Le port de pêche
Par Péroncel-Hugoz
Notre confrère Péroncel-Hugoz, longtemps correspondant du Monde dans l’aire arabe, a publié plusieurs essais sur l’Islam, et il travaille maintenant à Casablanca pour le 360, l’un des principaux titres de la presse francophone en ligne au Royaume chérifien. Il tient aussi son Journal d’un royaliste français au Maroc, dont la Nouvelle Revue Universelle a déjà donné des extraits. Nous en faisons autant, depuis janvier 2016, en publiant chaque semaine, généralement le jeudi, des passages inédits de ce Journal. LFAR •
Casablanca, 20 mars 2015
Au restaurant Ostreade, au port de pêche, je reçois, mon confrère le téléaste Omar Sélima. Impossible de s’entendre tant les chansonnettes anglo-américaines sont diffusées fort dans cet établissement marocain naguère silencieux. Le garçon a l’air ahuri quand je lui demande de baisser un peu le son, ce qui n’est fait qu’au bout d’un long, long moment et encore de seulement quelques décibels.
C’est un mal universel et qui a sa seule raison d’être dans les fabuleuses redevances que ramassent partout sur cette musique diffusée en public les « majors », compagnies états-uniennes de production musicale. Et le monde entier ou quasi se soumet à ce rançonnement…
Sur le même registre de la soumission générale à l’hégémonie industrio-financière du monde anglo-saxon, j’ouvre le luxueux magazine francophone marocain Leaders (sic) de mars 2015 : toutes les nouvelles entreprises locales mentionnées ont, à l’image d’ailleurs de ce qui se passe en France et ailleurs, des intitulés anglophones : Hit-Radio, Logistics Services, Hellofood, Upline Group, Ero-Friendly, Afric Industries, Industube, Bank Mouamalat-Saaba, CIH Bank, Mytrippy, Fastpayment, Linky, Virtual Building Solutions, Twiyer, Moo’s, Smala and Co, Play Academy, Loolys, et je m’arrête car j’en aurais encore jusqu’à demain…
Une consolation : le bon vieux Crédit agricole du Maroc conserve pour le moment son intitulé francophone…
Je rentre chez moi et je mets Médi-1, la station franco-arabe de Tanger, pour écouter le journal parlé en français. Avant ça, ça broie les mêmes chansonnettes idiotes et « tapantes » que dans les restaurants, les super-marchés, les supérettes, les parc-autos payants, bref tous les endroits publics où les terribles « majors » peuvent se remplir les poches en nous cassant les oreilles… •
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