Palerme, Sicile
Un point de vue original et juste de Camille Pascal
Pour l’essentiel, Camille Pascal établit par l’exemple une comparaison entre la France et l’Italie, à l’avantage de cette dernière : « L’Italie, toute République qu’elle soit, sait d’où elle vient. ». L’explication est selon nous très claire : la République italienne naît presque immédiatement après la seconde guerre mondiale, comme une suite de la défaite de l’Italie, conduite par Mussolini et la dynastie des Savoie. Elle ne procède pas d’une révolution et n’a avec la Révolution française que des liens indirects. Elle ne se bâtit pas en rupture avec l’Histoire de l’Italie, elle ne pratique pas la table rase, elle ne renie pas ses racines C’est ce qui la différencie d’avec la République française qui se tient toujours, en définitive, dans le droit fil de la Révolution française, de l’idéologie qui la fonde et, sous diverses formes, du jacobinisme et de la Terreur. Sa radicalité ne s’est jamais vraiment éteinte. Et la France continue, si l’on peut dire, d’en porter la croix. LFAR
La réplique scrupuleuse d’un chef-d’oeuvre du Caravage a retrouvé la place de l’original, probablement vandalisé puis détruit.
L’événement est passé quasiment inaperçu en France mais il a eu un retentissement considérable en Italie et dans le monde de l’art. Le 12 décembre dernier, à Palerme, la Nativité avec saint François et saint Laurent, du Caravage, a retrouvé le délicieux oratoire de San Lorenzo et son cadre de stucs insensés, sculpté par le grand Serpotta à l’extrême fin du XVIIe siècle.
Le tableau avait été peint par le maître au lendemain de sa fuite des geôles de l’ordre de Malte, soit un an avant qu’il ne soit retrouvé mort sur une plage de Toscane, dans des conditions déjà pasoliniennes. Malgré la présence à l’arrière-plan de l’ange et de saint François d’Assise en prière, cette Nativité reste d’un très grand réalisme caravagesque.
Saint Joseph est représenté avec la jeunesse que lui donnent les Écritures mais que lui refuse le plus souvent l’iconographie traditionnelle ; tournant le dos au spectateur, vêtu d’un pauvre manteau vert et chaussé de simples pantoufles, il semble dialoguer avec les saints apocryphes imposés par les commanditaires. La Vierge, elle, a la simplicité d’une jeune femme du peuple et regarde tristement l’Enfant Jésus posé à même le sol dans une position d’abandon, qui pourrait être celle d’un sommeil profond si elle n’annonçait pas déjà son sacrifice. La tête d’un boeuf pensif contemple cette Nativité désolée par l’obscurité du jour de la crucifixion.
Pourtant, le tableau qui était inauguré en grande pompe le 12 décembre dernier est un faux ou, plus exactement, une réplique scrupuleuse savamment reconstituée grâce à des techniques de pointe. L’original, lui, a disparu. Il a été volé sur ordre d’un mafieux et maladroitement découpé au couteau par un mauvais garçon de Naples, qui devait avoir les mêmes traits que les modèles masculins dont le Caravage aimait à faire des apôtres, des martyrs ou des Bacchus. La toile n’a jamais été retrouvée. Massacrée par les larrons chargés de ce larcin, refusée par les receleurs épouvantés et peut-être taraudés par le remords du sacrilège qu’ils avaient ordonné, elle aurait été détruite.
Les Palermitains n’ont jamais accepté cette disparition, ils ont d’abord tenté l’impossible pour retrouver l’original puis, en désespoir de cause, ils se sont donné les moyens de cette véritable résurrection de leur Nativité.
Tout fut alors fait pour que ce chef d’oeuvre du ténébrisme ait retrouvé sa place avant Noël, de façon à ce que la Sainte Famille enfin réunie pour la Nativité puisse être offerte à la contemplation des fidèles. Le président de la République italienne, Sergio Mattarella, a tenu à assister, lui-même, à cette résurrection d’un monument de l’art sacré.
L’Italie, toute République qu’elle soit, sait d’où elle vient. •
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