Par Eric Zemmour
Qui apporte ici quelques utiles lumières sur le cas Macron. Sur ce qui est politiquement essentiel en lui, parfois perçu comme une énigme. Et cet essentiel, malgré de flatteuses apparences, n’est pas très brillant. A moins que ce ne soit au sens péjoratif du terme. Seulement brillant. Rien de plus. LFAR
La charge n’a échappé à personne. Et surtout pas à l’intéressé. Bayrou a tancé Ma-cron, candidat du « monde de l’argent », et Macron a répliqué. Et puis on est passé à autre chose. Les commentateurs amusés ont brodé sur le vieux lion agacé par l’impétuosité du lionceau qui osait venir sur son territoire. La politique ressemble sou-
vent à la « vie des bêtes », selon l’expression qu’affectionnait Charles Pasqua.
Mais c’était plus profond. La querelle des deux hommes à fleurets mouchetés est révélatrice de ce qu’est devenue la vie politique française. Pendant trente ans, François Bayrou a tenté de dépasser le clivage droite-gauche et de s’immiscer dans la querelle des grands, entre les socialistes et les gaullistes. Il a tout essayé ; il a failli réussir ; et il a échoué. Il y a sacrifié son parti et ses députés.
Il était l’héritier de Jean Lecanuet et de Raymond Barre qui, avant lui, avaient eux aussi essayé de secouer la tutelle gaullo-socialiste sur la V’ République. Eux aussi en vain.
Ils étaient centristes, européistes, girondins, libéraux et sociaux, un mixte de démocratie chrétienne et de social-démocratie. Partout, en Europe, cette famille politique gagnait les élections. Sauf en France. Bayrou était un centriste enraciné dans la terre de ses ancêtres ; il était assis sur son tracteur, et son luxe était les chevaux de course. Bayrou était un enfant de Péguy et de la méfiance, en tout cas intellectuelle, de l’argent. Son Europe était unifiée par le christianisme.
Macron est en apparence le dernier surgeon de l’arbre centriste ; mais c’est un OGM ; il a été génétiquement modifié. Son tracteur à lui, c’est la banque. Son monde à lui, c’est Uber et ses fameux autocars. Son Europe est multiculturelle et a jeté par-dessus bord ses racines chrétiennes.
Macron est, comme Bayrou, un lettré qui a du goût pour les livres et les citations bien balancées. Comme Bayrou, il juge. obsolète le clivage droite-gauche.
Mais les mots ne veulent plus dire la même chose. Les centristes de Bayrou ont perdu la bataille du pouvoir, mais ont gagné la bataille des idées. Les gaullistes et les socialistes sont devenus libéraux, européistes, girondins. Les gaullistes ont trahi la nation et les socialistes, le peuple. C’est ce centrisme gouvernemental qui est aujourd’hui rejeté par les peuples européens. Bayrou avait dû combattre des titans à mains nues. Macron arrive dans un paysage en ruine. Bayrou était l’enfant de Lecanuet ; Macron n’a gardé de Lecanuet que les dents blanches ; il est le frère jumeau du Premier ministre canadien Justin Trudeau, apôtre de la « mondialisation heureuse » et des « accommodements raisonnables » avec l’Islam.
Bayrou était l’héritier d’une lignée. Il veut l’offrir à Alain Juppé et en éloigner les importuns comme Macron. Mais sa crainte est infondée car sa besace est vide. Il n’y a plus de centre puisqu’il n’y a plus de droite ni de gauche. •
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