Le prince Louis de Bourbon était en visite en Bretagne samedi 30 et dimanche 31 mai. A cette occasion, il a fait au Télégramme différentes déclarations reproduites avant-hier samedi sur le site internet du quotidien breton. Ces déclarations ont fait l’objet d’une Lettre sur la légitimité, de Pierre de Meuse, parue peu après dans le forum des débats du Télégramme. Elle a également été publiée sur notre page Facebook, Lafautearousseau Royaliste. Nous la mettons en ligne, nous aussi, aujourd’hui, pour une plus large audience. Est-il utile de préciser que nous en partageons les termes et l’esprit ? LFAR
La monarchie légitime est malheureusement abolie depuis 185 ans. Dans l’ordre juridique actuel, n’importe qui a le droit de revendiquer la couronne de France. Toutefois, si on le fait au nom du droit dynastique et de l’Histoire, il faut respecter les faits historiques. Or Louis Alphonse de Bourbon, que vous avez interrogé, a commis un certain nombre d’erreurs qui en disent long sur le bien-fondé de sa prétendance.
• D’abord, il nous parle des Bourbons, « famille française depuis plus de 1.000 ans. » Faut-il rappeler que les Bourbons commencent en 1256 en tant que branche de la famille royale, et ne deviennent héritiers de la couronne qu’à la mort d’Henri III, à la fin du XVI° siècle ? La famille royale millénaire est bien la dynastie capétienne, à travers ses divers rameaux.
• Ensuite, s’il est vrai que le Prince Henri d’Orléans est le descendant direct de Louis-Philippe, ce n’est nullement de la Monarchie de Juillet qu’il tient sa légitimité, mais de l’épuisement de la branche aînée dans les mâles à la mort d’Henri V, Comte de Chambord. Contrairement à ce que dit Louis Alphonse, il n’y a plus d’orléanisme, ni de légitimisme, d’ailleurs, depuis que, le 3 août 1873 le premier Comte de Paris reconnut Henri V comme roi de jure et renonça à porter les insignes de 1830. A la mort du prétendant de Frohsdorf, il devint Philippe VII et non Louis-Philippe II comme le réclamait une partie de sa famille, qui le déshérita pour cela. Du reste, si le terme « orléanisme » signifie une option libérale et centraliste, par opposition au royalisme traditionnel, alors Louis de Bourbon peut considérer avec regret ses propres aïeules et aïeux les reines Marie-Christine et Isabelle, ainsi que les rois Alphonse XII et Alphonse XIII, dont la doctrine de gouvernement était identique à celle de Louis Philippe.
• Enfin, Louis de Bourbon rappelle de manière surprenante pour expliquer sa vie à l’étranger les « mesures d’exil qui ont frappé les familles royales ». Certes, mais non la sienne, qui ne fut touchée ni par la loi de 1832, ni par la loi de 1848 ni par celle de 1886 qui ne proscrit que les Orléans et les Bonaparte. Et pour cause ! Les Bourbons isabelins dont Louis est l’héritier régnaient alors sur l’Espagne, et ne songeaient nullement à revendiquer la couronne de France. Et lorsque le grand père de Louis, après la mort de son père, le roi Alphonse XIII, se découvre appelé par une vocation irrépressible à la prétendance, il va tranquillement passer sans entraves d’un pays d’Europe à l’autre, tandis que les Orléans restent frappés par la loi d’exil jusqu’en 1950, revenant ensuite dans leur patrie pour toujours sans jamais cesser de se déclarer prêts à accomplir leur devoir historique. Car renouer les liens déchirés du charisme monarchique diffère grandement de la simple transmission d’une couronne : il y faut une longue suite de sacrifices et d’efforts, bien plus que deux voyages par an, mais un amour exclusif de notre pays, une disposition de tous les instants, une solidarité obstinée à travers les siècles. La couronne de France n’est pas un lot de consolation pour des princes injustement traités par leurs cousins.
Pierre de Meuse
Les lois d’exil se sont si peu appliquées à la famille de Louis de Bourbon qu’après avoir été chassée d’Espagne en 1868 et avoir abdiqué en 1870, la reine Isabelle II s’était réfugiée à Paris avec les siens, dont le futur roi Alphonse XII, et y vécut le reste de ses ses jours (36 ans). Elle y est morte en 1904.
C’est toujours tordant et désopilant de voir de tristes illégitimes donner des leçons de légitimité !
Ne vous en déplaise et en dépit d’affirmations mensongères
Oui la légitimité existe
Non nous accepterons jamais la fusion avec la branche orléaniste . Trop de mensonges , de crimes, de veuleries , de turpitudes et de laideur !!!!!
Brillante démonstration. Félicitations à Pierre de Meuse. Mais il est à craindre que les blancs d’Espagne , qui ignorent les fondements du politique et ont tendance à arranger l’histoire à leur convenance restent prisonniers de leurs rancoeurs cultivées dans certaines vieilles familles qui mettent un point d’honneur à ressembler aux caricatures que l’on fait d’elles.
Bravo, Pierre de Meuse : voici résumées en quelques lignes brillantes et claires, l’évidence des ridicules prétentions de l’espagnolade…
Merci à Mr Pierre de Meuse pour ce rappel de faits historiques éclairants.
Le marketing « people » soudain autour de Louis de Bourbon, à l’occasion de l’une de ses visites ponctuelles est en effet assez déplaisant.
Il y a en France une famille royale et un prince, Jean, duc de Vendôme.
Qu’ajouter ?
ce qui est hilarant c est que vous passiez du temps à cela . Ça occupe j imagine
une famille royale » française » qui a voté la mort du roi Louis xvi (et Qui avait pris le nom de Philippe EGALITE °….. en effet….
tant qu’il restera des descendants dans la branche ainée de la derniere famille régnante ce ceux la qui sont appelés a régner en France, les cadets passent apres. Vous n’y pouvez rien à moins de contester les lois fondamentales qui reglent la dévolution de la couronne.
Sans doute ni le Comte de Chambord, ni Louis XV n’étaient au courant.
La Querelle dynastique est le cancer de la cause royaliste française. Il est navrant de voir avec quelle gourmandise certains en propagent les métastases.
Et dans les « lois fondamentales du Royaume », le caractère « étranger » du prétendu prétendant ne l’emporte-t-il pas sur de prétendues priorités dynastiques douteuses et archaïques ?
Si nous voulons un Roi, ce n’est pas parce qu’il sera, ou serait, « légitime » : c’est pour qu’il mette fin à la République !
La prétendue légitimité des Bourbons d’Espagne n’a commencé à se faire une petite, ô toute petite place (on n’a jamais vu des pseudos-légitimistes distribuer des tracts, vendre des journaux, coller des affiches, affronter les marxistes) dans le monde royco parce que le Comte de paris Henri VI, par ses prises de position, avait mécontenté quelques extrêmistes.
Et de ces fait, ces gandins providentialistes ont « choisi » leur prétendant et rejoint quelques débris moisis qui survivaient incompréhensiblement…
De toute façon, avant de se qureller sur l’évidence, faudrait déjà prendre le Pouvoir. Et ça, c’est pas demain !
Il n’a été opposé à l’analyse de Pierre de Meuse ni arguments sérieux, ni démonstrations. Seulement des affirmations sans preuves et des imprécations.
Il est certain que ce qui reste de la querelle dynastique affaiblit la cause monarchique. Certain aussi que les partisans de Louis de Bourbon – qui n’est fondé ni à prétendre ni à agir politiquement en France, si ce n’est, éventuellement, dans le cadre de commémorations historiques – nuisent à la crédibilité du royalisme français.
Néanmoins, ils sont là, avec leur prince d’ailleurs, et, pour parler trivialement, il faut bien « faire avec ». Inutile de geindre sur ce cancer et ses métastases. Il y a toujours eu quelques cercles dits « légitimistes » en France. Mais ce sont les maurrassiens, l’Action française et les princes d’Orléans, tantôt ensemble, tantôt séparés, qui ont véritablement réfléchi, agi, milité, parfois tenté , en faveur de la monarchie. Les « espagnols » n’ont jamais compté autrement que par leur effet de nuisance.
Sur ce que peut être l’avenir du royalisme français, nous ne savons rien, si ce n’est l’extrême décrépitude, le profond discrédit, le ridicule même, dont est frappé aujourd’hui le régime en place. Personne ne pensait aux alentours de 1790, et même au delà, que la vieille monarchie s’effondrerait sous très peu de temps, encore moins que quinze ans plus tard, après une horrible Révolution, elle se donnerait un empereur corse. Et ma génération n’aurait pas cru dans les années 80 (1980 !) celui qui lui aurait annoncé que l’Union Soviétique imploserait, elle et ses satellites, dix ans plus tard.
Qu’est-ce qui pourrait bien succéder à l’actuel régime s’il venait à s’écrouler ? C’est une autre inconnue. Il me semble que c’est une raison suffisante pour maintenir et diffuser aussi largement que possible les idées qui nous rassemblent. Par exemple et entre autres, ici, sur ce site bien utile …
Mille mercis à Pierre de Meuse pour la clarté et la pénétration de sa mise au point.
En effet,les prétentions espagnoles-toutes émotionnelles et infondées qu’elles soient, sont occasionnelles tout autant qu’imaginatives,et ne datent que de 1940,après que le malheureux sourd-muet qu’était le fils aîné du roi Alphonse XIII,aient renoncé pour lui et sa descendance à ses droits sur la couronne d’Espagne.
En dépit de la sympathie que l’on puisse éventuellement nourrir à l’endroit de tel ou tel membre de cette descendance bourbonienne,il faut posément reconnaître que leur imaginaire dynastique nuit
beaucoup à l’unité, à la cohérence et à l’efficacité du royalisme français,- qui n’appartient qu’aux Français eux-mêmes,et non à des princes étrangers.
De surcroît,ces illusoires prétentions étrangères se font les complices objectifs des ennemis de la France et de son passé,ainsi que des cinq républiques qui se sont attachées-avec leurs divisions existentielles-à déconstruire ce que nos rois capétiens avaient mis tant de siècles à construire pour l’avenir du pays et des Français.
Une telle situation n’est ni »tordante »ni « désopilante »,elle est attristante et même menaçante pour notre pays et ses enfants.Notre avenir ne peut être conditionné à des supputations d’origine essentiellement émotives..
Selon un sondage YouGouv publié sur le Huff, 72% des Français n’ont plus confiance en leur démocratie ! 72% c’est énorme !
http://www.huffingtonpost.fr/2015/06/04/thermometre-crise-au-pouvoir-72-francais-confiance-democratie_n_7505284.html
Pendant ce temps les royalistes se déchirent pour des vieilleries. Il ne leur est jamais venu à l’esprit que la monarchie puisse revenir sans eux en France. Et pourtant ce serait la voie la plus facile. Après tout le royaume s’est effondré sur lui-même et sa ruine a emporté ses Lois, mais la nation demeure qui peut changer de paradigme sans se prendre la tête…
D’aucuns y ont pensé.
« Les royalistes se déchirent pour des vieilleries », écrivez-vous, Cattonéo.
Je suis substantiellement d’accord avec le reste de votre message, mais je crois qu’il ne faut pas attacher d’importance aux prétendus « Légitimistes », partisans des Espagnols. 98% des monarchistes français – ceux qui bougent, qui luttent, qui militent – n’ont aucun état d’âme sur la parfaite légitimité, depuis 1884, des princes d’Orléans.
Ce sont les 50 prochaines années de ce magnifique pays qui doivent nous angoisser plus que les foutaises d’Utrecht et la préséance d’héritiers de deux royaumes effondrés sous leur propre poids. S’il a fallu des guerres étrangères pour plier les deux empires, il ne fut besoin de rien de tel pour laisser aller les couronnes au ruisseau.
La monarchie est la solution du renouveau français pour beaucoup et de plus en plus. Ceux qui vont s’y atteler ne s’encombreront pas des scories stériles du passé, pas plus que des revendications de branches dynastiques battues, qui leur paraîtront « osées ».
On part sur du neuf.
Ce qu’écrit Catoneo est brillant mais seulement brillant et se termine par une proposition qui, selon moi, n’a pas de sens. Si l’on préfère, c’est une proposition illusoire : on ne part jamais sur du neuf, l’Histoire ne s’oublie jamais et son poids sur le présent et l’avenir ne s’annule jamais non plus. Ni les capétiens, ni la République, ni l’Empire ne sont des commencements absolus. Et mille ans de règne capétien pèseront toujours sur quiconque voudra remettre la France sur sa trajectoire historique qui donne forme et réalité à son identité.
A mon avis, l’idée monarchique s’incarne nécessairement. Elle ne peut être sans visage, Ni en avoir plusieurs. Sans quoi, elle se dégrade en pure et simple en idéologie.
Pour les raisons qu’expose Pierre de Meuse, avec lesquelles je suis d’accord, les princes d’Orléans me paraissent actuellement les seuls légitimes pour réaliser cette incarnation.
Peut-il surgir une dynastie nouvelle ? Il ne faut pas l’exclure mais l’hypothèse est vaine tant qu’elle ne se manifeste pas. Si elle se manifestait, prenait corps, agissait, nous serions assez grands garçons pour juger de ce que nous aurions à faire. Mais même dans un tel cas, si ce « nouveau » pouvoir entendait assumer et conduire le destin de la France et s’en révélait capable, ce ne serait pas indépendamment de son Histoire. Et, pour l’essentiel, ce ne serait pas indépendamment de l’héritage capétien.
Cette hypothèse étant pour l’instant sans réalité, les princes d’Orléans, pour moi, sont nos Princes.
Pierre Builly a raison : en définitive, les partisans des princes espagnols n’ont guère qu’une seule importance : celle que nous-mêmes leur accordons. Que nous seuls ou presque seuls leur accordons. Sans nous, ils ne sont rien, ou presque. Même si l’on ne peut pas leur laisser tout faire et tout dire, un peu de distance s’impose !
L’histoire de France est toujours repartie sur du neuf. Elle est faite de ruptures. Vous la connaissez assez bien pour qu’on ne fasse pas une page sur ce sujet, en commençant par la tonsure de Childéric III.
Les rois de France ont eu cette particularité de toujours tirer le char par eux-mêmes. Sauf le dernier qui préféra l’érudition et la chasse, il en mourut. La suite fut une politique de bouchon de liège au fil de l’eau ; on subissait les révolutions de tous ordres, on n’en conduisit aucune. La race était épuisée après les trois Bourbons comme il en fut des trois Valois qu’ils supplantèrent. Orléans ne fit qu’une brève apparition dans la même veine.
Aujourd’hui les princes vivants libres de tout pouvoir sont déjà dans l’adaptation politique, dans la correction des moeurs, l’infléchissement des trajectoires quand il leur arrive si rarement d’en parler. En situation de pouvoir, aucun ne créera ex-nihilo le projet qui rénovera le pays, car ils n’en ont pas les capacités intellectuelles et mentales requises, sans parler de la résilience exceptionnelle du titulaire qu’exigera une restauration.
Il n’y a pas de chef !
Pour marquer le coup, je dirais qu’il n’y a aucun Poutine dans aucune famille prétendante. Anatole, vous ne pouvez incarner l’idée monarchique avec des « employés ». Le « Chef » peut, lui, surgir de n’importe où.
Poutine a, en effet, la trempe d’un chef et les vues assez larges, l’intelligence politique assez aiguë pour diriger son pays comme il l’a toujours été, c’est à dire de façon autoritaire. Mais sa politique n’est rien d’autre que l’impérialisme tsariste séculaire. Il est davantage une continuité qu’une rupture. Poutine mène et incarne une politique pérenne mais son régime ne l’est pas, n’est pas, si je puis dire, institutionnalisé. Je me demande si au fond les régimes dynastiques ne sont pas les seuls à être des institutions véritables, c’est à dire, par nature, capables de pérennité. En quoi la réalité du Roi transcende toujours celle du Chef.
En bref, je ne crois en Histoire, en politique et sans-doute en rien à aucune création ex nihilo, en quoi je diverge absolument de votre conception a-historique du politique. Dans cet ordre, qui concerne des sociétés historiques, on ne repart jamais sur du neuf. A fortiori s’agissant d’un pays qui a conscience d’exister en tant que tel depuis au moins dix ou quinze siècles..
Vous attendez un Poutine. Et je suppose un Poutine à la française fondateur de dynastie ? Je dis que cela peut « surgir » mais ne peut être invoqué sans que ce surgissement soit intervenu, s’il intervient … Je maintiens donc, hic et nunc, mon royalisme traditionnel, avec ses princes, tels qu’ils sont, auxquels, contrairement à vous, je trouve bien du mérite à maintenir la tradition qu’ils incarnent.
Citer Poutine m’évitait de faire tout un paragraphe sur la question des niveaux. Il n’est pas ma tasse de thé, La Faute à Rousseau le sait bien ! Pour le reste, restons en « la » comme on dit à l’orchestre.
Restons an là.
Juste une précision à propos d « un mot qu’emploie Catoneo : « La race était épuisée après les trois Bourbons comme il en fut des trois Valois qu’ils supplantèrent. » Les Bourbons n’ont pas « supplanté » les Valois, qui se sont éteints avec Henri III comme les « Capétiens directs » se sont éteints avec Charles IV. Après l’assassinat d’Henri III de France, dernier des Valois, c’est son très lointain cousin – et allié… – l’autre Henri III (Henri III de Navarre) qui devint Henri IV, mais sans supplanter personne, puisqu’il n’y avait… plus personne !
Ce n’est pas la famille d’Orléans qui a voté la mort du roi Louis XVI. C’est Louis-Philippe-Joseph, duc d’Orléans (dit « Philippe-Egalité ») et lui seul. Ses trois fils, au premier rang desquels le futur Louis-Philippe Ier, n’ont été en rien associés au vote de leur père. En décembre 1792, ils tentèrent de le dissuader de participer au procès du roi. En vain.
Refuser toute fusion ? Décidément, les partisans de Louis-Alphonse et de ses prédécesseurs tras los montes méconnaissent complètement l’histoire de leurs propres champions ! Le supposé passage de témoin, en 1936, entre la branche carliste (Don Alfonso-Carlos, duc de San Jaime) et la branche réputée libérale d’Alphonse XIII est le pur produit d’une… fusion !
Alors comment expliquer que le prédicat officiel de premier prince du sang, passé des Condé aux Orléans, n’ait jamais échu aux Bourbons d’Espagne ? Comment expliquer que, sous Louis XV, Louis XVI, Louis XVIII et Charles X, chacun des ducs d’Orléans, du fils du Régent jusqu’à Louis-Philippe, ait été reconnu officiellement premier prince du sang ?
Je rappelle que le premier prince du sang est le premier prince dynaste après les fils et petits-fils de France.
Si, de Louis XV à Charles X, les Bourbons d’Espagne avaient été regardés comme dynastes dans notre pays, l’infant Philippe-Antoine, duc de Calabre (1747-1777) aurait succédé à Louis Ier duc d’Orléans (1703-1752) comme premier prince du sang. Et après le duc de Calabre, son frère le futur roi Charles IV d’Espagne. Or il n’en a rien été.
Nos derniers rois et les institutions de l’Ancienne France puis de la Restauration ont sauté à pieds joints par-dessus la prolifique descendance de Philippe V : les membres de cette dernière n’étaient plus dynastes en France. Du moins pour la jurisprudence de nos derniers rois et de notre Monarchie ancienne puis restaurée. Excusez du peu !
Merci à Pierre de Meuse de sa mise au point frappée du bons sens , nourries de connaissances historiques mises en perspective.
Ce n’est pas la famille d’Orléans, qui a voté la mort du Roi, Louis Philippe s’est même brouillé avec son père à cette occasion, c ‘est une défaillance du Duc d’Orléans., qui s’en est repenti avant de mourir , lui qui à l’époque ne pouvait prétendre à rien .
L’esprit de revanche des républicains nous couté très cher, 70 et le reste, qu’il ne contamine pas la famille de France et ses soutiens à l’heure où le régime tourne à vide. Plus que jamais nous avons besoin de » Politique ».
Les derniers commentaires ajoutés à ce débat m’ont intéressé. Spécialement ceux d’Henri et Saint-Priest qui connaissent la question. Il se confirme en effet que les partisans des princes espagnols ignorent presque totalement l’histoire des Bourbons d’Espagne. Le débat serait dérisoire – comme le pense Catoneo – si – comme le pense Anatole – l’idée monarchique n’avait pas un besoin absolu d’incarnation. Ce qui suppose de trancher la question en matière dynastique.
Les actuels Bourbons d’Espagne sont les descendants d’Isabelle II et de son ministre Puig Molto. Aucun de ses 8 enfants n’est le descendant de Francisco de Asis, son mari, et pour cause !!
Elle l’a reconnu et chaque enfant savait qui était son père. Il existe au Ministère des Affaires étrangères de Madrid une grande table ronde sur laquelle a été conçu un petit bâtard royal. Ces
« légitimés » sont devenus légitimistes. Belle carrière.
Précisément. Le néo-légitimisme est en bonne part le fruit d’un rejet du politique. L’un de ses plus brillants avocats, Stéphane Rials, avait qualifié le néo-légitimisme de démarche écologique ou patrimoniale. C’est même ainsi qu’il conclut son Que sais-je? sur le légitimisme :
« Le but de ceux qui s’en réclament n’est probablement pas, à terme humain, la restauration monarchique [aveu de taille !]. Plus modestement, ils semblent soucieux de sauvegarder tout un pan de la mémoire nationale. A leur façon, ces blancs sont des verts, couleur qui ne saurait d’ailleurs leur déplaire [allusion aux couleurs du comte d’Artois ?], des écologistes, des écologistes de la tradition. »
Stéphane Rials, Le Légitimisme, PUF, collection Que sais-je?, 1983, p. 121.
C’est clair : il s’agit d’une sortie pure et simple du politique. La restauration monarchique est renvoyée aux calendes grecques. Et l’on en prend son parti. Pire. On en est presque soulagé. Le programme de ce royalisme-là, c’est la République à perpétuité, et le doux plaisir d’évoquer entre soi le temps jadis et la royauté qui ne reviendra pas.
Ce sont des royalistes pratiquants… mais non croyants !
Et encore… La pratique se réduit aux messes du 21 janvier, aux galettes des rois et aux conférences de quelques sociétés savantes. Ce royalisme-là meurt. Ne troublez pas son agonie. Ill ne surnage et ne surnagera de tout ça que la répulsion à l’endroit des princes d’Orléans.
Derrière le rejet des princes d’Orléans, il y a le rejet du politique. Le rejet de la politique comme souci, pour reprendre la formule de Boutang.
Cette tendance était déjà latente dans le monde légitimiste du XIXe siècle. Nombre de royalistes ont enterré leurs espérances avec le noble prince qu’était le comte de Chambord. Le libéralisme réel ou supposé des princes d’Orléans de ce temps (1883) les y a puissamment aidés. Il faut le dire. D’où le désespoir politique pur et simple. D’où les rêveries survivantistes.
D’où le ralliement au noble Don Carlos (celui du roman de Pierre Benoit). Ralliement qui embarrassait passablement ce dernier, qui était probablement le légitime successeur à la couronne d’Espagne (contre les ancêtres de Louis-Alphonse). En ce sens, il est inexact de faire remonter les Blancs d’Espagne aux prétentions françaises du duc de Ségovie (grand-père de Louis-Alphonse). Elles remontent à la mort du comte de Chambord (1883).
Don Carlos fut (en France) un prétendant intermittent. Après lui son fils, puis frère, pareillement. Et la petite cohorte des Blancs d’Espagne s’étiola progressivement.
Pendant ce temps, la grande majorité des légitimistes – du moins ceux qui, avant la lettre, considéraient que le désespoir en politique est une sottise absolue – s’étaient ralliés au comte de Paris de ce temps-là (1838-1894). Parmi eux, on comptait le comte de Mun (qui certes se rallia à la République à l’invitation du pape Léon XIII) et René de La Tour du Pin. Avec le pionnier du catholicisme social, ce royalisme-là (les Blancs d’Eu raillés par leurs adversaires) n’avait rien de l’orléanisme des banquiers de Juillet.
Ce légitimisme-là – le légitimisme politique et social (pas le légitimisme mondain ou crépusculaire) – se reconnut dans le royalisme de Charles Maurras et de l’Action française. Ce dernier renouvelait le corpus doctrinal, et s’adressait aux intelligences plus qu’aux fidélités. Pour les intelligences humaines, pour les hommes de bonne volonté, la monarchie capétienne devenait à nouveau crédible. Contrairement à ce que l’on a trop souvent écrit, elle ne détruisait pas le royalisme de fidélité, elle lui offrait au contraire une apologétique.
Lorsque le deuxième comte de Paris (1908-1999) fit le choix de la rupture avec l’Action française (1937), il se libéra sans doute (ce qui était compréhensible) des lisières qu’on voulait continuer à lui imposer. Il désorienta surtout les meilleurs de ses fidèles. Et le prince ouvrit à terme la voie à un improbable retour des Blancs d’Espagne. Combien d’entre les fidèles du duc de Ségovie ou du duc de Cadix furent en effet (avant tout ?) des déçus du comte de Paris, bien plus que des héritiers d’une réelle continuité politique depuis Don Carlos ? On pourrait citer des noms.
Les querelles dynastiques qui minent le petit monde royaliste, mais aussi et surtout la cause monarchique, ont pour cause non seulement les pathologies d’un royalisme a-politique, mais aussi (il ne faut pas le cacher) les orientations aventureuses prises en son temps par un prince légitime.
Il est probable en effet qu’Alphonse XII fût le fils d’Enrique Puigmolto, favori et amant de la reine Isabelle II. Il n’en demeure pas moins qu’au regard du droit il est le fils (présumé) de Francisco de Asis de Borbon, duc de Cadix et roi consort d’Espagne (1822-1902). A ce titre, Alphonse XII n’était pas un bâtard et n’avait pas à être légitimé.
Disons que, probablement, Alphonse XII et sa descendance (avec notamment Alphonse XIII, Juan-Carlos Ier ou Louis-Alphonse) sont, en ligne paternelle, aussi Bourbon que la descendance de la Grande Catherine est Romanov.
Au passage, rappelons que la querelle dynastique a existé en Espagne avant d’exister en France. A la mort du roi Ferdinand VII en 1833, il n’était pas du tout évident que sa très jeune fille Isabelle II fût légitimement appelée à ceindre la couronne d’Espagne… notamment parce que la loi de succession avait été changée – pour permettre aux infantes de succéder – sans l’aval des Cortès dûment mandatées à cet effet. C’est pourquoi, à la mort de Ferdinand VII, l’Espagne traditionnelle et traditionaliste reconnut pour roi le frère du défunt souverain : Don Carlos, comte de Molina (1788-1855), et se souleva contre le gouvernement d’Isabelle II et de sa mère la reine-régente Maria Cristina. S’en suivit une terrible guerre civile entre carlistes et cristinistes. Ces derniers étaient d’ailleurs soutenus par les puissances européennes libérales : l’Angleterre et la France de Louis-Philippe.
Cette guerre connut plusieurs répliques, notamment après la révolution de 1868 qui chassa Isabelle II et déboucha laborieusement sur l’instauration de la première République espagnole (1873-1874). Entretemps, Don Carlos, duc de Madrid (petit-fils du comte de Molina et neveu par alliance d’Henri V, comte de Chambord) avait relevé l’étendard du carlisme et s’était solidement établi en Navarre. Ce furent les armées d’Alphonse XII, auxquels les notables libéraux s’étaient ralliés (Canovas del Castillo et Sagasta) qui délogèrent les carlistes et leur prince de la Vendée navarraise.
Où l’on voit que les ancêtres de Louis-Alphonse n’ont rien à envier à notre Louis-Philippe national en terme de libéralisme (réel ou supposé) ou en terme de rébellion contre la légitimité.
C’est la raison pour laquelle les légitimistes espagnols que sont les carlistes furent placés dans un dilemme tout à fait semblable au nôtre lorsque la branche carliste vint à s’éteindre avec la mort de Don Alfonso-Carlos, duc de San Jaime (et frère du duc de Madrid) en 1936.
D’aucuns se rallièrent à Alphonse XIII, chef de l’ex branche cadette devenue aînée à la mort de leur prince. D’autres reconnurent comme régent puis comme roi de droit le prince Xavier de Bourbon-Parme. D’autres allèrent chercher un descendant du duc de Madrid par les femmes. Evidemment, on avança le libéralisme des princes « isabello-alphonsins » et l’on fit valoir l’hypothèse (ou l’hypothèque ?) Puigmolto.
Certains Blancs d’Espagne aiment également à oublier que, de notre côté des Pyrénées, leurs peu nombreux devanciers, sincèrement attachés aux princes carlistes, furent loin d’être unanimes pour se rallier à Alphonse XIII en 1936… Certains barons d’Empire préfèrent passer outre… ou insulter les princes de Bourbon-Parme qui apparurent à certains comme leurs nouveaux champions.
L’affaire était loin d’être anecdotique. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le « prince d’Espagne » désigné successeur du général Franco en 1969 changea de prénom. Juan (surnommé « Juanito » pour le distinguer de son père Don Juan, comte de Barcelone et prétendant au trône) devint Juan-Carlos Ier. Etant donné qu’il s’agissait de rallier et de réconcilier carlistes et alphonsistes sous la bannière du régime franquiste, il ne pouvait y avoir de roi Jean, puisqu’il en aurait résulté un épineux problème de numérotation (il y avait eu un prétendant carliste sous le nom de Jean III : le père du duc de Madrid).
Il semble d’ailleurs que très peu de carlistes avaient reporté leur fidélité sur Don Jaime, duc de Ségovie (et grand père de Louis-Alphonse). Don Jaime avait en effet renoncé à ses droits à la couronne d’Espagne en 1933. Et ce au profit de son frère Don Juan, comte de Barcelone. Certes, c’était sous la pression de son père Alphonse XIII. Certes, c’était en exil, puisque la deuxième République espagnole avait été instaurée en 1931. C’est la raison pour laquelle Don Jaime, plus ou moins bien conseillé par un entourage assez discutable, revint plusieurs fois sur ses renonciations. Il n’en demeure pas moins qu’entretemps le même duc de Ségovie avait contracté un mariage non dynaste – puisque la loi de succession espagnole exigeait une épouse issue d’une famille royale. C’est la raison pour laquelle les deux fils de Don Jaime : Alfonso (le père de Louis-Alphonse) et Gonzalo ne pouvaient pas, sérieusement, griller la priorité à un prince qui était lui incontestablement dynaste (si l’on ramène l’hypothèque Puigmolto à ses justes proportions), à savoir Juan-Carlos, fils du comte de Barcelone et de son épouse Maria de las Mercedes de Borbon y Orléans (dont le grand-père maternel était Philippe VII, comte de Paris). Certes, on trouva des partisans de Don Alfonso au sein de la Phalange, et au sein de la famille du Caudillo : son épouse et son gendre… puisque Don Alfonso avait épousé la petite-fille du généralissime (en 1972). Il semble bien que Franco n’a jamais envisagé l’hypothèse Don Alfonso : ni avant la désignation de Juan-Carlos en 1969, ni a fortiori après.
On pourrait conclure comme suit : lorsqu’on va chercher ses princes en Espagne, il vaut mieux s’intéresser aussi à leur histoire. Elle est passionnante. Elle est éclairante. Elle est la leur. Elle n’est pas la nôtre.