Fabrice Luchini dans Ma Loute. – Crédits photo : DR R. Arpajou
UNE « INSOLENCE » D’ÉRIC ZEMMOUR
Dans Ma Loute, les images défilent sur l’écran, et c’est l’heure où l’on regrette de ne pas lire les critiques de cinéma. Zemmour analyse ce film à sa manière et surtout se demande pourquoi Luchini y a accepté un rôle [Figarovox, 10.06]. Les cinéphiles, le cas échéant, donneront leur avis … LFAR
Mais qu’allait-il faire dans cette galère? On regarde Fabrice Luchini marcher comme Aldo Maccione, et fixer sur nous le regard de Ratatouille, mais on ne rit pas. On est triste même, désemparé, exaspéré. Ma Loute, c’est le titre du film, et on ne comprendra jamais ce que cela signifie. Les images défilent sur l’écran, et c’est l’heure où l’on regrette de ne pas lire les critiques de cinéma. On est dans le nord de la France, au début du XXe siècle. Les costumes, les accents, les paysages nous le laissent penser. Mais penser est encore un trop grand mot. Le film tourne autour de deux familles, deux clans, deux classes : les bourgeois et les prolos. Les bourgeois sont riches et vivent barricadés derrière les murs d’un château de béton. Les femmes sont hystériques, les hommes dégénérés. Les mariages consanguins, les viols, les incestes, ces « capitalistes » du Nord cumulent. Le film confond les dynasties capitalistes du XIXe siècle avec la famille royale espagnole croquée par Goya. Une des trois filles de la famille est habillée en garçon, a un prénom de garçon, alors que sa beauté éblouissante de fille constitue le seul spectacle à l’écran. En face, il y a les pauvres. Les miséreux, les prolétaires, les gueux. Là aussi, notre film mélange les époques : l’univers décrit n’est même pas celui de Zola, mais celui de Jacquou le Croquant !
Pour subsister, les pauvres aident les riches à traverser une rivière, dans une barque ou même dans leurs bras puissants. La jeune bourgeoise tombe amoureuse du fils de pauvres, le fameux ma Loute. Les filles de la haute ont toujours eu du goût pour les « bad boys », les princesses pour les bergers. Tout cela est original et iconoclaste. Comme la vision des deux policiers, grimés en Laurel et Hardy, plus stupides que nature. Comme le spectacle des processions chrétiennes, transformées en incantations superstitieuses à la Vierge, dignes des Indiens du Chiapas.
Lorsque ma Loute découvre que sa belle « est un garçon », il ne lui chante pas une chanson de Mylène Farmer mais la bourre de coups. Le peuple n’est pas gay-friendly ; le peuple n’est pas LGBT. Le peuple est criminel : il tue les riches de passage ; le peuple est anthropophage: il les mange!
C’est ainsi qu’un certain cinéma français voit le peuple français. Jadis, les légendes magnifiaient la gloire militaire des aristocrates ; puis, après la Révolution, on chanta avec Michelet la grandeur du peuple et de la nation ; avec les communistes, sonna l’heure du prolétariat, avec ces films sublimes où Gabin incarne un ouvrier magnifique. Plus rien de tout cela aujourd’hui. Tous, bourgeois et prolétaires, sont mis dans le même sac d’immondices par un petit monde nombriliste et inculte qui passe son temps à faire la morale à un peuple raciste et à une France ringarde. Quand le film est fini, on n’a toujours pas compris ce que Luchini est allé faire dans cette galère. •
Eh bien je trouve Zemmour mieux inspiré d’habitude ! Je suis allé voir hier « Ma loute » ; en plus de 60 ans de cinéphagie intense, je n’ai que très rarement vu aussi bizarre, mais le film mérite infiniment mieux que le billet agressif de Zemmour. Il est extravagant, stupéfiant, exaspérant, enthousiasmant tour à tour. Plus complexe que l’on pourrait en juger au premier regard et à la lecture rapide du pitch.
Le dernier § est mal venu, qui plus est : cde tout temps, de grands auteurs ont mis dans le même sac Patronat de droit divin et Prolétariat d’immaculée conception… Mon cher Zola, par exemple, dans « L’assommoir »…
Pour être allé voir le film, je partage l’avis d’Eric Zemmour et n’est aucune envie de le revoir.
Parfaitement d’accord avec vous, cher Eric Zemmour. Ce film est profondément inepte. Il provoque la perplexité dans un premier temps, l’ahurissement ensuite, avant de susciter la plus franche consternation. N’est pas Alfred Jarry ou Roger Vitrac qui veut. La volonté de surenchère est tellement flagrante qu’à force de charger la barque, le réalisateur fait rapidement naufrage.
Deux commentaires contre un, défavorables : una majorité ne fait pas une vérité, mais elle peut être un signe.
Je n’ai pas vu le film et suis donc sans avis, sauf que, en toute hypothèse, ma sympathie pour Fabrice Luchini ne faiblira pas.
D’Ormesson voudrait le faire entrer à l’Académie. Pourquoi pas ? Bien qu’il n’ait écrit qu’un seul livre, il me semble clair qu’il a plus et mieux servi la langue et la littérature française que nombre d’auteurs moyens, siégeant ou ayant siégé quai Conti.
Ce film est répugnant dans sa conception ( assez français, excusez moi pour ceux qui sont chatouilleux sur notre pays, que par ailleurs j’aime – , mais le cinéma français ne vole pas bien haut en général à l »exception d e Rohmer, Bresson, Renoir Becker et bien sûr Truffaut , et le vieux cinéma d’avant 1956 par exemple Delannoy) . De plus ce film horrible :ne donne aucune chance aux personnages de naitre à autre chose. Personnage populaires répugnants , personnages bourgeois répugnants et ridicules, le tout assaisonné d’un comique , un peu comme on cache la viande avariée avec une saucé épicée. Tendresse année zéro, overdose de glauque et de plate imitation de Fellini à la fin. Bref le cinéma n »est plus regard qui nous accouche à un autre monde, mais rétrécissement abject à sa propre turpitude. délibérément voulue. Exagéré mon commentaire? Je le revendique au nom de la liberté d’expression sur l’art et j’aime trop les grands films pour laisser assassiner .. Mozart.
Zéro pointé, le talent de Luchini dans cette mal aventure n’en est que plus pathétique. Si vous voulez voir un vrai film aujourd’hui , allez voir « Julietta ». d’Aldomavar. Peut être vous comprendrez ce qu’est le cinéma.
La provocation pour la provocation n’ a jamais donné une œuvre.
Écrit par : Henri 20h19 – mardi 05 juillet 2016