Un Article de Stéphane BLANCHONNET paru sur à-rebours.fr et dans L’AF2000. Et un article qui rappelle utilement les fondamentaux de la politique d’Action française. LFAR
« Oui ou non, l’institution d’une monarchie traditionnelle, héréditaire, antiparlementaire et décentralisée est-elle de salut public ? » Telle est la question fameuse posée par Maurras en 1900 à ses contemporains – et particulièrement aux nationalistes français -, dans son Enquête sur la monarchie. Ces quatre adjectifs sont un excellent moyen de résumer l’ensemble de la doctrine d’Action française.
« Traditionnelle, héréditaire ». L’unité du commandement est bonne en elle-même, – « qu’un seul soit chef, qu’un seul soit roi » selon la formule homérique -, mais elle ne suffit pas. Le dictateur, le César, sorti des urnes ou des circonstances, est un ambitieux, un individu d’exception pour le meilleur mais aussi pour le pire. Napoléon par sa grandeur et par son échec final incarne parfaitement cet écueil. À l’inverse le monarque héréditaire bénéficie d’une légitimité qui dépasse sa seule personne ; il n’a pas non plus à prendre le pouvoir, à intriguer, à séduire pour l’obtenir ; surtout il est préparé à sa tâche dès l’enfance. L’Action française n’envisage donc pas d’autre monarchie que la royauté capétienne qui a fait la France.
« Antiparlementaire et décentralisée ». Ces deux derniers adjectifs renvoient à la nécessaire remise à l’endroit des institutions politiques. « L’autorité en haut » contre l’anarchie, la culture de la division partisane et l’instabilité du parlementarisme, et « les libertés en bas », la restauration des corps intermédiaires, des « républiques sous le roi », contre le corset jacobin et l’État-administrations. Maurras veut un État fort là où il est nécessaire, c’est-à-dire dans ses missions régaliennes, et faible là où il a usurpé le rôle des autorités naturelles, celles du père de famille, de la commune, de l’Église ou du métier.
Par l’équilibre politique profondément français de cette formule de la monarchie qu’est le quadrilatère maurrassien, l’AF du début du XXème siècle a su convaincre de très nombreux nationalistes de renoncer à l’illusion d’une bonne République. Son actualité n’est pas moins grande aujourd’hui. •
Déjà, le concept de royauté antiparlementaire me choque. Le retour de la royauté sera difficilement accepté par la pays en exposant le roi à la solitude d’un pouvoir quasi absolu face à l’immensité du peuple dans toute sa diversité, diversité qui certes n’existait pas à la même échelle en 1900. Parler des autorités naturelles en les limitant strictement à celle du père de famille, de la commune, de l’Eglise ou du métier revient à ignorer que le monde a changé dramatiquement depuis le début du 19ème siècle. A mon humble avis, ce n’est pas avec des idées aussi rétrogrades que l’on favorisera la restauration d’un roi en France.
Si on entend par « antiparlementaire » une monarchie sans représentation nationale, je pense que Gilbert Claret a raison. Mais si par parlementarisme on entend le régime des partis qui revient en force aujourd’hui, alors c’est le point de vue de Gilbert Claret qui est rétrograde. Jamais le discrédit qui frappe parlementaiires, partis politiques et politiciens n’a été aussi grand dans l’opinion française.
Vous avez raison tous les deux. Malheureusement les Celtes, ces Gaulois de César devenus français par les rois Francs, veulent la liberté individuelle quant ils votent les faiseurs de lois. Aussi ils s’amusent avec ricanement a contourner les lois. Et donc il est difficile de vivre en réelle démocratie. De plus les Français contemporains ont attrapé une maladie grave, ils sont aveugles et sourds; et donc les « énarques » profitent de ruiner le pays en se gavant avec nos impôts. Pour construire un nouveau royaume de France, il faut un homme ou une femme, un souverain qui sache s’entourer de gens honnêtes et compétents. Il faut aussi des porteurs de doléances du terrain, les députés. Au point ou en est la république et le pays , le changement va se produire si vite qu’il n’y aura pas le temps de discourir sur le parlementaire nécessaire, tout de même.
C’est Georges Thiebaud qui moqueusement qualifia les quatre adjectifs maurrassiens de « quadrilatère ». Expression que Maurras assuma totalement par la suite, celons sa célèbre tactique du retournement.
Maurras considérait l’antiparlementarisme comme une condition nécessaire au salut public car écrivait-il, l’élection livrait la France à d’inavouables puissances inférieures groupées dans les comités et sous-comités électoraux qu’organisaient les loges.
Le régime des partis règne-t-il toujours un siècle après l’analyse maurrassienne ? La loge règne-t-elle toujours au sein du part ?
Si oui le raisonnement du quadrilatère mérite attention, sinon il faut le réviser.
Je me suis autorisé à vous scanner le quadrilataire maurrassien vu par Sébastien Lapaque dans le cahier d’Action française n°3, supplément au n° 2177 d’Aspect de la France du jeudi 31 janvier 1991. L’article porte le titre de La Monarchie que nous voulons.
Oui ou non I’institution d’une monarchie traditionnelle,héréditaire, antiparlementaire et décentralisée est-elle de salut public ?
La question que pose Maurras au début de son Enqûete sur la Monarchie écarte les présupposés, les sentiments et les préjugés. Elle est concise, directe et rationnelle, car. c’est sur le terrain de la raison. celui-même sur lequel se croit fondée la démocratie que le Martégal défend et batit la Monarchie.
Aujourd’hui, alors que six quarts de siècle nous séparent de la dernière expérience monarchique et que I’idée royale a été systématiquement défigurée par les républicains, nous devons défendre nos idées, retrouver ce ton maurrassien clair, dense, précis, presque socratique, qui seul imposera la monarchie face aux nuées démocratiques.
Ainsi avons nous utilisé le « quadrilatère » maurrassien (une monarchie traditionnelle, héréditaire, antiparlementaire, décentralisée) pour esquisser, en esprit puis en actes, LA MONARCHIE QUE NOUS VOULONS.
Pour commencer, il semble indispensable de rappeler que la monarchie n’a jamais été un modèle fixe, un prêt-à-porter ; elle a su au contraire s’incarner dans différentes époques selon différents registres tout en gardant I’esprit qui était le sien. C’est cette continuité à travers les changements nécessaires qui caractérise le vrai sens de la tradition qui, d’après Paul Valéry, n’est pas de refaire ce que les autres ont fait mais de retrouver I’esprit qui a fait ces choses et qui en ferait de toutes autres en d’autres temps. Ainsi, nous ne voulons pas restaurer une monarchie figée en un XVIIIe siècle oublié, mais établir ce qui est d’abord un principe, principe d’autorité, de responsabilité et l’unité, et qui saurait s’incarner dans notre propre réalité économique, politique, culturelle et sociale.
L hérédité du pouvoir est sans doute le principe qui a été le plus attaqué depuis trois siècles. Pourtant que représente-t-il réellement lorsque l’on a écarté toute la’ mythologie méritocratique ? Il apparaît que l’hérédité a ce premier avantage d’éliminer la compétition pour le pouvoir, c’est-à-dire la radicalisation des conflits d’intérêts. Elle assure ainsi un Etat fort, indépendant et arbitre capable d’entreprendre des réformes administratives, économiques et sociales ou laisser des libertés aux citoyens, sans craindre d’être toujours renversé. L’hérédité permettra à la nation d’être enfin gouvernée comme c’est le cas en république. De plus, le pouvoir étant à l’origine indépendant des forces d’argent, il peut gouverner sans, et même contre elles, et seul un roi héréditaire a pu châtier les Semblançay et les Fouquet que le régime actuel eût laissé courir. Enfin, l’hérédité assure la médiation active du peuple avec ses propres racines historiques : la nation, c’est la naissance, c’est-à-dire la reconnaissance d’une continuité historique.
La tradition et l’hérédité étant posées, on pourrait être tenté d’y ajouter une institution parlementaire censée assurer la représentation populaire. A d’autres cette demi-royauté bourgeoise et parlementaire plus décrépite encore s’il le faut s’écriait Maurras. Le parlementarisme, qui suppose l’existence de partis, est le contraire même de la monarchie qui est faite pour unir. D’ailleurs, le parlementarisme au niveau de I’Etat ne représente personne puisqu’il ne repose pas sur les réalités économiques, politiques et sociales mais sur le jeu formel des partis.
La monarchie, au contraire, chercherait une représentation du pays réel par de multiples assemblées locales, culturelles et professionnelles souveraines en leur ordre et capables de défendre les intérêts de leurs membres. Nous n’en voulons en effet absolument pas au vote. L’ancienne France votait beaucoup, précise Maurras, cela est oublié. Cela reste vrai tout de même. On y votait pour quantité d’objets pour lesquels le Français moderne reçoit avec respect le choix et les volontés des bureaux. Ce à quoi nous en voulons, c’est au système qui regroupe arbitrairement les individus en fonction de leurs opinions ou de leurs options métaphysiques dans le cadre de partis peu adaptés à la juste détermination de l’intérêt général. Et c’est pourquoi nous luttons pour la restauration d’une monarchie antiparlementaire où, les Français pourront, grâce à de multiples assemblées fédérées par un pouvoir indépendant, être représentés dans leurs intérêts tangibles et concrets, et ainsi passer du stade d’administrés abrutis et atomisés, à celui de citoyens responsables et actifs.
Nous avons parlé de représentation d’intérêts locaux ; en effet antiparlementarisme et décentralisation sont deux caractères indissolublement liés. Nous sommes antiparlementaires parce que partisans d’une renaissance des collectivités locales. Cette volonté de promouvoir les richesses et les diversités de notre pays de façon intégrale est une composante essentielle de notre nationalisme. Nous voulons laisser s’organiser le pays réel en une multitude de républiques locales, autonomes et souveraines, compénétrées les unes les autres et capables de prendre en main leur avenir. Mais ces communautés ne peuvent rester liées entre elles sans un tiers- pouvoir. Comme I’expliquait Pierre-André Taguieff (Feu-Follet N°5), dans le fédéralisme maurrassien, il doit y avoir un troisième membre qui doit être « hors-jeu » en quelque sorte. C’est la monarchie comme pouvoir transcendant, d’où la nécessité que le roi ne soit pas élu ou choisi, mais qu’il vienne d’ailleurs, qu’il soit inconditionnel. Voici posées les grandes lignes de la monarchie que nous voulons, c’est-à-dire la monarchie française adaptée à notre temps.
N’oublions pas cependant que l’objet vrai de I’Action française, ce n’est pas, à bien dire, la monarchie, ni la royauté, mais l’établissement de cette monarchie, l’acte d’instituer cette royauté . Seul notre engagement militant prouvera la possibilité d’une telle restauration, et même son imminence si elle est servie par des citoyens actifs, prêts à mourir avec joie, avec bonheur, pour notre Sire le roi de France.
Merci à Lallement pour cette transmission dont nous ne manquerons pas de faire usage.
Merci à Cédric de sa mise au point;