par Stéphane BLANCHONNET
Un article de Stéphane BLANCHONNET paru dans à-rebours.fr et dans L’AF2000. Et un article parmi plusieurs autres qui rappellent utilement les fondamentaux de la politique d’Action française. LFAR
Une des originalités de l’Action française est d’être un mouvement tout à fait laïc mais qui a joué un rôle central dans l’histoire de l’Église. Non seulement le parcours de l’AF dans le siècle est jalonné par des événements en rapport avec le catholicisme (défense des églises pendant les inventaires, polémique avec le Sillon, condamnation romaine) mais encore la condamnation de 1926 est une date-clé dans l’histoire de l’Église elle-même. Même si ses motivations n’étaient pas seulement doctrinales (comme le montre la levée sans contrepartie de cette condamnation en 1939), ses conséquences, en reversant le rapport de force entre modernistes et conservateurs, non seulement pour l’Église de France mais pour l’Église universelle, se feront sentir jusqu’au concile Vatican II et à la tempête révolutionnaire qui le suivra.
Les rapports de Maurras avec la Foi sont eux-mêmes l’enjeu d’un débat récurrent. Les choses ne sont pourtant pas si complexes. Né dans une famille catholique (sa mère était une femme très pieuse), Maurras fait ses études dans des écoles religieuses et débutera même sa carrière d’auteur dans des publications catholiques. Mais pour des raisons à la fois personnelles (la surdité qui le frappe très tôt) et intellectuelles (il y aurait beaucoup à dire sur ses rapports difficiles avec les notions d’infini et d’absolu), il perd la Foi, qu’il retrouvera à la fin de sa vie, comme en témoignent les beaux vers de sa « Prière de la fin », tout en en restant un « beau défenseur » de l’aveu du pape saint Pie X lui-même !
L’accusation la plus fréquente portée contre l’AF en cette matière serait d’avoir « instrumentalisé » l’Église. Cette idée, contredite par la formule de saint Pie X déjà citée, ne résiste pas à l’examen. Maurras voit dans le catholicisme la composante principale de l’identité morale, esthétique et spirituelle de la nation française et, au-delà de la France, il identifie catholicisme et civilisation parce que l’Église a opéré dans l’expression de ses dogmes comme dans sa structure hiérarchique et ses rites, la synthèse de l’héritage helléno-latin et du christianisme. On est loin de la conception voltairienne d’une Église-gendarme, tout juste bonne pour le petit peuple !
Les rapports concrets de l’AF avec l’Église se situent quant à eux dans la tradition de la monarchie française, à la fois respectueuse du magistère de l’Église dans sa sphère mais jalouse de son indépendance en matière temporelle. Ce sain gallicanisme, pas du tout hérétique, se voit autant dans la défense de la neutralité du Saint-Siège pendant la Grande guerre que dans le non possumus respectueux mais ferme de 1926. •
Repris de L’AF2000 – A Rebours
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