Une analyse de Jacques Sapir
À une semaine du référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne, les sondages annoncent une large victoire des souverainistes. Puisque le journal The Sun et un nombre croissant d’intellectuels soutiennent le camp de la sortie, tous les espoirs sont permis. C’est du moins l’avis, intéressant et documenté, de Jacques Sapir [Causeur 15.06]. Pour nous, maintien ou sortie sont, dans le fond, assez équivalents : la Grande-Bretagne a signifié qu’elle ne renoncera jamais à sa souveraineté et a déjà obtenu, au sein de l’UE, une sorte de statut de cavalier seul qui, de toute façon, l’a déjà fait sortir. Ce qui ne signifie pas qu’un éventuel Brexit ne posera pas une série de problèmes techniques. Il constituerait en outre un puissant symbole du rejet par les peuples européens, d’une certaine Europe, d’ores et déjà en voie de délitement. LFAR
Trois faits marquants sont venus ces dernières heures soutenir les espérances des eurosceptiques britanniques alors que l’on se rapproche du référendum qui doit se tenir le 23 juin. Tout d’abord, un nouveau sondage (YouGov) donne une avance substantielle au vote de sortie de l’Union Européenne. Le point important ici étant moins le résultat absolu que l’accroissement de la marge de ce résultat. Bien entendu, le nombre de personnes ne s’étant pas encore décidées est important, et ce sondage doit être compris comme une tendance, rien de plus.
Des sondages au beau fixe
On peut penser que, dans l’isoloir, les électeurs indécis vont se prononcer en majorité pour le maintien de la Grande-Bretagne dans l’Union européenne. Mais, l’avance de la position de sortie est en train d’augmenter. De ce point de vue, il est possible que les opinions qui donnent – pour l’instant – le maintien de la Grande-Bretagne dans l’Union gagnante soient contaminées par le fait que cette position est visiblement majoritaire sur Londres. Le référendum sera aussi un vote du peuple contre les élites financiarisées, de la campagne contre la grande métropole.
The Sun contre l’UE
Le deuxième fait marquant est la très nette et très claire prise de position du quotidien populaire The Sun en faveur d’un vote de sortie. Bien entendu, les positions de ce quotidien étaient prévisibles. Ce que l’on appelle en Grande-Bretagne la « presse de caniveau » est connue pour ses positions facilement outrancières. Mais, il faut aussi savoir que derrière le journal il y a tout l’empire de presse de Murdoch. L’engagement du Sun vaut en réalité un engagement de ce groupe de presse.
Le troisième fait est l’article d’Ambrose Evans-Pritchard appelant à quitter l’Union européenne publié dans The Telegraph. On connaît les positions critiques de cet auteur. Mais les arguments qu’il avance pèsent et pourraient convaincre une fraction de l’opinion publique. Ambrose Evans-Pritchard identifie bien le problème principal du Brexit comme étant celui de la démocratie. Il écrit ainsi :
« Nous devons décider si nous voulons être gouvernés par une Commission aux pouvoirs quasi-exécutifs qui fonctionne plus comme le clergé de la papauté du XIIIème siècle que comme une fonction publique moderne; et si nous voulons nous soumettre à une Cour européenne de justice (CEJ) qui revendique la suprématie juridique la plus complète, sans droit d’appel.
La question est de savoir si vous pensez que les Etats-nations de l’Europe sont les seules instances authentiques de la démocratie, que ce soit dans ce pays, en Suède, aux Pays-Bas ou en France ». On retrouve aussi des formules qui sont proches de celles que j’ai employées dans mon dernier ouvrage : « … l’UE telle qu’elle est construite est non seulement corrosive mais finalement dangereuse, et (…) dans la phase que nous avons maintenant atteinte l’autorité gouvernementale se désagrège à travers l’Europe. Le projet provoque une hémorragie des institutions nationales, mais ne parvient pas à les remplacer par quoi que ce soit de légitime au niveau européen ».
Le président de la Cour suprême face au “danger” européen
Il est intéressant de voir que son opinion rejoint celle du Président de la Cour suprême du Royaume, Lord Sumption : « Elles (les institutions) se sont peu à peu vidées de ce qui les rendaient démocratique, par un processus graduel de désintégration interne et d’indifférence, jusqu’à ce que l’on remarque tout à coup qu’elles sont devenus quelque chose de différent, comme les constitutions républicaines d’Athènes ou de Rome, ou les cités italiennes de la Renaissance. »
Ces trois faits pourraient correspondre à un moment de basculement dans la campagne du référendum britannique. Le camp adverse se caractérise, pour l’heure, par des propos outrancièrement alarmistes, prédisant une « catastrophe » économique pour le Royaume-Uni en cas de succès de l’option de sortie. Ceci n’a pas de crédibilité. Les pays qui ne sont pas membres de l’Union européenne commercent librement avec cette dernière du fait des règles de l’OMC, qui s’appliqueraient instantanément aux relations commerciales entre la Grande-Bretagne et l’UE.
Ce qui est manifeste est que les partisans du maintien de la Grande-Bretagne dans l’Union européenne ont été incapables de développer des arguments « positifs » en soutien à leur position. C’est sans doute le point le plus intéressant. Aujourd’hui, la peur de l’inconnu est le dernier, voire le seul argument, qui reste aux partisans de l’Union européenne. Cela en dit long sur la décrépitude du projet européen. •
Retrouvez cet article sur le blog de Jacques Sapir.
Jacques Sapir
est économiste, spécialiste de la Russie.
un commentaire personnel: l’assassinat de la jeune député anti Brexit ne serait-il pas « instrumentalisé »? C’est tellement « gros » et ça tombe à pic au moment où le « non » semble être en tête. La gente mondialiste a tellement de pouvoir !!!
Monsieur,
Mais de quelle planète sordide et despotique sortez-vous?
Si ce drame « tombe à pic », pour vous cela relève forcément d’une « instrumentalisation ». Il ne vous vient pas à l’esprit qu’à ce point de la campagne référendaire cet acte en résulte directement et sans intermédiaire? Comme si l’assassinat était le credo des autorités politiques anglaises…. A moins de croire systématiquement à la théorie du complot, cas qui relève à un certain point des autorités psychologiques il me semble inconvenant, dangereux et gratuit de faire de ce drame un de vos instruments de lutte contre « la gente mondialiste ».
Pour le coup, c’est vous, avec ce genre de pensée, qui instrumentalisez cet événement.
J’espère que cette personne courageuse, ses pensées et ses actes, seront des exemples à suivre pour le peuple anglais, et pour le peuple français: au lieu de ne penser qu’en termes étroits (pays, nation) il faut également penser en termes ouverts et s’intégrer à l’Union Européenne.
Vive l’Union Européenne, et vive Jo Cox!
François Renaudo, citoyen républicain
Qui veut vraiment, au R.U. rester dans l’Europe: la City et la haute finance.
Quant à une catastrophe économique annoncée, je constate tous les jours que les produits que nous achetons portent la mention: Made in China, RPC ( la même) , ou Bengla Desh ,Vietnam , Cambodge , Maroc pour les vêtements.
Le danger pour les techno-monstres européens, c’est un risque d’épidémie, après le R.U. des pays de l’Est, Pays Bas ou même la France.
Ne resteront que l’Allemagne de MERKEL et ses obligés……
Renaudo, le Retour 2, après le jacobin régicide, voilà l’européiste moraliste !
Vous avez raison, et après « Renaudo, le retour 2 » il y aura « Le retour de Renaudo », celui où je zigouille votre roi dans les dix dernières minutes du film, pendant que l’un d’entre vous enlève son masque hideux de monarchiste et se repend de ses mauvaises actions contre la France. Puis je fête dignement la consécration de la République. Vous aimez?
Et oui, je suis un européen, et vous l’êtes aussi. Au lieu de prôner l’isolation des peuples, je préfère leur entente au sein d’institutions collectives. Chacun son point de vue: centré sur son nombril, ou ouvert à autrui.
François Renaudo, citoyen républicain et européen
Pauvre Renaudo, vous ne faites mais pas la différence entre européiste et européen ! L’Europe n’a pas attendu l’UE pour être européenne.
Monsieur,
Je connais très bien la différence entre ses notions, et j’ai employé celle qui était appropriée à mon propos. Vous êtes européen, et à ce titre devez être ouvert sur les autres pays d’Europe. Ce qui signifie que pour être pleinement européen, il faut être européisme à moins d’être un bon vieux nationaliste borné, xénophobe et apeuré par le contact avec les autres.
L’UE c’est la réalisation d’une Europe commune et unie par la monnaie, la culture, le commerce, les valeurs démocratiques, la sécurité etc… Pour les points non encore acquis, il suffit de travailler pour qu’ils le soient.
Avec des personnes comme vous qui mettaient des bâtons dans les roues, c’est sûr que l’UE ne risque pas d’avancer grâce à la France…
François Renaudo, citoyen républicain et européen
Renaudo, si ‘l’UE n’avance pas » pour reprendre vos termes, j’avoue n’y être pour rien étant donné qu’elle s’est construite anti-démocratiquement. La grosse Bertha médiatique ayant entériné Maastricht, puis d’Amsterdam à Lisbonne, en passant par Schengen et Nice, les technocrates soviétiques de Bruxelles n’ont pas jugés utiles d’en référer aux peuples. Mais après tout « vos valeurs démocratiques » doivent être celles des démocraties populaires du Pacte de Varsovie. Ce qui n’est pas surprenant de la part d’un jacobin régicide républicain européiste, … athée, islamophile, « cathophobe », et qui s’en fait gloire !
Monsieur,
Je ne suis pas islamophile, au contraire, je suis un chaud partisan de la laïcité. Et je ne suis pas athée, mais deomaque (tueur de dieu).
Sinon sachez qu’il y a des élections européennes, des référendum, des procédures de ratification etc… Mais peut-être n’êtes vous pas au courant. Ce n’est pas parce que vous ne vous sentez pas impliquer dans l’UE que celle-ci n’est pas démocratique. Elle l’est bien plus que n’importe quelle monarchie d’Ancien Régime.
Mes valeurs sont celles de la liberté, de l’égalité et de la fraternité, pas celle de la soumission, du genoux ployé, du sperme royal magnifié stupidement.
François Renaudo, citoyen républicain et européen
« tueur de Dieu » rien que cela ! Vous êtes surtout un fou, une marionnette décérébrée, peut-être même un psychopathe.
Comme pour moi vous êtes un esclave buveur de sperme royal habitué aux courbettes et aux flatteries, et un type qui veut le retour de la royauté pour en obtenir une place qu’il ne peut obtenir aujourd’hui dans un régime méritocratique . On diabolise et dénature tous nos ennemis…
François Renaudo, citoyen républicain, ami de la liberté, de l’égalité, de la fraternité et des lois, régicide, jacobin
On ne peut pas considérer les fous comme des ennemis !
A propos du meurtre de la députée travailliste. Tout est possible. J’ai en mémoire l’incendie du Reichstag, qui aurait été commandité par le régime national-socialiste, l’assassinat des moines de Tibéhirine par le gouvernement algérien, l’assassinat de Darlan par les anglais, de même que celui du roi Ghazi, l’assassinat de Jaurès, ou de Verwoerd. La manipulation des fous, au demeurant, est une constante historique, de même que le cynisme des gouvernants, quels qu’ils soient . Point besoin d’être complotiste pour l’envisager. Je constate seulement que ce sont les mêmes qui crient au complotisme lorsque le meurtre sert les intérêts de l’idéologie de l’indifférenciation, mais échafaudent sans crainte des théories sur l’auteur moral des crimes lorsque ces meurtres servent leurs ennemis. Je me souviens d’un prof à sciences- po qui prétendait que l’assassinat de Jaurès avait été ourdi par ………l’Action Française!