L’on trouve, dans Boulevard Voltaire, – c’est la physionomie de ce site ami – des prises de position diverses, souvent, même, contradictoires; mais surtout de bonnes analyses, de saines réactions. Dont celle que nous publions ici : la bataille de Bouvines vue par Georges Garnier-Rousseau, étudiant. Nous reviendrons sur Bouvines, notamment au travers des contributions du prince Jean de France et de Pierre de Meuse que la Nouvelle Revue universelle vient de publier.
Alors que l’on s’apprête à célébrer le centenaire de la grande boucherie qui fit tant de mal à l’Europe, ainsi que la victoire de l’Allemagne sur l’empereur (et je ne parle pas de la Coupe du monde), il me semble que passe un peu à la trappe un souvenir certes plus lointain, mais bien moins douloureux pour les Français qui, ces derniers temps, auraient bien besoin d’une ou deux vraies victoires à commémorer.
Bouvines, 27 juillet 1214 (il y a de cela 800 ans), s’apprête à vivre le moment le plus intense qu’on ait vu dans les Flandres. Une coalition germano-anglo-flamande, au mépris de la trêve voulue le dimanche, marche en direction de l’armée du roi de France Philippe II Auguste. Il est vrai que les coalisés n’en sont plus à une première entorse aux règles. Leur chef, l’empereur germanique Otton, du Saint Empire romain, a été excommunié. Quant à Ferrand de Flandre, il a trahi son suzerain, le roi de France. C’est un ange comparé à Renaud de Dammartin, parjure et traitre multirécidiviste. Honte suprême, leur armée est composée, en plus de la noblesse flamande et germanique, de mercenaires brabançons et saxons. Troupes efficaces mais peu recommandables, voire plus ou moins illégales.
Violation des conventions de la guerre par les coalisés et excommunication du chef adverse, voilà qui fait de Philippe II le défenseur de la chrétienté et du pape. Par ailleurs, ses troupes comprennent deux ecclésiastiques renommés, dont l’évêque de Beauvais. Celui-ci, ne pouvant faire couler le sang de ses ennemis chrétiens, brisera leurs membres à la massue. Il capturera notamment Guillaume Longue-Épée, frère batard du roi d’Angleterre et chef du contingent anglais.
Les coalisés, en supériorité numérique et dotés d’une puissante infanterie, imagineront un temps pouvoir obtenir la victoire : le centre français est enfoncé, le roi Philippe jeté au sol, puis sauvé de la mort in extremis par ses chevaliers qui, ameutant les soldats autour de leur souverain, déclenchent une contre-offensive alors même qu’Otton, l’empereur excommunié, manque d’être tué et doit fuir à pied, sa monture ayant reçu le coup fatal qui lui était destiné.
Le centre coalisé est en outre fragilisé par l’effondrement de l’aile gauche, qui s’est enfuie à l’annonce de la capture de Ferrand de Flandre qui la dirigeait. Ne reste que l’aile droite qui, d’abord victorieuse aux prémices du combat, se retrouve encerclée du fait de la débâcle de ses alliés. Ses deux chefs, Guillaume Longue-Épée et Renaud de Dammartin, sont pris après de durs combats. La bataille est finie, la victoire est totale. Otton perd sa couronne, Renaud et Ferrand leur liberté, le roi Jean une part de son autorité sur ses barons…
Voilà une bataille aux conséquences énormes, qui assoira la dynastie capétienne comme force dominante en Europe occidentale. Alors si, pour ses 100 ans, la Grande Guerre a droit à documentaires et commémorations, la bataille de Bouvines mérite bien un petit rappel de ses 800 ans. Joyeux anniversaire !
* Source Boulevard Voltaire
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