Je n’avais pas revu le général Mercier* depuis le commencement des hostilités. L’ancien ministre de la Guerre, merveilleusement vigoureux et droit malgré son âge, allait à Nantes, et nous l’avons rencontré à la gare de Saint-Pierre-des-Corps. Nous lui avons dit :
«C’est vous, mon général, qui avez été l’ouvrier de la victoire en donnant à l’armée le canon de 75.»
Et le général de répondre, avec sa voix posée, sa parole précise et si calme :
« Oh ! le canon de 75, je n’en ai été que l’éditeur. Mais ce qui est mon ouvrage, c’est la fusée que j’ai trouvée lorsque je commandais l’école de pyrotechnie.»
Puis, toujours paisible, le général parle des perspectives de la guerre qu’il estime favorables. Il tient à la main quelques gâteaux qui composeront tout son repas. Et l’homme qui a donné à la France le plus formidable des instruments de guerre, dont la volonté prévoyante sauve en ce moment les nôtres et extermine l’ennemi, cet homme calme et modeste prend congé des femmes avec une exquise courtoisie et, toujours étonnamment droit, le pas ferme, retourne à son compartiment, où il prendra sa collation de grand travailleur sobre, tandis que là-bas, sur les champs de bataille, le canon de 75 et sa fusée fauchent les Allemands…
Ce n’est pas sans une haute satisfaction que je puis me souvenir d’avoir pris la parole à Lyon, au mois de février de cette année, sous la présidence et aux côtés du général et d’y avoir montré l’orage montant sur la France et annoncé l’imminence de cette guerre. ♦
* Auguste Mercier (1833-1921) était ministre de la Guerre de 1893 à 1895 lorsque fut condamné le capitaine Dreyfus.
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