83 % des « jeunes » n’ont pas confiance en la politique
Une réflexion de Claude Bourrinet, dans Boulevard Voltaire, sous le titre « Une jeunesse rongée par le doute »
Un sondage du cercle de réflexion « Vers le haut » nous apprend que 83 % des « jeunes » n’ont pas confiance en la politique, qu’ils ne se sentent ni représentés, ni défendus, que les trois-quarts d’entre eux trouvent qu’ils n’ont pas accès aux responsabilités politiques, et qu’un sur deux pense qu »il est plus facile de réussir à l’étranger qu’en France.
Au-delà du constat de démoralisation qu’une telle évaluation des moins de 26 ans révèle, et qui n’est guère une surprise lorsqu’on prend en compte l’état catastrophique dans lequel l’irresponsabilité des dirigeants ont mis le pays depuis une quarantaine d’années, il semble opportun de prendre un peu de hauteur, et de ne pas s’arrêter à la pure information. Les mots sont pipés, en effet. Il est pour le moins aventureux par exemple d’étudier génériquement un échantillon de la population uniquement délimité par un critère générationnel, fraction qui revêt pourtant une grande variété de réalités, tant sociales que communautaires, sans omettre l’atomisation extrême du corps social. De quels jeunes parle-t-on ? D’autant plus que la « jeunesse » est une création toute récente du marché, produite par la société de consommation et de loisir. Jadis, la « jeunesse » n’était que l’antichambre de l’âge mûr, une période, de surcroît, beaucoup moins longue que maintenant. Elle ne prétendait pas à des responsabilités, qui supposent un sens des réalités et quelque chose à perdre autre que sa vie, par exemple une famille ou un patrimoine.
À supposer qu’on sache, de science sûre, que l’on réussit beaucoup mieux à l’étranger (lequel ?) qu’en France, et dans quelles conditions, il paraît beaucoup plus paradoxal de considérer que la « jeunesse » ne soit pas entendue, au moins par des discours politiques, parfois dans les actes, au moment même où, comme l’enfant-roi, elle est le thème de tous les propos, souvent démagogiques, du pouvoir. Il est vrai que les « djeun’s » en cachent d’autres. Mais il est étrange qu’une société libérale dont le marché, comme le cinéma et les spectacles, sont de facture « jeune », génère une impression de vide aussi marquée.
Si l’on oublie donc la rhétorique et la vacuité de ce sondage, on retiendra le symptôme. Il est évident que notre époque, si mirifique quant à ses promesses de bonheur, est rongée par le doute et le nihilisme. La « jeunesse », dans son acception la plus saine, essaie de traduire son scepticisme par des messages d’amertume. Il y a, bien sûr, le problème du sous-emploi, qui est comme une épée de Damoclès pendue au-dessus de son avenir. Mais il existe aussi, chez elle, une neurasthénie profonde, une détresse existentielle et spirituelle inquiétante, qui demande des réponses plus substantielles que la simple politique politicienne.
Oisive jeunesse
À tout asservie,
Par délicatesse
J’ai perdu ma vie.
Ah! que le temps vienne
Où les cœurs s’éprennent. (Rimbaud) •
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