Allemande puissante.
Gianni
En total accord avec Louis-Joseph Delanglade.
L’opération au Mali est une gesticulation, pas une guerre sans troupe en face. Réalisons aussi que rien n’a pu être fait sans l’accord de Washington, puisque nous ne mettons plus un avion en l’air sans demander l’autorisation à maman. C’est le fonctionnement du commandement intégré.
Dans son papier ce matin , B. Lugan remet chacun à sa juste place, en relevant que nous sommes devant la lutte ethnique ancestrale entre les populations du Nord et celles du Sud. Et dans cette opposition, s’est glissé l’islam. Mais il n’est nullement LE moteur.
Par ailleurs nous n’avons pas de raison de mettre en doute les informations de J. D. Merchet
http://www.marianne.net/blogsecretdefense/Mali-la-guerre-secrete-contre-AQMI_a924.html
La stratégie des assassinats ciblés est très discutable tout d’abord en ce qu’elle ne résout rien. Et ces actions régulièrement conduites par les Israéliens et les Américains chacun dans leur zone, ne sont en rien un modèle et une référence. J’ajoute que c’est la triste démonstration que nous n’avons plus de Services de Renseignement dignes de ce nom.
Jean, je suis désolé mais si une armée franco-allemande serait pour vous un but a atteindre, il faut admettre la pauvreté, pour ne pas dire la navrance actuelle des militaires allemands.
Réalisons aussi que rien n’a pu être fait sans l’accord de Washington, puisque nous ne mettons plus un avion en l’air sans demander l’autorisation à maman. C’est le fonctionnement du commandement intégré.
La est le problème , l’oncle Sam met son véto et exige d’être obéi . Nous ne pouvons rien faire sans leur autorisation et c’est pas normal .
France + Angletterre c’est 50 % des budgets de défense de 350 millions d’Européens. Les Allemands s’en remettent totalement au parapluie américain pour leur défens (pas uniquement nucléaire), ainsi que la plpupart des pays. Pour construire un axe franco-allemand dans la Défense il faut une confiance qui n’existe plus … et qui n’existera plus avant longtemps. Ne pas rêver.
Précisons toutefois que Bernard LUGAN, que certains d’entre nous connaissent bien depuis plus de quarante ans, et qui est, en effet, un grand spécialiste et un fin connaisseur de l’Afrique, ne nie pas qu’il faut « évidemment, éradiquer le terrorisme ».