Lu sur le site du HuffPost Maroc [17.05]* ces quelques répliques de ce bon roi méconnu, Mohamed VI. Leur modestie, leur réalisme, leur sagesse, leur lucidité offrent un frappant contraste avec le style et le fond des déclarations systématiquement verbeuses des dirigeants occidentaux, notamment français. Le lecteur ne manquera pas de se livrer au jeu des comparaisons… LFAR
Connu pour être peu prolixe, et n’accordant que de très rares interviews, le roi Mohammed VI a, néanmoins, assené quelques réponses mémorables aux journalistes qui l’ont interviewé. Répliques cinglantes, réponses construites ou encore réflexions générales sur la vie d’un roi, retour sur les 7 meilleures de Mohammed VI.
« J’ai choisi la voie la moins spectaculaire »
Lors d’une interview accordée au Figaro, et réalisée par l’ex-directeur adjoint de la rédaction, Charles Lambroschini, le roi s’est vu demander, en 2001, d’établir le bilan de ses deux premières années de règne. Mohammed VI a répondu qu’il préférait « utiliser un autre mot que celui de bilan. Bilan, cela semble à la fois prématuré et prétentieux, tout en suggérant la fin de quelque chose ». Et de poursuivre: « j’ai délibérément choisi la voie la moins spectaculaire qui consiste à fonder mes choix sur les acquis et le socle de la continuité. Vous savez, je ne me réveille pas tous les matins en me disant: tiens, aujourd’hui, pour plaire ou pour faire la Une des journaux, je vais changer les choses. Ce serait ridicule et démagogique. Mon approche est à la fois plus pragmatique et plus réfléchie. Mon rythme est celui du Maroc. »
« Je ne suis pas candidat au Hit Parade »
Au même journaliste, qui disait que le roi donne l’impression de cultiver le mystère, Mohammed VI a rétorqué qu’ « au Maroc, on me connaît parfaitement. Les Marocains connaissent mon caractère et mes idées, ils savent absolument tout de moi ». Pour le roi, « cette notion de mystère est entretenue par une certaine presse: pour vendre, il faut mettre une étiquette. On m’a donc collé une étiquette, celle du mystère, simplement parce que j’ai décidé que, avant de parler, j’attendrais de mieux savoir. Alors, cette attitude a peut-être surpris, déçu, ceux qui attendaient ou souhaitaient une démarche plus médiatique ». « De toute façon, je ne suis pas candidat au Hit Parade ».
« Tous les Afghans ne sont pas Talibans, tous les Talibans ne sont pas Afghans »
Lors d’une interview accordée à Paris Match, en 2001, il a été demandé au roi s’il craignait « que certains, dans le monde, fassent l’amalgame entre Islam et terrorisme. »
Réponse de Mohammed VI: « tous les Afghans ne sont pas Talibans, tous les Talibans ne sont pas Afghans, tous les Afghans ne sont pas islamistes, mais ils sont tous musulmans. C’est une réalité compliquée, mais il faut qu’en Occident on accepte de comprendre et de vivre cette complexité. S’il y a un risque d’amalgame, c’est d’abord par ignorance. »
« Le trône des alaouites est sur la selle de leurs chevaux »
« Ici, on entend parfois dire que le roi n’est plus jamais à Rabat », affirmait le journaliste de Paris Match.
« Mais le Roi n’a jamais été seulement à Rabat. Je me souviens qu’une année, pendant ma jeunesse, mes parents ont séjourné dix huit jours à Rabat, sur 365. Mon père, que Dieu ait son âme, avait coutume de dire que ‘le trône des Alaouites est sur la selle de leurs chevaux’. J’ai bien l’intention de ne pas déroger à ce principe », a clarifié Mohammed VI.
« Et puis, vous savez », poursuit le roi, « j’aime bien me rendre compte par moi-même, sur le terrain, de ce que sont les réalités de mon pays. »
« Le Cheikh Yassine se plaint »
Au Figaro, le journaliste constate que « le paradoxe de la liberté, c’est qu’elle s’accompagne toujours de la critique. Vous avez permis à Cheikh Yassine, le contestataire islamique, de s’exprimer. Cela ne l’empêche pas de vous attaquer ».
Réponse de Mohammed VI: « je lui ai permis de mener la vie de tout citoyen marocain ». Le journaliste de rebondir: « en somme, le revers de votre tolérance, c’est que Cheikh Yassine proteste. » « D’avoir été libéré, peut-être ? », questionne, non sans ironie, Mohammed VI.
« La burqa est une prison »
À Paris Match, Mohammed VI a déclaré que « le sort fait aux femmes en Afghanistan est infâme et intolérable. Cette burqa qui les emprisonne est certes une prison en tissu, mais c’est plus encore une prison morale. Les tortures imposées à des petites filles qui ont osé montrer leurs chevilles ou leurs ongles peints, c’est effroyable. C’est inacceptable et insupportable », a déclaré Mohammed VI.
« La sérénité fait que vous n’oubliez jamais vos responsabilités professionnelles »
Trois ans plus tard, en 2004, Mohammed VI a accordé une nouvelle interview à Paris Match. À la question de savoir si la sérénité absolue existait chez les rois, le souverain répond: « je pense que l’insouciance, qu’on soit roi ou pas, disparaît à partir d’un certain âge. Elle laisse la place à la sérénité, celle qui vous rend plus solide face aux événements ». Et de poursuivre que « cette sérénité fait que vous n’oubliez jamais vos responsabilités professionnelles, vous y pensez tout le temps. Je n’ai ni horaire, ni jour de repos fixe, encore moins de vacances planifiées longtemps à l’avance, c’est là d’ailleurs le propre du métier de roi. » •
Mohamed VI tient des propos de roi.
Que dire d’autre sinon que les leaders élus ou en recherche d’élection dans notre démocratie « républicaine » pour d’éphémères mandats sont incapables de de raisonner sur le long terme et parler comme le roi du Maroc,
Par opposition aux propos du roi du Maroc, je pense avec affliction à un certain ancien président de chez nous qui aimait faire l’intéressant devant les micros et les caméras avant le « 20 heures », obsédé par le souci d’occuper l’espace médiatique et finir, au bout du compte, par saouler les français de la vacuité de ses propos.
Paroles de roi, en effet.
Sous la Ve, nos présidents de la République sont détenteurs de la souveraineté – qu’ils exercent a minima. Mais ce ne sont pas des souverains. En un sens, ce sont des monarques, dont les pouvoirs constitutionnels dépassent ceux de la plupart des rois en fonction. Mais ce ne sont pas des rois. Tout au plus, des monarques. Être des rois, c’est justement ce qui leur manque.
Roi du Maroc