par Théophane Le Méné
Alors que rebondit la polémique sur la sextape de Mathieu Valbuena, Théophane Le Méné déplore, dans Le Figaro, l’exemple que Karim Benzema donne aux jeunes générations qui l’admirent. Les sportifs auront leur avis. Passeront-ils sur le très vilain langage de Benzema, à cause de ses qualités de footballeur ? Sur le fond, bien-sûr, Théophane Le Méné a raison. LFAR
Il y a l’Histoire de France, il y a le Collège de France, il y a l’Institut de France. Et puis il y a l’équipe de France. Celle de football. La même qui nous offrit l’affligeant spectacle d’une mutinerie à Knysna ; la même qui nous servit avec une verve flamboyante un échange pour le moins pathétique entre un joueur et le sélectionneur – le premier enjoignait au second d’aller se faire voir chez les Grecs avant de le qualifier de progéniture de péripatéticienne, le tout dans un langage moins soutenu. La même toujours, qui nous fait régulièrement don d’envolées lyriques à la syntaxe étonnante. Nos anciens se plaisaient à consigner le génie des arts et des lettres, voici ce que la postérité ensilera comme un signe du déclin de notre temps : « J’ai couru jusqu’ à quand ce que je pouvais / On est des joueurs qu’on va vite avec le ballon / C’est vrai qu’on vient de jouer contre une équipe qui sont vraiment très forte / J’espère que la routourne va tourner ».
Ce qu’on aimait chez les forbans d’antan, c’était leur gouaille. À les écouter, on se préférait philologue à magistrat. Génie de l’invective, argot de rue confinant à la délicatesse, les dialogues de Michel Audiard témoignent d’une époque définitivement révolue. D’une époque, d’ailleurs, où le mot sextape n’existait pas. D’une époque où le joueur Mathieu Valbuena n’aurait pu filmer ses ébats. D’une époque où, en définitive, il n’aurait pas eu à négocier avec un Karim Benzema dont la principale turpitude, si l’on fait fi de l’odieux chantage qu’il aurait tenté d’exercer, réside dans le langage. Florilège: « Si tu veux que la vidéo elle soit détruite, mon ami, il vient te voir à Lyon / Moi je vais t’arranger la sauce. Faut que tu vas voir le mec (sic) / La vidéo, je l’ai vue il y a une semaine, avant de venir ». Beau tercet s’il en est, dans lequel on retrouve dislocations à gauche (ajout d’un pronom personnel juste après un sujet dans une phrase, figure de style favorite de François Hollande) et faute de temps. Mais surtout faute de goût.
Certes, on trouvera des symétries entre une vidéo aux dialogues apriori bestiaux et les propos de l’attaquant madrilène. Certes d’aucuns diront qu’après tout à chacun sa spécialité et que les écrivains et les journalistes feraient sans doute moins les malins sur un terrain de football. Mais le langage est tout. Au cœur des interactions sociales, partie intégrante des représentations collectives, on ne saurait concevoir l’homme ni même la société sans le langage. Voulons-nous une société aussi pauvre qu’un tel langage, lorsque l’on sait que c’est précisément par la langue que l’homme assimile la culture, la perpétue et la transforme ? Souhaitons-nous que le langage reste un outil de domination de telle façon que hors de sa classe, chaque homme restera prisonnier de son langage ? Ou bien parviendra-t-on un jour à réconcilier langue, éthique et esthétique ? C’est à se demander. Car la France, du moins ses gouvernants, ils semblent s’en foutre royalement. •
Théophane Le Méné, journaliste
Que dire ce sont les mêmes, et toujours et encore les mêmes …..ces racailles
qui pourrissent la vie de l’occident.
Et en particulier de la France….
Vite …..vite……..un retour dans leurs bleds à ces crapules….!