Château de Chambord. Le recensement effectué à la mort d’Henri II en 1552, témoigne de la présence de nombreuses vignes dans les fermes du château (photo FC). Elles reviennent. Presse locale é médias nous en parlent …
C’est en 1519 que le monarque bâtisseur de Chambord a fait venir 80 000 pieds de vigne de Bourgogne, aujourd’hui connus sous le nom de cépage « Romorantin ». Longtemps disparu du domaine, le voici replanté d’une très rare variété pré-phylloxérique ressuscitée par la famille Marionnet de Soings-en-Sologne. Les premiers pieds viennent d’être mis en terre.
« Tant pour l’achapt de la quantité de quatre vingt milliers de complans de Beaune par luy achapté par ordonnance […] conduict lesdits complants depuis ladite ville de Beaune […] jusques en la ville de Romorantin… Iceluy complan ledit seigneur a ordonné estre planté ». C’est un extrait d’un courrier de 1518 des Archives Nationales relatant l’implantation de cépage Romorantin en Sologne. D’autre part, d’anciens plans de Chambord attestent qu’en 1786, six hectares des terres de la ferme de l’Ormetrou sur le domaine étaient plantés de vignes. Au début du XXIe siècle, officiellement le 12 juin 2015, les ceps retrouvent le terroir chambourdin. « C’est un projet patrimonial, environnemental et économique », explique Jean d’Haussonville, le directeur général du Domaine National de Chambord.
Une vigne unique au monde
Patrimonial, car la moitié des pieds plantés, soit trois hectares, sont issus d’une sélection massale sur des plants pré-phylloxériques certifiés d’avant 1840. Ce sont des plants dits « francs de pied », n’ayant subi aucun greffage ni aucune transformation génétique. « Il y a 15 ans, nous avons récupéré 36 ares de cette vigne sur Soings-en-Sologne », raconte Jean-Sébastien Marionnet. Si bien que cette variété est aujourd’hui considérée comme la descendante la plus directe des « complans de Beaune » acheminés par François 1er en 1519. « A Chambord, nous les plantons sur une terre très sableuse, légèrement argileuse », explique le vigneron au sein du domaine familial de « La Charmoise » à Soings. « Cela donnera un vin élégant et racé » promet son père, Henry Marionnet.
Plantation entre pluies et éclaircies
Les ceps ont été mis en terre de manière très officielle vendredi 12 juin. Elus locaux et autorités de l’Etat ont été invités à chausser les gants pour la plantation symbolique autour de Guillaume Garot. L’ancien ministre délégué à l’Agroalimentaire et député PS de la Mayenne est depuis décembre 2014 président du conseil d’administration du Domaine National de Chambord. « Nous recréons la vigne de François 1er et nous élaborerons le vin de Chambord », s’enthousiasme Guillaume Garot. Cette idée inscrite dans le projet d’établissement du Domaine permettra, selon les prévisions, de récolter 300 000 €, voire plus. « Cet argent sera destiné à l’entretien du Domaine, particulièrement du mur d’enceinte », précise Jean d’Haussonville.
De la nature en bouteille
Le classement du Domaine en site « Natura 2 000 » impose certaines obligations, notamment pour le maintien de la biodiversité. C’est Ségolène Royal, ministre de l’Ecologie, qui a exigé un travail biologique de ces vignes. Le savoir-faire de la famille Marionnet permettra même de produire un vin naturel, sans ajouts de soufre ou de produits œnologiques. En prime, le ministère octroie 800 000 € au Domaine National de Chambord pour créer un parcours promenade dans les vignes. « Nous nous inscrivons pleinement dans une démarche oeno-touristique », rebondit Jean d’Haussonville. Début juillet, la Maison des vins des AOC Cheverny et Cour-Cheverny installera un nouveau lieu d’accueil à Chambord.
Quantités (très) limitées
« Nous prévoyons une production annuelle de 60 000 bouteilles », déclare Jean d’Haussonville, mais toutes ne contiendrons pas le vin issu des précieux pieds de Romorantin. En effet, une parcelle de pieds greffés complètera la gamme pour le blanc, et il faudra aussi compter avec des Pinot Noir et des Gamay pour élaborer un Cheverny rouge. « Nous sommes en attente de décrocher les AOC Cour-Cheverny et Cheverny. C’est en bonne voie », assure la directeur général de Chambord. Seul certitude, il n’y en aura pas pour tout le monde. Il faudra déjà attendre la première vendange prévue en 2019 (année des 500 ans du début de la construction du château). « Nous allons aussi lancer une campagne de mécénat des pieds de vigne ». Ainsi, pour 1 000 €, il sera possible de bénéficier d’un droit d’option sur trois bouteilles. •
Nicolas Terrien
Très belle initiative