Une analyse pertinente de Patrice de Plunkett [25.06]
Comment peuvent-ils dire que la campagne du « out » s’est faite sous le signe de la peur ? C’est celle du « in » qui a voulu terroriser le votant ! (sans succès, le peuple anglais n’étant pas facile à terroriser). Et la campagne de peur continue : cette fois à la télévision française.
Il fallait voir le spectacle toute la journée d’hier. Nos commentateurs étaient courroucés. Certains en perdaient le souffle. Les présentatrices prenaient de petits airs sarcastiques. Des experts jetaient en l’air rageusement la liste de « tous les problèmes à résoudre maintenant », comme si la vie politique ne consistait pas à résoudre des problèmes. Sur iTélé et BFM, le défilé des breaking news (comme disent nos newsrooms) annonçait en boucle la « panique » et le « tremblement de terre » boursiers… alors que les chiffres ne montraient rien de tel, surtout pas à Londres où la Bourse ne perdait que 3 points. La crise de nerfs annoncée ne se produisait que dans les équipes rédactionnelles.
Pourquoi cette attitude ? Parce que jusqu’ici l’irréversibilité de « l’Europe » formait l’univers mental des médias. Ils étaient habitués depuis plusieurs dizaines d’années à distribuer l’éloge et le blâme : comme dit Hubert Védrine, l’UE était le bien, critiquer l’UE était le mal. Etre « européen » faisait partie d’un ensemble normatif : « je suis féministe [*] et européenne », tranchait Marie Darrieussecq il y a vingt ans. (Pour n’être pas « européen », il fallait être un déviant, suspect de vouloir nous ramener au temps des guerres : toujours déclenchées par « le nationalisme », évidemment jamais par les intérêts économiques transnationaux). L’européisme était plus qu’une opinion : c’était un bain amniotique. Soudain le bain amniotique disparaît. « L’Europe » n’est plus irréversible. Nos journalistes se retrouvent dans l’air froid des réalités. Ils prennent mal. Leur organisme se révolte.
D’où les choses stupéfiantes que l’on entendait hier, non de la part des invités politiques (circonspects) mais de celle des journalistes. Certains n’hésitaient pas à prôner une « attitude ferme » à l’encontre de l’Angleterre : ils parlaient de « sanctions dures », de « procédure accélérée ». On sentait chez eux une forte envie de casser la vaisselle et de déchirer les rideaux en poussant des cris, symptôme de l’état mental des leaders d’opinion. Centre nerveux de la postdémocratie, nos médias ne supportent pas la réalité ; ils n’existent que pour la conjurer, l’exorciser, la rejeter au loin. L’individu postmoderne s’accomplit dans le déni de réalité : être « européen » [**], pour lui, fait partie du même ensemble qu’être transhumaniste ou agro-industriel OGM ; c’est refouler la réalité que l’on refoule aussi sur le plan anthropologique et environnemental.
Voilà pourquoi l’acte des Anglais paraît indécent et inadmissible à nos commentateurs. Ils se sentent mis en cause au tréfonds de leur être : les écoles de journalisme ne les avaient pas éduqués dans ces idées-là. •
P.S. Bien entendu, le Brexit en soi reste un fait ambigu
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[*] « féministe » au sens bobo, bien sûr : tournant le dos à toute anthropologie.
[**] au sens bobo.
Un peu de modêration et de recul seraient bienvenus dans les conclusions håtives de part et d’autre.
Les » non européens » ne sont pas des ringards ignares » et les » pour » des bobos stupides » et les journalistes toujours amateurs de sensationnel font leur boulot de marketing . . Absolument personne n’est capable d’envisager le futur et la tournure toujours à leur avantage que les anglais peuvent retirer des circonstances .ils se sont débrouillés pour être dans le marché commun sans quitter leur monnaie et ils détiennent à Londres une place forte financière avec la sympathie de la chancelière .
Pour avoir su mieux que les autres garder un pied dedans et un autre dehors ils ont retiré les marrons du feu Jusqu’ici avec maestria.
L’Europe est une vaste guerre. Nord Sud où tous les enjeux sont économiques. Rien d’autre.
Attendons de voir ce que donnera ce coup de bluff.
La réduction du tout à l’économique est une méthode qui donne à son utilisateur les plus grandes chances de se tromper.
Ça s’est déjà lu dans ces commentaires et cela gâte les meilleures analyses.
Si l’on réduit le peuple anglais à l’état de marchands, on se trompe.
Mème remarque s’agissant des autres peuples d’Europe ou d’ailleurs.
Je souscris à la remarque de Bob. Les Anglais sont un grand peuple qui ne se réduit pas à l’état de marchands. On l’a vu dans l’Histoire.
Pourtant, je ne doute pas qu’ils restent très liés à l’Europe à leur façon.
Le commerce anglo-européen n’a pas attrndu l’UE pour exister. Il lui survivra.
Peu importe au fond ce que les commentateurs professionnels et labellisés peuvent dire, ils ne font que discourir sur une occurrence qui les déroute parce que non inscrite dans leur logiciel de croyances. La réalité est d’ordre géopolitique, et dans cette optique, le Royaume Uni conserve toute sa place dans l’espace européen en raison de son histoire, de sa géographie et de ses qualités propres. Étant le moins intégré de tous les grands États dans l’UE, bénéficiant de maintes exemptions, et ayant conservé sa monnaie, la décision de son peuple de sortir de celle-ci, n’est pas vraiment de nature à bouleverser les relations diplomatiques, économiques et militaires. Les questions en suspens sont essentiellement d’ordre juridique, dans un droit d’exception où la négociation prime souvent sur la règle: Le Droit international. Les gouvernants sont peu habitués à négocier, et quoi qu’ils en disent, ils laissent cela aux fonctionnaires, d’où un flou certain sous les lambris des différents Pouvoirs, le temps que les spécialistes puissent analyser les positions respectives et se mettent en rapport entre eux, afin d’établir les scénari de négociation. On peut sans grand risque de se tromper en établir les grands contours : La Grand Bretagne est un pilier géopolitique de l’Europe qu’elle soit dedans ou dehors. Il convient d’éviter sa déstabilisation politique et de l’aider à préserver son unité institutionnelle par tous les moyens juridiques dans la négociation. De ce point de vue, la recherche de compromis européens pour l’Écosse et I’ Irlande, devront se faire avec elle, de manière proactive, dans le respect de ses intérêts souverains, et dans ceux de l’Europe. Elle est, et restera, un acteur économique important du commerce européen et mondial qu’il convient de garder attaché à l’ensemble européen par un aménagement des conditions commerciales dans un juste équilibre avec le continent. Elle est et restera un partenaire militaire de première importance dans l’équilibre des forces en l’Europe occidentale et au- delà. Elle est enfin le plus gros marché financier de ce côté de l’Atlantique, possédant les règles et les expertises qui vont avec, ont fait son succès, et continueront très probablement de le faire. Pour toutes ces raisons, les envolées lyriques ou rageuses des uns et des autres ne sont que bruits et vents dans une phase de l’Histoire, où finalement les amours propres auront été plus surpris que les consciences, et les postures guère plus glorieuses que les impostures. Il reste à l’intelligence à gérer un processus qui passe par la raison, plus que par l’incantation, avec l’obligation de respecter les principes définis par un référendum peut-être opportun, voire salvateur, sur le fond pour l’Europe, mais décidément bien maladroit dans sa forme. Il nous faudra des hommes de valeur pour le faire, nous les avons pas actuellement en place, il faudra les changer.
Pour ma part, j’ai peu entendu les réactions des médias de la télévision pour la simple raison que je les écoute très peu depuis plusieurs années. Je ne regarde ces chaînes de télé que sont TF1, France 2 ou LCI et BFM que pour prendre des nouvelles de la propagande mondialiste.
Il faut, en effet, à mon avis, regarder sa télé comme les soviétiques regardaient la leur. On a plus de chaînes et elles sont souvent privées ; on n’a pas de propagande d’État au sens classique du terme ; on a une propagande organisée par la caste à son service.
Avec une propagande d’État, on a en général qu’une ou deux chaînes qui diffusent quasiment la même chose ; avec notre propagande, on en a 25 ou 30 mais le résultat est le même.
En revanche, leurs réactions apparemment sincères m’ont beaucoup surpris pour des organes de propagande où les journalistes se doivent de mentir et de dissimuler en permanence. C’est donc que nos propagandistes ne sont pas très professionnels dans leur travail de propagande. Ils manquent à l’évidence de sang-froid à la moindre contrariété.
J’en déduis donc qu’ils sont mauvais en matière d’information mais aussi finalement très mauvais en propagande quand il s’agit de réagir à un résultat hostile au dogme.
Mais, à présent, ils ont retrouvé leurs petits esprits et balancent à plein seaux des sondages bidonnés, fausses informations, images manipulées etc… Ouf ! Je respire…
Merci à Jean-François Ravel d’Estienne et Ribus de ces commentaires intéressants. De grande qualité, à vrai dire …
Merci aussi, Bob, c’est bien aimable de votre part, mais je dois toutefois avouer que je rédige mes commentaires avant de les poster. ..
Ce n’est pas » réduire » que dire d’un peuple qu’il est » industriel » comme l’Allemagne ou ´ » agricole » comme la France .. .(. d’autrefois. ! ) Certains prendraient plutôt cela pour un compliment et puisqu’on parle d’Histoire on pourrait rappeler sans l’aimer pour autant , ce que disait Napoléon des anglais (entre-autres..) personne n’est parfait.
Peu importe les étiquettes, les journalistes qui ont aussi leurs clichés essaient de nous les vendre , à nous de ne pas les acheter. Par contre il est exact qu’ il existe une tendance à » réduire » le monde à un vaste marchê où chacun vend ses idées sa civilisation sa religion ses principes ses marchandises etc .. et cherceà s’imposer avec les rapports de force habituels .
Triste constats d’observation cynique de l’humanité d’où tout romantisme est exclu mais qui laisse place à l’espoir d’ un utopique changement. Nous avons eu beaucoup de grandes causes et de héros dans notre Histoire , ceux du monde moderne , comme l’Europe , restent à inventer,