Publié le 21.06.2017 – Réactualisé le 22.06.2017
C’est sans-doute une très mauvaise retombée de la campagne présidentielle qui a malencontreusement conduit Emmanuel Macron à faire de la loi de moralisation de la vie politique la priorité du début de son quinquennat. Moins de morale lui eût évité des ratés, si l’on peut dire au démarrage, qui auront, bien-sûr, des conséquences de long terme.
Ce n’est jamais tant de « morale » ou, pire, de moraline, dont un Etat a besoin, mais de compétence, d’efficacité, de continuité, d’autorité, et d’une ligne politique juste et claire.
Il y eut dans notre Histoire de très grands ministres, d’admirables serviteurs de l’Etat, qui amassèrent à son service d’immenses fortunes et qui firent de la France le premier pays d’Europe. L’exemple type en est Mazarin, ce qu’Éric Zemmour a rappelé â juste titre. Les rois de France, avec sagesse, veillaient seulement à ce que les largesses que s’octroyaient leurs ministres fussent tout aussi largement compensées par de bien plus grands services rendus â la France.
A l’inverse, les médias ont réussi à imposer à l’opinion commune un néo-moralisme dans lequel les esprits politiques ne tomberont pas mais qui entrave l’Etat et le contraint à de ridicules contorsions.
En 48 heures, après l’exfiltration avant-coureuse de Richard Ferrand, trois autres ministres, les ministres de la Défense, des Affaires européennes, et le Garde des Sceaux ont dû, eux aussi, quitter un gouvernement où ils n’auront fait qu’un passage assez ridiculement bref (35 jours).
Leurs malversations n’ont même pas visé un enrichissement personnel. Elles ont plus modestement consisté à faire payer sur fonds du parlement européen des permanents de leur parti. Il y a de plus grands crimes ! Les frais de fonctionnement des partis, surtout lorsqu’ils sont sans militants, ne sont pas faciles à financer ! Ces gens-là ne sont en vérité que des contrevenants modestes.
S’il faut encore un Etat à la France – nécessité d’évidence – il sera certes souhaitable que ses acteurs se comportent aussi honnêtement que possible, mais il sera surtout indispensable de soustraire l’État à la tyrannie dialectique des médias, des spécialistes de l’investigation – dont l’honnêteté n’est pas prouvée – et de magistrats dont la quête de puissance est de toujours.
Restaurer l’État n’est pas acquis. Même si Emmanuel Macron parvient à en relever l’apparence. Pour y installer un minimum de moralité, le mieux serait qu’il y ait à sa tête un homme qui n’ait pas lui-même acheté son pouvoir – son élection – avec l’argent de très puissants soutiens. Ce n’est pas, on le sait, le cas d’Emanuel Macron.
Quant à doter la France d’un État ayant autorité, compétence, efficacité, continuité, pour sortir la France du cycle de son déclin, l’on voit bien que cela est de plus en plus difficile, irréaliste et improbable, dans le Régime qui est censé être le nôtre. Emmanuel Macron a certainement sous-évalué l’état de délabrement, de pourrissement, d’épuisement du Système qu’il a voulu, en même temps, renverser et sauver. La crise politique actuelle est bel est bien, dans son fond, une crise de régime.
Emmanuel Macron sera-t-il seulement capable de réagir au chaos gouvernemental qu’il a – au moins en partie – lui-même créé, autrement qu’avec de vieilles recettes politiciennes ? A la Bayrou, Sarnez et autres … Ce sera assez intéressant que d’observer ses réactions des prochaines heures.
Quelle politique mènera Emmanuel Macron à travers le gouvernement à ses ordres, nommé hier soir ? Telle est la question. Reste aussi l’encombrante présence extérieure mais bien réelle et éminemment politicienne de François Bayrou, désormais, quoiqu’il en ait dit, en embuscade. Bayrou, l’Embusqué *. •
* Titre d’un article de Charles Maurras à propos de Clémenceau [L’Action française, du 27 août 1914].
Entre les voleurs de la République et Savanarole ou Robespierre, il y a bien un espace permettant de gouverner dans le souci du bien commun, qui peut très bien s’appeler: la MONARCHIE