Nous avons aimé cet excellent reportage de Valeurs Actuelles sur le Puy du Fou. Plus qu’un reportage en vérité. Il s’agit, ici, de rendre un compte exact de l’esprit, de l’âme, de ce lieu unique. En piste pour l’aventure … Il faut y aller !
Malheur à celui qui, devant Philippe de Villiers, parle de « parc d’attractions » à propos de « son » Puy du Fou. L’oeil tournoie comme celui de ces rapaces que l’on aperçoit, au loin, survoler les spectateurs pétrifiés du « Bal des oiseaux fantômes ». Puis il vous fixe, comme prêt à foncer sur sa proie. « Parc d’attractions ? On n’est pas chez Mickey Mouse ! » Ici, pas dé manèges mais des « spectacles vivants ». Et surtout, insiste-t-il, « une âme ». Ce mot lui plaît. Il y revient : « Nous sommes des donneurs d’âme. » C’est, selon lui, au-delà des performances techniques inouïes qui ont valu au Puy du Fou d’être consacré à deux reprises meilleur parc du monde, ce qui explique, dans ses profondeurs, l’extraordinaire succès de ce qui n’était, il y a trente ans, qu’un banc de terre abandonné faisant face à un château en ruine du XVIe siècle devant lequel Villiers, alors âgé de 28 ans, avait un jour garé sa 4L. Puis s’était mis à rêver…
Ses près de 2 millions de visiteurs annuels (le deuxième parc français en termes de fréquentation après Disneyland Paris), le Puy du Fou les doit en effet aussi, et peut-être d’abord, à cet amour glorifié de la France éternelle que l’on n’apprend plus dans les livres d’histoire et qui, ici, est entré fièrement et joyeusement en résistance contre les fausses idoles, les dérives et les effacements volontaires de ce temps. « Nous sommes le « Malet et Isaac » en lutte contre les déconstructions, scolaire et autres, explique son fondateur, un verre de pastis à la main, avant de passer à table. Le Puy du Fou, c’est le parc de l’enracinement. La mondialisation sauvage déracine les peuples, mais il y a une chose que l’on ne peut pas déraciner, c’est justement notre besoin vital d’enracinement. Sans racines, pas de sève, donc pas de vie. Et sans passé, pas d’avenir. » Peu lui chaut, comme on disait autrefois, l’hostilité furieuse des « pseudo-modernes », dénonçant dans les 50 hectares du parc, comme le fait le Monde diplomatique, « une vision passéiste et une mémoire qui est loin d’être innocente ». Villiers assume. En bloc. « En venant ici, dit-il, les Français viennent retrouver la grandeur perdue de la France.» Manière de résumer, en une phrase, sa vision de l’histoire et celle du présent…
C’est d’abord la Vendée, son peuple et sa mémoire sacrifiée que le Puy du Fou a voulu célébrer.
Avant même les spectacles consacrés aux Gaulois fondateurs, à Jeanne d’Arc boutant les Anglais, aux mousquetaires de Richelieu ou aux poilus de 1914-1918 ; avant, aussi, de rendre hommage, dans leurs villages dédiés du parc, à cette France du rude Moyen Âge, de l’éblouissant XVIIIe et du nostalgique XIXe, c’est d’abord la Vendée, son peuple et sa mémoire sacrifiée que le Puy du Fou a voulu célébrer.
Dans sa Lettre ouverte aux coupeurs de têtes (Albin Michel, 1989), Villiers, fils d’un Lorrain et d’une Catalane, tombé amoureux de cette terre et de son histoire, s’en était longuement expliqué : « La Vendée, écrivait-il n’a pas eu droit à des obsèques… Mais à faire silence, on prend un risque : le risque du temps. Pas le temps officiel, très court, celui-là, qui recouvre les exactions, mais le temps officieux, le temps des familles qui découvrent les charniers, le temps des médaillons qui piste les mensonges, le temps qui crie justice et porte plainte devant la mémoire collective, le temps qui recompose les filiations et reconstitue les chemins de traverse de l’histoire chuchotée à la veillée… »
Pour « Les amoureux de Verdun », les visiteurs deviennent eux-mêmes des poilus.
Au commencement de tout, en 1978, fut donc Jacques Maupillier, le paysan vendéen héros de la fameuse « Cinéscénie » (plus de 10 millions de spectateurs depuis sa création !) inventée par Villiers pour conter à travers les siècles, avec la voix de Philippe Noiret, la tumultueuse et glorieuse destinée française. « Son patronyme, explique Villiers, c’est celui de nos coteaux : Mau-léon, Mau regard, Mallièvre, Maulé-vrier… Maupillier, ce n’est pas un métayer, c’est un mythe. Ce n’est pas un état civil, c’est un état d’âme… Jacques Maupillier se réincarne à chaque génération. Il rassemble en lui le père et le fils, les joies et les peines, les rêves et les deuils de la même famille.»
C’est sur lui, et les désormais 3 200 figurantsde la « Cinéscénie », presque tous bénévoles, qu’a été bâti ce qui allait devenir l’incroyable saga du Puy du Fou. Onze ans plus tard, en 1989, le Grand Parc ouvre ses portes. Il accueille aujourd’hui dix-sept spectacles, du colossal « Signe du triomphe » dans des arènes gallo-romaines, clôturé par une course de char digne de Ben Hur, , au plus intimiste « Monde imaginaire de La Fontaine », dont les textes sont dits par Lorànt Deutsch et Gérard Depardieu. La saison prochaine verra un retour aux sources vendéennes avec l’ouverture d’une nouvelle attraction (même si Villiers n’aime pas le mot) : « Le dernier panache », consacré à l’épopée du général Charette, le chef-martyr des chouans.
Là encore, plus que jamais, c’est l’ancien président du conseil général du département qui est à la manoeuvre. À ses côtés, deux incontournables : son fils Nicolas, qui lui a succédé à la présidence de l’association du Puy du Fou, et son directeur général, Laurent Albert, ex-premier salarié du site. Trois ans, en moyenne, sont nécessaires pour faire aboutir un projet. Pour « Les amoureux de Verdun », le dernier-né, les visiteurs deviennent eux-mêmes des poilus en traversant la plus grande tranchée du monde secouée par les bombardements et en assistant, à côté d’eux, aux assauts plus vrais que nature des soldats reconstitués en images 3D.
L’esprit qui souffle sur ce petit bout de terre est un drapeau qui claque au vent frais.
Près d’un siècle et demi d’écart entre le martyre vendéen et la boucherie des tranchées, mais, pour Villiers, une leçon commune à toutes les époques : « Même lorsqu’on marche dans des paysages désespérés et calcinés, il reste l’espérance française. » Il faut, pour le comprendre, l’entendre parler, quelques instants plus tard, comme un enfant émerveillé des centaines de brevets d’innovation déposés par le Puy du Fou, de ses 24 écoles (gratuites) de cavaliers, d’acrobates, de cascadeurs, ou encore de ses projets à l’étranger (Pays-Bas, Russie, Chine…) qui le font s’envoler, chaque semaine, à l’autre bout du monde. L’esprit qui souffle sur ce petit bout de terre générant aujourd’hui un chiffre d’affaires de 70 millions d’euros par an (entièrement réinvestis) n’a rien de la molle bannière en berne ou du triste chant du cygne décrit par certains ; c’est un drapeau qui claque au vent frais, un clairon qui sonne dans le matin.
Révérer le passé n’est pas être passéiste. Comment, sans cela, expliquer le succès acquis sans la moindre subvention publique depuis trente ans ?
Résolument moderne, à des années-lumière des caricatures, la « Cinéscénie » fondatrice l’était déjà. Sur un petit carnet, rêvant devant les débris du château du Puy du Fou incendié sous la Révolution, et aujourd’hui entièrement rebâti, le jeune Villiers avait déjà fixé ses objectifs : « Rompre avec la philosophie du »son et lumière ». En finir avec ces récits désuets et langoureux qui se contentent de passer un pinceau sur les donjons et vous expliquent d’une voix chevrotante sur fond de ruine : « Cette année-là, en 1292… »». Tout un symbole : des drones, l’année prochaine, permettront de fixer dans les airs de nouveaux décors. Mais l’âme, elle, restera la même. •
Arnaud Folch et Claire Brulon
Pratique : En piste pour l’aventure
Horaires
Grand Parc : 10 à19 heures ou 10 à 21 heures.
Cinéscénie : début à 22 h 30 en juin et juillet, à 22 heures en août et septembre.
Tarifs
Grand Parc : à partir de 30 euros (adulte) et à partir de 20 euros (enfant).
Grand Parc + Cinéscénie : à partir de 47 euros (adulte) et à partir de 29 euros (enfant).
Pour 10 euros supplémentaires, profitez du Pass Émotion et bénéficiez d’un placement préférentiel dans les tribunes des six grands spectacles du Grand Parc.
Séjour parc + hôtel : à partir de 54 euros à La Villa gallo-romaine et à partir de 59 euros aux îles de Clovis.
Y aller
En voiture : autoroute A87, sortie n° 28.
En train : gare TGV d’Angers (une heure et demie de Paris) + navette (environ une heure et demie). Aller-retour : 20 euros par personne ; aller simple :12 euros.
Rens. : www.puydufou.com – Tél. : 0.820.09.10.10.
VERDU sur Éloquence : Tanguy à la tribune,…
“Il est bon !!”