par Gérard Leclerc
La situation politique qui résulte de la victoire d’Emmanuel Macron est, pour le moins, propice à un grand brassage d’idées. Je serais plutôt enclin à m’en féliciter comme observateur assez gourmand du débat intellectuel. Est-il vrai que la distinction gauche/droite est en train de laisser la place au clivage progressiste/conservateur, comme le veut le Président de la République ? La réponse à une telle question nous vaut des pages entières, si ce n’est des livres que je n’ai pas la prétention de résumer en quelques formules. Simplement, en France, me semble-t-il, il y a toujours plus ou moins avantage à se réclamer du progrès, la conservation vous renvoyant plus ou moins du côté de l’obscurantisme et de la nostalgie. Il faut se méfier aussi de l’aspect marketing que comporte le débat sur la place publique. Emmanuel Macron en se proclamant progressiste s’est offert, à peu de frais, un avantage psychologique qui l’identifie à l’avant-garde.
Il est arrivé dans un passé pas si lointain, puisqu’il s’agit du milieu du XXe siècle, qu’un Georges Bernanos renvoie à l’extrême arrière-garde ce qui se voulait d’extrême avant-garde. Tout est toujours relatif de ce point de vue. Relatif à une situation, à une conjoncture. N’est-ce pas la droite qui, dans la période la plus récente, a stigmatisé la gauche pour son conservatisme économique et social, son refus de s’inscrire dans le grand mouvement de la mondialisation ? Aujourd’hui même, la ligne suivie par le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, se signale comme « un détricotage » de tout ce qu’avaient entrepris les ministres de François Hollande, notamment Najat Vallaud-Belkacem. Et l’on crie à gauche à la régression, si ce n’est à la réaction.
D’où la nécessité d’une analyse sérieuse des vraies questions de fond, et – pourquoi pas ? – d’un retour à la philosophie politique. Mais il me semble que nous assistons à un tel retour et qu’il se produit, notamment à droite, un bouillonnement intellectuel de très bon aloi, qui pourrait d’ailleurs provoquer un élan analogue du côté d’une gauche meurtrie par ses échecs récents. La chance d’un débat intellectuel c’est d’offrir une médiation aux oppositions sociales. Il vaut mieux discuter que de se battre dans la rue. •
Puisque Bernanos est ci souvent évoqué , on ne peut manquer de citer une phrase venant de » la grande peur des bien-pensants » écrit ( sulfureux ? ) au premier tiers du XX ème siècle
» Mais il se souvient que le notaire Blaise , vieux routier , candidat perpétuel , aujourd’hui effondré par les ans , fut légitimiste vers 1875 , rallié en 80 , conservateur jusqu’en 95 , libéral vers 1900 , puis progressiste , pour finir en un denier galop [ … ] démocrate, et même démocrate populaire »
Royaliste échappe à l ‘ énumération ; c’est simple . Au final , ceux qui , par défaut , veulent participer au système républicain sont condamnés à choisir les mêmes formules éculées pour soutenir partis et /ou candidats rances , aujourd’hui comme hier .