M. Obama a donc décidé de surseoir à toute intervention en Syrie. Le voici empêtré dans une de ces contradictions dont un homme politique sort rarement indemne : aller au bout de ses menaces ou s’incliner devant un éventuel veto du Congrès. Sachant que des « frappes aériennes ciblées » n’auraient aucun autre objectif que de marquer le coup, tout en faisant courir un risque de conflagration, on peut se poser quelques questions.
Des esprits peut-être mal intentionnés prétendent que les Etats-Unis d’Amérique ne cessent de (re)tisser leur toile impériale qui inclurait dans une alliance baroque quelques vieux pays d’Europe, les monarchies pétro-sunnites du golfe et l’incontournable Israël. Dès lors, déstabiliser la Syrie s’inscrirait dans une perspective régionale ayant pour objectif l’instauration d’Etats croupions balkanisés et à merci. Quitte à provoquer de temps à autre un bain de sang. Soit. Mais la petite France, là-dedans ?
Avons-nous une stratégie géopolitique qui justifierait l’ouverture des hostilités comme le souhaitent les bellicistes enragés ? Mesure-t-on bien le coût et les conséquences d’une telle opération et, surtout, peut-on nous dire à quoi cela nous servirait, ce que cela nous rapporterait ? Que l’on sache, on n’a pas entendu M. Hollande là-dessus. Le chef de l’Etat n’a jamais posé la seule question qui compte : qu’est-ce que la France peut avoir à gagner ou à perdre dans cette affaire ?
Parlant trop et trop vite, M. Hollande a choisi – faute impardonnable – de se situer sur le terrain moral (« le massacre de Damas ne peut ni ne doit rester impuni »). Outre que morale et politique ne sont pas du même ordre – il faut être Mme Joly (Eva) ou M. Lévy (Bernard-Henri) pour confondre les deux -, qui a autorité pour dire le bien et le mal ? Certainement pas M. Hollande, dont la seule fonction est de servir la France. Encore moins M. Obama, chef de la seule puissance qui a osé utiliser l’arme nucléaire contre le Japon après avoir traité quelques villes allemandes au phosphore. Comme toujours, les justiciers autoproclamés cherchent simplement, au nom d’un prétendu droit international, à faire prévaloir leur loi du plus fort et les va-t-en-guerre de tout poil sont les complices objectifs des massacres programmés (en l’occurrence, ceux auxquels sont promises les diverses « minorités » syriennes en cas de chute de M. Assad).
Exit la morale, donc. Seule peut et doit compter une approche politique. Mais, maintenant qu’ils ont sorti leurs griffes, les « Occidentaux » auraient bonne mine de ne rien faire. Il aurait mieux valu alors ne rien dire. Voyez ce pauvre M. Cameron ! Pour un peu, on souhaiterait une intervention, synonyme de fermeté. Pas vraiment, quand même En somme, M. Hollande a le choix entre agir c’est-à-dire s’aventurer (à la remorque des Etats-uniens) pour un résultat soit vraisemblablement nul soit apocalyptique et ne pas agir c’est-à-dire déconsidérer au-delà de sa petite personne l’Etat et le pays. Etre au mieux ou au pis (c’est selon) le porteur d’eau de M. Obama : cette fois, il a tout faux.
Le plus à craindre est que le pouvoir parisien se retrouve seul en lices et veuille malgré tout marquer le coup pour ne pas perdre la face. Les déclarations très imprudentes (pour ne pas dire imbéciles) de Laurent Fabius – qui alla jusqu’à souhaiter publiquement la mort du tyran – et les assurances de tous ordres données gratuitement par l’Elysée au club des opposants syriens à Paris peuvent pousser Hollande à « faire quelque chose ». Pour une fois, sa procrastination génétique serait utile.
La transposition sur le plan moral de la conflictualité entre deux états est dangereuse. Elle conduit à retranscrire en termes de bien et de mal les catégories de l’ami et de l’ennemi, c’est-à-dire à transformer en absolus des notions éminemment relatives.
Du point de vue politique, il doit en effet toujours être possible de faire la paix avec son adversaire, car l’adversaire d’hier peut devenir l’allié de demain. Il ne peut en aller de même dans une perspective morale, qui vise inévitablement, en combattant le mal, à le faire disparaître.
L’irruption de la morale en politique a pour effet de légitimer la diabolisation de l’adversaire, qui devient de la sorte une figure du mal, c’est-à-dire un ennemi absolu. Depuis 1789, il a été amplement démontré que la vertu obligatoire débouche quasi inévitablement sur la terreur. C’est en tous cas ce que souhaite pour la Syrie, le pantin médiatique BHL, dit « le vampire des carpettes ».
Au nom de quoi, de quel règle de droit Hollande et Fabius s’érigent en Tribunal International .Quel est cette sanction qui répond à un crime par un autre crime?Au nom de qui et de quoi prennent ils le risque de déclencher une guerre mondiale dont ils auront à répondre devant les tribunaux et l’Histoire?
Tout cela pour permettre d’installer en Syrie un pouvoir composé de fondamentalistes Islamistes qu’ils combattent au Mali.
Bravo! Quelle cohérence politique!Certains appellent cela l’oligarchie des incapables…c’est bien indulgent!
Ecouter (ou réécouter) aussi le commentaire hallucinant de Bernard Guetta ce matin sur France inter : il pousse à la guerre et à l’intervention française pour « punir » Bachar el Hassad pour ces fameuses frappes chimiques, car n’est-ce pas, il est le coupable et doit être puni. Bien entendu, il est sûr (lui aussi !) que c’est bien Bachar qui est le coupable, sans même attendre les résultats de l’enquête des Nations-Unies. Il ne lui vient pas à l’idée que ça puisse être les djihadistes (à qui profite le crime?), prêts à tout pour faire triompher leur idéologie encore plus totalitaire que le régime Hassad. Nos faiseurs d’opinions et nos gouvernants sont vraiment ahurissants!
On ne peut exonérer personne d’avoir déclenché l’attaque. Il suffit d’un mortier de 60 que l’on trouve dans toutes les bonnes quincailleries du Proche Orient. Par contre mélanger les précurseurs est plus délicat…
Pour le reste on ne peut exclure le mensonge par omission. L’armée régulière syrienne peut n’avoir rien fait et laissé faire l’un des nombreux services de contre-terrorisme, ou une milice à sa botte.
A dire vrai, je vois mal une unité rebelle au contact jouer au petit chimiste dans la cour de l’école sous les bombardements.
Mais ce n’est pas si important. Tout tient dans la crédibilité de la menace américaine après avoir proclamé la ligne rouge infranchissable. Se déjuger serait feu vert donné à Téhéran et à Pyongyang ; et pour l’Iran en phase terminale d’acquisition de la bombe atomique la certitude d’une tentative israélienne de vitrification des installations nucléaires.
La Russie pourra-t-elle à son tour se contenter de bouder au Conseil de Sécurité ?
Les « actualités » vont être enrichies sous peu.
Avec un peu de chance, la Syrie ne sera pas bombardée. Foin des reculades américaines, foin des ébats dits démocratiques du Président de la Normalie, foin des élucubrations parlementaires tant en France qu’aux USA. La Syrie a vocation à tenir. Dieu soit loué, elle tiendra !