Les légitimistes espagnols que sont les carlistes (Saint-Priest)
Débat qui a suivi la Lettre sur la légitimité de Pierre de Meuse [Du 1 au 22 juin 2015 – 31 commentaires].
Nous n’allongerons pas ce débat déjà fort long et fort riche en lui-même. La conclusion pourrait être celle qu’en donne l’un des commentaires de Saint-Priest : « Lorsqu’on va chercher ses princes en Espagne, il vaut mieux s’intéresser aussi à leur histoire. Elle est passionnante. Elle est éclairante. Elle est la leur. Elle n’est pas la nôtre.» A cet égard, les contributions de Saint-Priest, parfait connaisseur de ce vaste sujet, sont de toute évidence à signaler. Elles sont, sur certains points, déterminantes. Elles ont aussi le mérite de rappeler que l’Espagne des XIXe et XXe siècles a eu, en quelque sorte, avec le carlisme, son authentique légitimisme et d’en retracer l’histoire. Restent les points de vue qui consistent à trancher la question dynastique par recours à la nouveauté : un fondateur de dynastie, un nouveau paradigme. Mais lesquels ? En attendant leur hypothétique surgissement – tout reste toujours possible – devrions-nous proposer – contre son principe fondateur – un royalisme sans visage ? Nous ne le croyons pas. Les princes d’Orléans sont aujourd’hui les héritiers de la légitimité historique. •
Les lois d’exil se sont si peu appliquées à la famille de Louis de Bourbon qu’après avoir été chassée d’Espagne en 1868 et avoir abdiqué en 1870, la reine Isabelle II s’était réfugiée à Paris avec les siens, dont le futur roi Alphonse XII, et y vécut le reste de ses ses jours (36 ans). Elle y est morte en 1904. Gérard POL lundi 01 juin 2015
Ce qui est hilarant c’est que vous passiez du temps à cela . Ça occupe j’ imagine. Moine mardi 02 juin 2015
C’est toujours tordant et désopilant de voir de tristes illégitimes donner des leçons de légitimité ! Ne vous en déplaise et en dépit d’affirmations mensongères, oui la légitimité existe Non nous accepterons jamais la fusion avec la branche orléaniste . Trop de mensonges , de crimes, de veuleries , de turpitudes et de laideur !!!!! Pauline lundi 01 juin 2015
Refuser toute fusion ? Décidément, les partisans de Louis-Alphonse et de ses prédécesseurs tras los montes méconnaissent complètement l’histoire de leurs propres champions ! Le supposé passage de témoin, en 1936, entre la branche carliste (Don Alfonso-Carlos, duc de San Jaime) et la branche réputée libérale d’Alphonse XIII est le pur produit d’une… fusion ! Saint-Priest jeudi 18 juin 2015
Les actuels Bourbons d’Espagne sont les descendants d’Isabelle II et de son ministre Puig Molto. Aucun de ses 8 enfants n’est le descendant de Francisco de Asis, son mari, et pour cause !! Elle l’a reconnu et chaque enfant savait qui était son père. Il existe au Ministère des Affaires étrangères de Madrid une grande table ronde sur laquelle a été conçu un petit bâtard royal. Ces « légitimés » sont devenus légitimistes. Belle carrière. Catherine Salvisberg samedi 20 juin 2015
Il est probable en effet qu’Alphonse XII fût le fils d’Enrique Puigmolto, favori et amant de la reine Isabelle II. Il n’en demeure pas moins qu’au regard du droit il est le fils (présumé) de Francisco de Asis de Borbon, duc de Cadix et roi consort d’Espagne (1822-1902). A ce titre, Alphonse XII n’était pas un bâtard et n’avait pas à être légitimé. Disons que, probablement, Alphonse XII et sa descendance (avec notamment Alphonse XIII, Juan-Carlos Ier ou Louis-Alphonse) sont, en ligne paternelle, aussi Bourbon que la descendance de la Grande Catherine est Romanov. Au passage, rappelons que la querelle dynastique a existé en Espagne avant d’exister en France. A la mort du roi Ferdinand VII en 1833, il n’était pas du tout évident que sa très jeune fille Isabelle II fût légitimement appelée à ceindre la couronne d’Espagne… notamment parce que la loi de succession avait été changée – pour permettre aux infantes de succéder – sans l’aval des Cortès dûment mandatées à cet effet. C’est pourquoi, à la mort de Ferdinand VII, l’Espagne traditionnelle et traditionaliste reconnut pour roi le frère du défunt souverain : Don Carlos, comte de Molina (1788-1855), et se souleva contre le gouvernement d’Isabelle II et de sa mère la reine-régente Maria Cristina. S’en suivit une terrible guerre civile entre carlistes et cristinistes. Ces derniers étaient d’ailleurs soutenus par les puissances européennes libérales : l’Angleterre et la France de Louis-Philippe. Cette guerre connut plusieurs répliques, notamment après la révolution de 1868 qui chassa Isabelle II et déboucha laborieusement sur l’instauration de la première République espagnole (1873-1874). Entretemps, Don Carlos, duc de Madrid (petit-fils du comte de Molina et neveu par alliance d’Henri V, comte de Chambord) avait relevé l’étendard du carlisme et s’était solidement établi en Navarre. Ce furent les armées d’Alphonse XII, auxquels les notables libéraux s’étaient ralliés (Canovas del Castillo et Sagasta) qui délogèrent les carlistes et leur prince de la Vendée navarraise. Où l’on voit que les ancêtres de Louis-Alphonse n’ont rien à envier à notre Louis-Philippe national en terme de libéralisme (réel ou supposé) ou en terme de rébellion contre la légitimité. C’est la raison pour laquelle les légitimistes espagnols que sont les carlistes furent placés dans un dilemme tout à fait semblable au nôtre lorsque la branche carliste vint à s’éteindre avec la mort de Don Alfonso-Carlos, duc de San Jaime (et frère du duc de Madrid) en 1936. D’aucuns se rallièrent à Alphonse XIII, chef de l’ex branche cadette devenue aînée à la mort de leur prince. D’autres reconnurent comme régent puis comme roi de droit le prince Xavier de Bourbon-Parme. D’autres allèrent chercher un descendant du duc de Madrid par les femmes. Evidemment, on avança le libéralisme des princes « isabello-alphonsins » et l’on fit valoir l’hypothèse (ou l’hypothèque ?) Puigmolto. Certains Blancs d’Espagne aiment également à oublier que, de notre côté des Pyrénées, leurs peu nombreux devanciers, sincèrement attachés aux princes carlistes, furent loin d’être unanimes pour se rallier à Alphonse XIII en 1936… Certains barons d’Empire préfèrent passer outre… ou insulter les princes de Bourbon-Parme qui apparurent à certains comme leurs nouveaux champions. L’affaire était loin d’être anecdotique. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le « prince d’Espagne » désigné successeur du général Franco en 1969 changea de prénom. Juan (surnommé « Juanito » pour le distinguer de son père Don Juan, comte de Barcelone et prétendant au trône) devint Juan-Carlos Ier. Etant donné qu’il s’agissait de rallier et de réconcilier carlistes et alphonsistes sous la bannière du régime franquiste, il ne pouvait y avoir de roi Jean, puisqu’il en aurait résulté un épineux problème de numérotation (il y avait eu un prétendant carliste sous le nom de Jean III : le père du duc de Madrid). Il semble d’ailleurs que très peu de carlistes avaient reporté leur fidélité sur Don Jaime, duc de Ségovie (et grand père de Louis-Alphonse). Don Jaime avait en effet renoncé à ses droits à la couronne d’Espagne en 1933. Et ce au profit de son frère Don Juan, comte de Barcelone. Certes, c’était sous la pression de son père Alphonse XIII. Certes, c’était en exil, puisque la deuxième République espagnole avait été instaurée en 1931. C’est la raison pour laquelle Don Jaime, plus ou moins bien conseillé par un entourage assez discutable, revint plusieurs fois sur ses renonciations. Il n’en demeure pas moins qu’entretemps le même duc de Ségovie avait contracté un mariage non dynaste – puisque la loi de succession espagnole exigeait une épouse issue d’une famille royale. C’est la raison pour laquelle les deux fils de Don Jaime : Alfonso (le père de Louis-Alphonse) et Gonzalo ne pouvaient pas, sérieusement, griller la priorité à un prince qui était lui incontestablement dynaste (si l’on ramène l’hypothèque Puigmolto à ses justes proportions), à savoir Juan-Carlos, fils du comte de Barcelone et de son épouse Maria de las Mercedes de Borbon y Orléans (dont le grand-père maternel était Philippe VII, comte de Paris). Certes, on trouva des partisans de Don Alfonso au sein de la Phalange, et au sein de la famille du Caudillo : son épouse et son gendre… puisque Don Alfonso avait épousé la petite-fille du généralissime (en 1972). Il semble bien que Franco n’a jamais envisagé l’hypothèse Don Alfonso : ni avant la désignation de Juan-Carlos en 1969, ni a fortiori après. On pourrait conclure comme suit : lorsqu’on va chercher ses princes en Espagne, il vaut mieux s’intéresser aussi à leur histoire. Elle est passionnante. Elle est éclairante. Elle est la leur. Elle n’est pas la nôtre. Saint-Priest lundi 22 juin 2015
Brillante démonstration. Félicitations à Pierre de Meuse. Mais il est à craindre que les blancs d’Espagne , qui ignorent les fondements du politique et ont tendance à arranger l’histoire à leur convenance restent prisonniers de leurs rancoeurs cultivées dans certaines vieilles familles qui mettent un point d’honneur à ressembler aux caricatures que l’on fait d’elles. Olivier Perceval 01 juin 2015
Bravo, Pierre de Meuse : voici résumées en quelques lignes brillantes et claires, l’évidence des ridicules prétentions de l’espagnolade… Pierre Builly lundi 01 juin 2015
Merci à Mr Pierre de Meuse pour ce rappel de faits historiques éclairants. Le marketing « people » soudain autour de Louis de Bourbon, à l’occasion de l’une de ses visites ponctuelles est en effet assez déplaisant. Il y a en France une famille royale et un prince, Jean, duc de Vendôme. Qu’ajouter ? renaud lundi 01 juin 2015
Une famille royale » française » qui a voté la mort du roi Louis XVI (et Qui avait pris le nom de Philippe EGALITE °….. en effet…. jf mardi 02 juin 2015
Ce n’est pas la famille d’Orléans qui a voté la mort du roi Louis XVI. C’est Louis-Philippe-Joseph, duc d’Orléans (dit « Philippe-Egalité ») et lui seul. Ses trois fils, au premier rang desquels le futur Louis-Philippe Ier, n’ont été en rien associés au vote de leur père. En décembre 1792, ils tentèrent de le dissuader de participer au procès du roi. En vain. Saint-Priest jeudi 18 juin 2015
Tant qu’il restera des descendants dans la branche ainée de la derniere famille régnante ce ceux la qui sont appelés a régner en France, les cadets passent apres. Vous n’y pouvez rien à moins de contester les lois fondamentales qui reglent la dévolution de la couronne. sequane mardi 02 juin 2015
Sans doute ni le Comte de Chambord, ni Louis XV n’étaient au courant. Antiquus mercredi 03 juin 2015
Et dans les « lois fondamentales du Royaume », le caractère « étranger » du prétendu prétendant ne l’emporte-t-il pas sur de prétendues priorités dynastiques douteuses et archaïques ? Si nous voulons un Roi, ce n’est pas parce qu’il sera, ou serait, « légitime » : c’est pour qu’il mette fin à la République ! La prétendue légitimité des Bourbons d’Espagne n’a commencé à se faire une petite, ô toute petite place (on n’a jamais vu des pseudos-légitimistes distribuer des tracts, vendre des journaux, coller des affiches, affronter les marxistes) dans le monde royco parce que le Comte de paris Henri VI, par ses prises de position, avait mécontenté quelques extrêmistes. Et de ces fait, ces gandins providentialistes ont « choisi » leur prétendant et rejoint quelques débris moisis qui survivaient incompréhensiblement… De toute façon, avant de se qureller sur l’évidence, faudrait déjà prendre le Pouvoir. Et ça, c’est pas demain ! Pierre Builly mercredi 03 juin 2015
Alors comment expliquer que le prédicat officiel de premier prince du sang, passé des Condé aux Orléans, n’ait jamais échu aux Bourbons d’Espagne ? Comment expliquer que, sous Louis XV, Louis XVI, Louis XVIII et Charles X, chacun des ducs d’Orléans, du fils du Régent jusqu’à Louis-Philippe, ait été reconnu officiellement premier prince du sang ? Je rappelle que le premier prince du sang est le premier prince dynaste après les fils et petits-fils de France. Si, de Louis XV à Charles X, les Bourbons d’Espagne avaient été regardés comme dynastes dans notre pays, l’infant Philippe-Antoine, duc de Calabre (1747-1777) aurait succédé à Louis Ier duc d’Orléans (1703-1752) comme premier prince du sang. Et après le duc de Calabre, son frère le futur roi Charles IV d’Espagne. Or il n’en a rien été. Nos derniers rois et les institutions de l’Ancienne France puis de la Restauration ont sauté à pieds joints par-dessus la prolifique descendance de Philippe V : les membres de cette dernière n’étaient plus dynastes en France. Du moins pour la jurisprudence de nos derniers rois et de notre Monarchie ancienne puis restaurée. Excusez du peu ! Saint-Priest vendredi 19 juin 2015
La Querelle dynastique est le cancer de la cause royaliste française. Il est navrant de voir avec quelle gourmandise certains en propagent les métastases. Catoneo 3 juin 2015
Il n’a été opposé à l’analyse de Pierre de Meuse ni arguments sérieux, ni démonstrations. Seulement des affirmations sans preuves et des imprécations. Il est certain que ce qui reste de la querelle dynastique affaiblit la cause monarchique. Certain aussi que les partisans de Louis de Bourbon – qui n’est fondé ni à prétendre ni à agir politiquement en France, si ce n’est, éventuellement, dans le cadre de commémorations historiques – nuisent à la crédibilité du royalisme français. Néanmoins, ils sont là, avec leur prince d’ailleurs, et, pour parler trivialement, il faut bien « faire avec ». Inutile de geindre sur ce cancer et ses métastases. Il y a toujours eu quelques cercles dits « légitimistes » en France. Mais ce sont les maurrassiens, l’Action française et les princes d’Orléans, tantôt ensemble, tantôt séparés, qui ont véritablement réfléchi, agi, milité, parfois tenté , en faveur de la monarchie. Les « espagnols » n’ont jamais compté autrement que par leur effet de nuisance. Sur ce que peut être l’avenir du royalisme français, nous ne savons rien, si ce n’est l’extrême décrépitude, le profond discrédit, le ridicule même, dont est frappé aujourd’hui le régime en place. Personne ne pensait aux alentours de 1790, et même au delà, que la vieille monarchie s’effondrerait sous très peu de temps, encore moins que quinze ans plus tard, après une horrible Révolution, elle se donnerait un empereur corse. Et ma génération n’aurait pas cru dans les années 80 (1980 !) celui qui lui aurait annoncé que l’Union Soviétique imploserait, elle et ses satellites, dix ans plus tard. Qu’est-ce qui pourrait bien succéder à l’actuel régime s’il venait à s’écrouler ? C’est une autre inconnue. Il me semble que c’est une raison suffisante pour maintenir et diffuser aussi largement que possible les idées qui nous rassemblent. Par exemple et entre autres, ici, sur ce site bien utile … Anatole – mercredi 03 juin 2015
Mille mercis à Pierre de Meuse pour la clarté et la pénétration de sa mise au point. En effet, les prétentions espagnoles-toutes émotionnelles et infondées qu’elles soient, sont occasionnelles tout autant qu’imaginatives, et ne datent que de 1940,après que le malheureux sourd-muet qu’était le fils aîné du roi Alphonse XIII,aient renoncé pour lui et sa descendance à ses droits sur la couronne d’Espagne. En dépit de la sympathie que l’on puisse éventuellement nourrir à l’endroit de tel ou tel membre de cette descendance bourbonienne,il faut posément reconnaître que leur imaginaire dynastique nuit beaucoup à l’unité, à la cohérence et à l’efficacité du royalisme français,- qui n’appartient qu’aux Français eux-mêmes,et non à des princes étrangers. De surcroît,ces illusoires prétentions étrangères se font les complices objectifs des ennemis de la France et de son passé,ainsi que des cinq républiques qui se sont attachées-avec leurs divisions existentielles-à déconstruire ce que nos rois capétiens avaient mis tant de siècles à construire pour l’avenir du pays et des Français. Une telle situation n’est ni »tordante »ni « désopilante »,elle est attristante et même menaçante pour notre pays et ses enfants.Notre avenir ne peut être conditionné à des supputations d’origine essentiellement émotives.. Patrick Haizet – mercredi 03 juin 2015
Selon un sondage YouGouv publié sur le Huff, 72% des Français n’ont plus confiance en leur démocratie ! 72% c’est énorme ! http://www.huffingtonpost.fr/2015/06/04/thermometre-crise-au-pouvoir-72-francais-confiance-democratie_n_7505284.html Pendant ce temps les royalistes se déchirent pour des vieilleries. Il ne leur est jamais venu à l’esprit que la monarchie puisse revenir sans eux en France. Et pourtant ce serait la voie la plus facile. Après tout le royaume s’est effondré sur lui-même et sa ruine a emporté ses Lois, mais la nation demeure qui peut changer de paradigme sans se prendre la tête… D’aucuns y ont pensé. Catoneo – jeudi 04 juin 2015
« Les royalistes se déchirent pour des vieilleries », écrivez-vous, Cattonéo. Je suis substantiellement d’accord avec le reste de votre message, mais je crois qu’il ne faut pas attacher d’importance aux prétendus « Légitimistes », partisans des Espagnols. 98% des monarchistes français – ceux qui bougent, qui luttent, qui militent – n’ont aucun état d’âme sur la parfaite légitimité, depuis 1884, des princes d’Orléans. Pierre Builly – jeudi 04 juin 2015
Ce sont les 50 prochaines années de ce magnifique pays qui doivent nous angoisser plus que les foutaises d’Utrecht et la préséance d’héritiers de deux royaumes effondrés sous leur propre poids. S’il a fallu des guerres étrangères pour plier les deux empires, il ne fut besoin de rien de tel pour laisser aller les couronnes au ruisseau. La monarchie est la solution du renouveau français pour beaucoup et de plus en plus. Ceux qui vont s’y atteler ne s’encombreront pas des scories stériles du passé, pas plus que des revendications de branches dynastiques battues, qui leur paraîtront « osées ». On part sur du neuf. Catoneo – jeudi 04 juin 2015
Pierre Builly a raison : en définitive, les partisans des princes espagnols n’ont guère qu’une seule importance : celle que nous-mêmes leur accordons. Que nous seuls ou presque seuls leur accordons. Sans nous, ils ne sont rien, ou presque. Même si l’on ne peut pas leur laisser tout faire et tout dire, un peu de distance s’impose ! LUC – jeudi 04 juin 2015
Ce qu’écrit Catoneo est brillant mais seulement brillant et se termine par une proposition qui, selon moi, n’a pas de sens. Si l’on préfère, c’est une proposition illusoire : on ne part jamais sur du neuf, l’Histoire ne s’oublie jamais et son poids sur le présent et l’avenir ne s’annule jamais non plus. Ni les capétiens, ni la République, ni l’Empire ne sont des commencements absolus. Et mille ans de règne capétien pèseront toujours sur quiconque voudra remettre la France sur sa trajectoire historique qui donne forme et réalité à son identité. A mon avis, l’idée monarchique s’incarne nécessairement. Elle ne peut être sans visage, Ni en avoir plusieurs. Sans quoi, elle se dégrade en pure et simple en idéologie. Pour les raisons qu’expose Pierre de Meuse, avec lesquelles je suis d’accord, les princes d’Orléans me paraissent actuellement les seuls légitimes pour réaliser cette incarnation. Peut-il surgir une dynastie nouvelle ? Il ne faut pas l’exclure mais l’hypothèse est vaine tant qu’elle ne se manifeste pas. Si elle se manifestait, prenait corps, agissait, nous serions assez grands garçons pour juger de ce que nous aurions à faire. Mais même dans un tel cas, si ce « nouveau » pouvoir entendait assumer et conduire le destin de la France et s’en révélait capable, ce ne serait pas indépendamment de son Histoire. Et, pour l’essentiel, ce ne serait pas indépendamment de l’héritage capétien. Cette hypothèse étant pour l’instant sans réalité, les princes d’Orléans, pour moi, sont nos Princes. Anatole – jeudi 04 juin 2015
L’histoire de France est toujours repartie sur du neuf. Elle est faite de ruptures. Vous la connaissez assez bien pour qu’on ne fasse pas une page sur ce sujet, en commençant par la tonsure de Childéric III. Les rois de France ont eu cette particularité de toujours tirer le char par eux-mêmes. Sauf le dernier qui préféra l’érudition et la chasse, il en mourut. La suite fut une politique de bouchon de liège au fil de l’eau ; on subissait les révolutions de tous ordres, on n’en conduisit aucune. La race était épuisée après les trois Bourbons comme il en fut des trois Valois qu’ils supplantèrent. Orléans ne fit qu’une brève apparition dans la même veine. Aujourd’hui les princes vivants libres de tout pouvoir sont déjà dans l’adaptation politique, dans la correction des moeurs, l’infléchissement des trajectoires quand il leur arrive si rarement d’en parler. En situation de pouvoir, aucun ne créera ex-nihilo le projet qui rénovera le pays, car ils n’en ont pas les capacités intellectuelles et mentales requises, sans parler de la résilience exceptionnelle du titulaire qu’exigera une restauration. Il n’y a pas de chef ! Pour marquer le coup, je dirais qu’il n’y a aucun Poutine dans aucune famille prétendante. Anatole, vous ne pouvez incarner l’idée monarchique avec des « employés ». Le « Chef » peut, lui, surgir de n’importe où. Catoneo – jeudi 04 juin 2015
Poutine a, en effet, la trempe d’un chef et les vues assez larges, l’intelligence politique assez aiguë pour diriger son pays comme il l’a toujours été, c’est à dire de façon autoritaire. Mais sa politique n’est rien d’autre que l’impérialisme tsariste séculaire. Il est davantage une continuité qu’une rupture. Poutine mène et incarne une politique pérenne mais son régime ne l’est pas, n’est pas, si je puis dire, institutionnalisé. Je me demande si au fond les régimes dynastiques ne sont pas les seuls à être des institutions véritables, c’est à dire, par nature, capables de pérennité. En quoi la réalité du Roi transcende toujours celle du Chef. En bref, je ne crois en Histoire, en politique et sans-doute en rien à aucune création ex nihilo, en quoi je diverge absolument de votre conception a-historique du politique. Dans cet ordre, qui concerne des sociétés historiques, on ne repart jamais sur du neuf. A fortiori s’agissant d’un pays qui a conscience d’exister en tant que tel depuis au moins dix ou quinze siècles.. Vous attendez un Poutine. Et je suppose un Poutine à la française fondateur de dynastie ? Je dis que cela peut « surgir » mais ne peut être invoqué sans que ce surgissement soit intervenu, s’il intervient … Je maintiens donc, hic et nunc, mon royalisme traditionnel, avec ses princes, tels qu’ils sont, auxquels, contrairement à vous, je trouve bien du mérite à maintenir la tradition qu’ils incarnent. Anatole – vendredi 05 juin 2015
Citer Poutine m’évitait de faire tout un paragraphe sur la question des niveaux. Il n’est pas ma tasse de thé, La Faute à Rousseau le sait bien ! Pour le reste, restons en « la » comme on dit à l’orchestre. Catoneo – vendredi 05 juin 2015
Juste une précision à propos d « un mot qu’emploie Catoneo : « La race était épuisée après les trois Bourbons comme il en fut des trois Valois qu’ils supplantèrent. » Les Bourbons n’ont pas « supplanté » les Valois, qui se sont éteints avec Henri III comme les « Capétiens directs » se sont éteints avec Charles IV. Après l’assassinat d’Henri III de France, dernier des Valois, c’est son très lointain cousin – et allié… – l’autre Henri III (Henri III de Navarre) qui devint Henri IV, mais sans supplanter personne, puisqu’il n’y avait… plus personne ! François Davin – vendredi 05 juin 2015
Merci à Pierre de Meuse de sa mise au point frappée du bons sens, nourrie de connaissances historiques mises en perspective. Ce n’est pas la famille d’Orléans, qui a voté la mort du Roi, Louis Philippe s’est même brouillé avec son père à cette occasion, c ‘est une défaillance du Duc d’Orléans., qui s’en est repenti avant de mourir , lui qui à l’époque ne pouvait prétendre à rien . L’esprit de revanche des républicains nous a couté très cher, 70 et le reste, qu’il ne contamine pas la famille de France et ses soutiens à l’heure où le régime tourne à vide. Plus que jamais nous avons besoin de » Politique ». Henri – vendredi 19 juin 2015
Précisément. Le néo-légitimisme est en bonne part le fruit d’un rejet du politique. L’un de ses plus brillants avocats, Stéphane Rials, avait qualifié le néo-légitimisme de démarche écologique ou patrimoniale. C’est même ainsi qu’il conclut son Que sais-je? sur le légitimisme : « Le but de ceux qui s’en réclament n’est probablement pas, à terme humain, la restauration monarchique [aveu de taille !]. Plus modestement, ils semblent soucieux de sauvegarder tout un pan de la mémoire nationale. A leur façon, ces blancs sont des verts, couleur qui ne saurait d’ailleurs leur déplaire [allusion aux couleurs du comte d’Artois ?], des écologistes, des écologistes de la tradition. » Stéphane Rials, Le Légitimisme, PUF, collection Que sais-je?, 1983, p. 121. C’est clair : il s’agit d’une sortie pure et simple du politique. La restauration monarchique est renvoyée aux calendes grecques. Et l’on en prend son parti. Pire. On en est presque soulagé. Le programme de ce royalisme-là, c’est la République à perpétuité, et le doux plaisir d’évoquer entre soi le temps jadis et la royauté qui ne reviendra pas. Ce sont des royalistes pratiquants… mais non croyants ! Et encore… La pratique se réduit aux messes du 21 janvier, aux galettes des rois et aux conférences de quelques sociétés savantes. Ce royalisme-là meurt. Ne troublez pas son agonie. Ill ne surnage et ne surnagera de tout ça que la répulsion à l’endroit des princes d’Orléans. Derrière le rejet des princes d’Orléans, il y a le rejet du politique. Le rejet de la politique comme souci, pour reprendre la formule de Boutang. Cette tendance était déjà latente dans le monde légitimiste du XIXe siècle. Nombre de royalistes ont enterré leurs espérances avec le noble prince qu’était le comte de Chambord. Le libéralisme réel ou supposé des princes d’Orléans de ce temps (1883) les y a puissamment aidés. Il faut le dire. D’où le désespoir politique pur et simple. D’où les rêveries survivantistes. D’où le ralliement au noble Don Carlos (celui du roman de Pierre Benoit). Ralliement qui embarrassait passablement ce dernier, qui était probablement le légitime successeur à la couronne d’Espagne (contre les ancêtres de Louis-Alphonse). En ce sens, il est inexact de faire remonter les Blancs d’Espagne aux prétentions françaises du duc de Ségovie (grand-père de Louis-Alphonse). Elles remontent à la mort du comte de Chambord (1883). Don Carlos fut (en France) un prétendant intermittent. Après lui son fils, puis frère, pareillement. Et la petite cohorte des Blancs d’Espagne s’étiola progressivement. Pendant ce temps, la grande majorité des légitimistes – du moins ceux qui, avant la lettre, considéraient que le désespoir en politique est une sottise absolue – s’étaient ralliés au comte de Paris de ce temps-là (1838-1894). Parmi eux, on comptait le comte de Mun (qui certes se rallia à la République à l’invitation du pape Léon XIII) et René de La Tour du Pin. Avec le pionnier du catholicisme social, ce royalisme-là (les Blancs d’Eu raillés par leurs adversaires) n’avait rien de l’orléanisme des banquiers de Juillet. Ce légitimisme-là – le légitimisme politique et social (pas le légitimisme mondain ou crépusculaire) – se reconnut dans le royalisme de Charles Maurras et de l’Action française. Ce dernier renouvelait le corpus doctrinal, et s’adressait aux intelligences plus qu’aux fidélités. Pour les intelligences humaines, pour les hommes de bonne volonté, la monarchie capétienne devenait à nouveau crédible. Contrairement à ce que l’on a trop souvent écrit, elle ne détruisait pas le royalisme de fidélité, elle lui offrait au contraire une apologétique. Lorsque le deuxième comte de Paris (1908-1999) fit le choix de la rupture avec l’Action française (1937), il se libéra sans doute (ce qui était compréhensible) des lisières qu’on voulait continuer à lui imposer. Il désorienta surtout les meilleurs de ses fidèles. Et le prince ouvrit à terme la voie à un improbable retour des Blancs d’Espagne. Combien d’entre les fidèles du duc de Ségovie ou du duc de Cadix furent en effet (avant tout ?) des déçus du comte de Paris, bien plus que des héritiers d’une réelle continuité politique depuis Don Carlos ? On pourrait citer des noms. Les querelles dynastiques qui minent le petit monde royaliste, mais aussi et surtout la cause monarchique, ont pour cause non seulement les pathologies d’un royalisme a-politique, mais aussi (il ne faut pas le cacher) les orientations aventureuses prises en son temps par un prince légitime. Saint-Priest – lundi 22 juin 2015
Les derniers commentaires ajoutés à ce débat m’ont intéressé. Spécialement ceux d’Henri et Saint-Priest qui connaissent la question. Il se confirme en effet que les partisans des princes espagnols ignorent presque totalement l’histoire des Bourbons d’Espagne. Le débat serait dérisoire – comme le pense Catoneo – si – comme le pense Anatole – l’idée monarchique n’avait pas un besoin absolu d’incarnation. Ce qui suppose de trancher la question en matière dynastique. Bernard Jaquier – vendredi 19 juin 2015
Chacun peut préférer son candidat au trône de France. puisqu’ils sont deux princes compétents, désireux de servir, honorables tous deux et, je crois, dignes de respect. L’essentiel est de proposer, sans querelles entre royalistes, l’idéal d’une démocratie ayant à sa tête un prince revêtu de la « légitimité historique », essentiellement symbolique, unificatrice d’un peuple divers.. L’actuel Roi d’Espagne peut servir d’exemple: il écoute les différentes composantes d’un peuple soumis à bien des défis centrifuges, il se réjouit avec ceux qui se réjouissent, montre son empathie avec ceux qui sont dans la peine, soutient les efforts, rappelle l’autorité de la loi lorsque celle-ci risque d’être violée et l’unité nationale rompue….Il travaille en faveur de l’unité d’un peuple dont la réconciliation est inachevée…Il mérite le respect de tous…
En France, la question de l’éventualité du retour du Roi se posera nécessairement un jour, peut-être plus vite qu’on ne le pense…Car il y va de notre identité profonde cassée le 21 janvier 1793 d’une manière si cruelle et dont nous ne cessons de subir depuis les conséquences douloureuses.en tant que peuple enraciné dans une longue histoire. En attendant, il est souhaitable que la bonne entente entre les deux héritiers soit vécue sans arrière pensée…et le jour viendra pour le peuple de se prononcer sur le nom de celui qui recevra la haute charge de renouer le fil rompu de notre identité nationale.
J’ai lu attentivement ces commentaires impressionnants. C’est une somme. Bravo à tous ces intervenants qui, presque tous, n’écrivent pas pour ne rien dire et savent de quoi ils parlent. Félicitations pour le sérieux de ce site.