Il est évident que l’année 2013 se sera terminée de façon difficile pour le pouvoir. Que l’on en juge à l’aune de la politique intérieure ou à celle de la politique étrangère. Que l’on constate, par exemple, que la prétendue inversion de la courbe du chômage – tant annoncée – n’est qu’une sorte d’imposture comptable. Que l’on mesure, autre exemple, les difficultés de l’opération Sangaris, révélatrices d’un manque évident en hommes et en moyens.
Là comme ailleurs, l’engagement du chef de l’Etat était patent, que ce soit de façon personnelle (« Moi, président ») ou institutionnelle (en tant que chef des Armées). Dans ce contexte, l’allocution du 31 décembre ne pouvait pas être de pure forme et ce fut bien, comme l’ont souligné MM. Barbier et Joffrin, un « acte politique ». Mais, en descendant dans l’arène, à la façon de M. Sarkozy, M. Hollande s’est délibérément inscrit dans la logique du quinquennat qui réduit la fonction de chef de l’Etat à celle de chef du gouvernement – et donc la dévalorise, ce qui constitue une faute.
Sur le fond, deux propositions importantes ont été avancées, sur le plan économique et sur le plan politique. Concernant la première, on peut difficilement interpréter la main tendue aux entreprises comme un simple virage social-libéral. Du social-libéralisme, que dire en effet si ce n’est qu’il est la simple confirmation d’un état de fait idéologique (M. Hollande s’étant toujours situé plutôt à la droite du P.S.) qui double un état de fait institutionnel (l’alternance au pouvoir des deux grands partis ne recouvrant pas de différence fondamentale) ? Or, force est de constater que cette orientation, qui n’a pas varié depuis des lustres, a conduit le pays dans l’impasse.
Quant à l’antienne européiste (des « initiatives » seront prises au printemps concernant « l’avenir de l’Europe »), elle ne doit pas surprendre non plus. Comme l’ensemble du pays légal, M. Hollande ne veut, ni ne peut, admettre que cette « Europe », dont le point oméga serait l’Europe postnationale des Cohn-Bendit et consorts, n’est pas viable. Du coup, il en reste à la fantasmatique célébration, en creux, de ce que M. Chevènement – en en soulignant l’échec dans 1914-2014 : l’Europe sortie de l’Histoire ? – appelle « les trois P » (paix, puissance, prospérité). Il serait tellement plus simple, et plus efficace, d’admettre qu’une seule Europe est viable, tout simplement parce qu’elle existe de façon latente, celle des vieilles nations de l’ouest du continent.
Administrer au pays une surdose de ce qui a contribué à ses maux actuels ressemble fort à une sorte de fuite en avant et pourrait bien se révéler plus dangereux qu’efficace.
Effectivement mon cher Delanglade, la gauche s’est lancée dans une fuite en avant pour concurrencer la droite libérale sur le terrain de la modernité. D’où son ralliement à la société gouvernée par l’économie de marché et l’idéologie des droits de l’homme, c’est à dire à l’idée que l’on peut arriver au »vivre ensemble » par la confrontation des intérêts et d’un droit abstrait.
A la lutte des classes s’est substitué une lutte qui prétend au nom du « pourtoussisme » en finir avec les discriminations.
Dès lors que la gauche et la droite s’accordent pour considérer l’économie capitaliste comme un horizon indépassable, il est évident que le clivage gauche-droite n’a plus aucun sens.
Le seul clivage qui vaille désormais n’oppose plus la gauche et la droite, mais les partisans ou les adversaires d’où qu’ils viennent, du capitalisme apatride.