À l’occasion du 63e anniversaire de son accession au trône d’Angleterre, le célèbre espion 007rend hommage à sa reine et au flegme tout british dont elle fit preuve, notamment lors d’une excursion mouvementée.
Par David Brunat, écrivain et conseiller en communication.
Your Majesty,
Rendue publique il y a peu, l’histoire a fait le tour du monde et des chancelleries. En 1997 ou 1998, au sortir d’un déjeuner en votre château de Balmoral, vous proposâtes à votre hôte, le roi d’Arabie saoudite Abdallah, une innocente excursion en voiture dans la campagne environnante. Le souverain wahhabite accepta du bout des lèvres, mais sa réserve se mua en épouvante lorsqu’il vous vit vous installer à la place du conducteur et démarrer un solide 4 x 4.
Chacun sait en effet que dans le pays dudit souverain, le beau sexe n’a pas le droit de conduire, en vertu peut-être du peu galant adage: «Femme sur un tapis volant, mort au prochain tournant (surtout s’il est pris à la corde).» Et tandis que le roi d’Arabie, serrant les fesses à mesure que la voiture prenait du champ, roulait peut-être dans son esprit des pensées misogynes et peu amènes à votre endroit, Votre Majesté appuyait tant et si bien sur le champignon qu’il finit, tremblant, par vous enjoindre de ralentir.
Quelle leçon! So smart! So discreet! Quelle manière élégante d’allier la politique et la mécanique et de dire son fait à votre passager sans élever la voix ni déroger au royal sang-froid.
Malgré le panache et le self control dont je me crois bien doté, j’avoue n’avoir jamais fait preuve d’une égale maîtrise, du même flegme, d’une semblable élévation au cours des très nombreuses course-poursuites que mes fonctions m’ont amené à entreprendre à Votre Service au volant de mes légendaires Aston Martin. Vous m’épatez, Ma’am !
Vous conduisez votre Royaume comme vous pilotez vos véhicules et tenez les rênes de vos chevaux: sans aucune faute, sans nul écart ni dérapage. Je suis certain que vous n’auriez fait qu’une bouchée de mes ennemis – un coup de volant autoritaire pour remettre Goldfinger ou le Docteur No à leur place, une virée en 4 x 4 pour montrer au Spectre ou à Hugo Drax qui est le patron…
J’eus un chaste et respectueux coup de coeur pour vous, déjà, lorsque je vous vins chercher à Buckingham pour vous emmener aux Jeux Olympiques qui se tenaient dans la capitale de votre Royaume. J’avais été ébloui par votre port, votre grâce et l’espèce d’humour allègre qui émanait de chacun de vos gestes.
L’exploit de Balmoral met à son comble l’admiration que je vous porte et qui est, je crois, bien partagée dans tout l’Empire britannique.
Je trinque à votre santé avec un gin mêlé de Dubonnet avec deux glaçons et des tranches de citron, le cocktail préféré de Votre Majesté, et vous souhaite un excellent anniversaire de règne (NDLR: Elizabeth II est montée sur le trône le 6 février 1952).
Votre très humble et très obéissant Sujet,
James. •
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