Le compte à rebours à commencé. Celui des « présidentielles » bien-sûr. Dans tous les camps, c’est presque devenu un boulot à plein temps. Sarkozy rebondit. « Ressuscite », disent même certains sans peur du ridicule. Juppé, le vieux qui veut jouer au jeune, déclare ne pas sentir la naphtaline et le prouve en se disant favorable à tout ce qu’il y a de plus avancé en matière sociétale. Comme Giscard le disait naguère de son libéralisme… Comme Raymond Barre, « le meilleur économiste de France », tentait en 1981 de refaire surface après une longue plongée, Juppé, « le meilleur d’entre nous », montre qu’il n’a rien perdu de sa superbe… mais beaucoup de ses certitudes. « Les partis politiques ne meurent jamais du trop plein de débats, du trop plein d’idées, du trop plein de personnalités fortes », minimise Sarkozy. Il verra bien ! Les Dati, Guaino, Wauquiez, Peltier rentreront sans doute dans le rang et continueront à faire matelas commun à l’UMP, mais rêveront à part d’une « droite des valeurs ». Que fera Mariton ? Ou Jean-Frédéric Poisson, du Parti Chrétien Démocrate, lequel doit penser tous les matins en se rasant qu’il pourrait bien participer à la primaire à droite ? Alors que la maison brûle, que s’accentue la déconstruction de nos forces vives et que se multiplient les plus folles dispositions gouvernementales, voilà à quel jeu, imposé par le système, joue la nouvelle opposition, à vrai dire pas si nouvelle, ni novatrice. On se borne à tabler sur le bilan désastreux de la gauche au pouvoir et à chercher qui sera la vedette principale. Mais pour faire quoi après ? A gauche on mise sur la déstabilisation de la droite, en faisant raisonner le bruit de toutes les casseroles possibles, réelles ou imaginaires. On – c’est-à dire Valls – songe aussi à la rénovation, exercice imposé par le délabrement de la popularité du président et du PS. Rude tâche à vrai dire que de dissiper une mélancolie de plus en plus chiffonnée par les ans. Des deux côtés de notre système hémiplégique on s’émeut de voir Marine Le Pen promise au second tour de la présidentielle. Cela pourrait bien être pourtant la planche de salut : celui qui arrivera au second tour face au FN n’aurait plus qu’à souffler dans la trompe du sursaut républicain pour emporter la mise. Ces grandes manoeuvres et petits calculs, ces ambitions personnelles et ce mépris du peuple réel ne sont pas une plongée dans les eaux profondes du dévoiement politicien. Ils ne sont qu’une nouvelle oscillation de cet éternel mouvement de fébrilité consubstantiel à nos institutions électives. Ils sont moins d’ordre anecdotique et conjoncturel que le corollaire de nos pratiques constitutionnelles. Le mal est donc plus profond que celui qu’on pourrait attribuer à la seule perversité de quelques hommes ou femmes.
C’est pourquoi une réflexion profonde est nécessaire sur la question de l’État. C’est l’honneur de l’Action française d’y avoir incité tous ceux que préoccupe l’avenir de la France. Cette tâche est toujours la nôtre. Le colloque Vauban qui s’est tenu le 6 décembre à Paris doit être regardé comme un nouveau départ, presque comme un acte fondateur. De l’écho que nous donnerons à ce qui est entrepris ici, dépendra la renaissance d’une espérance. La situation de la France est d’une telle gravité, et les Français traînent une telle mélancolie en matière politique, qu’il est à la fois urgent et porteur de faire entendre la solution du projet royal. Chacun comprend de façon de plus en plus patente qu’attendre le salut public des tribulations politico-partisanes n’est pas ce qui est le plus rationnel. En 1958 De Gaulle écrivait : « Vais-je saisir l’occasion historique que m’offre la déconfiture des partis pour doter l’État d’institutions qui lui rendent, dans une forme appropriée aux temps modernes, la stabilité et la continuité dont il est privé depuis 169 ans ? Sans nul doute voilà le but que je poursuis et que je dois atteindre ». Peu importe ce que l’on pense de De Gaulle. L’important est que l’enjeu soit formulé et serve de ligne d’action. Le but n’a pas été atteint, car l’histoire est souvent faite d’occasions manquées. Il arrive aussi, heureusement, qu’il y en ait de réussies, même parmi les plus ambitieuses. Encore faut-il y travailler ! La déconfiture des partis est, comme en 1958, une réalité. Devenus des émigrés de l’intérieur, ils n’ont rien appris puisqu’ils ont tout oublié. Nous nous souvenons, nous, de ce qui peut être ferment d’avenir. ■
Bernard Pascaud
Je suis d’accord avec votre exposé mais je ne savais pas que les casseroles raisonnaient. Mais après tout, au point où on en est…
Cela expliquerait d’ailleurs beaucoup de choses.