Publié le 17 janvier 2018 – Actualisé le 20 janvier 2018
Faut-il s’étonner ? Il y a plus de deux siècles que Louis XVI a été guillotiné. Deux siècles que les événements révolutionnaires ont bouleversé notre histoire. Et il y a bien longtemps qu’il n’y a plus de parti royaliste dans les assemblées. De ce point de vue – c’est Pierre Boutang qui l’a dit – les royalistes sont un « néant de force ».
Alors faut-il s’étonner que chaque début janvier se mettent en place les longues listes de messes et de manifestations qui vont commémorer la mort, le 21 janvier 1793, de ce roi malheureux ? Et tirer pour aujourd’hui les leçons de cet événement qui pèse sur nous.
Cette année encore, les annonces sont très nombreuses et l’on sait que, presque partout, les églises, qui n’en ont plus trop l’habitude, seront pleines et ferventes.
Faut-il s’en étonner ?
En 1877, dans son Journal d’un écrivain, Dostoïevski, déjà, avait observé et signalé « la ténuité des racines qui unissent la République au sol français ». C’était l’époque du royalisme électoral et parlementaire, qui fut majoritaire, un temps, à l’Assemblée nationale. La République n’avait été instituée – « la moins républicaine possible » – qu’en attente de la monarchie. Mais à la mort du comte de Chambord, le royalisme parlementaire avait vécu, avalé par le jeu des partis et par le régime d’opinion. Comme échouera, ensuite, le stratagème du pape Léon XIII, qui crut, avec le Ralliement, faire de la France une république chrétienne, puisque la grande majorité des Français était catholique… Ce Pontife, en politique, fut un naïf. Il récolta la guerre que la République mena à l’Eglise de France au commencement du siècle suivant, le XXe. Le royalisme se réfugia dans quelques salons surannés ou dans de nobles et nostalgiques fidélités.
Les racines qui unissent la République au sol français étaient-elles pour autant devenues moins ténues ?
En l’année 1900, le souvenir de la défaite de 1870, de l’Empereur prisonnier, des Allemands sur les hauteurs de Montmartre, était toujours omniprésent, mêlé à l’obsédant souci des provinces perdues. Alors que se profilait la terrible menace d’une nouvelle guerre, l’on vit soudain se lever du marais du camp patriote, la forte résurgence d’un royalisme français, jeune, intellectuel, doctrinal et combatif, qui bousculait le royalisme endormi et le vouait au patriotisme le plus exigeant. Ce que fut la place de l’Action Française d’alors, son autorité intellectuelle et morale, son emprise sur la jeunesse, sur l’Intelligence française, sur la catégorie des Français actifs, avant la Grande Guerre et dans l’entre-deux guerres, nous avons de la peine à le mesurer aujourd’hui, malgré les livres et les travaux universitaires. Le royalisme français avait opéré une étonnante renaissance qui attestait de cette ténuité inchangée des racines qui unissent la République au sol français, telle que Dostoïevski l’avait observée.
Le royalisme français restauré ou refondé par l’Action Française a traversé le XXe siècle et deux guerres mondiales, la première gagnée par miracle, la seconde perdue dans des conditions – l’effondrement que l’on sait – qui, comme l’a dit Boutang, ont failli tuer la Patrie.
Nous voici, un siècle plus tard. La République est-elle devenue plus assurée de son enracinement dans le sol français ?
Deux rendez-vous historiques ont au contraire confirmé sa ténuité : tout d’abord, le millénaire capétien en 1987, au cours duquel le Comte de Paris assura l’avenir de la Maison de France en titrant ses deux petits-fils, les princes Jean et Eudes, duc de Vendôme et duc d’Angoulême ; cette année-là le comte de Paris et le président de la République, François Mitterrand, commémorèrent ensemble, côte à côte dans la cathédrale de Reims, le baptême de Clovis en 987. Ces événements porteurs de puissants symboles eurent un grand écho. Deux ans plus tard, vint 1989. L’on devait célébrer le bicentenaire de la Révolution française. Tâche ardue. Qui fut ratée. Le comité des célébrations fut d’abord confié à Edgar Faure qui décéda avant l’heure. Puis à Pierre Joxe qui courut à l’échec. Grâce à quelques initiatives heureuses et fortes – Jean Raspail, Jean-Marc Varaut, Marcel Jullian – le bicentenaire tourna à la critique de la Révolution, se mua en un vaste courant de sympathie pour ses victimes, à commencer par le roi, la reine, le dauphin, martyrs de la Terreur.
Près de trente ans encore ont passé, sous les mandats délétères de François Mitterrand (second septennat) de Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et François Hollande. On sait la situation de la France et le discrédit du régime au terme de leurs mandats.
Or voici que le 8 juillet 2015, dans l’hebdomadaire Le 1, le ministre de l’économie de François Hollande, sans que quiconque le reprenne ou le sanctionne, écrivit ceci, qui mérite d’être relu :
« Il nous manque un roi. La démocratie comporte toujours une forme d’incomplétude, car elle ne se suffit pas à elle-même. Il y a dans le processus démocratique et dans son fonctionnement un absent. Dans la politique française, cet absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n’a pas voulu la mort. La Terreur a creusé un vide émotionnel, imaginaire, collectif : le roi n’est plus là ! On a essayé ensuite de réinvestir ce vide, d’y placer d’autres figures : ce sont les moments napoléonien et gaulliste, notamment. Le reste du temps, la démocratie française ne remplit pas l’espace. On le voit bien avec l’interrogation permanente sur la figure présidentielle, qui vaut depuis le départ du général de Gaulle. Après lui, la normalisation de la figure présidentielle a réinstallé un siège vide au cœur de la vie politique. Pourtant, ce qu’on attend du président de la République, c’est qu’il occupe cette fonction. Tout s’est construit sur ce malentendu. »
Chacun sait que l’auteur de ce constat radical – qui ne fait que confirmer les réflexions anciennes de Dostoïevski – est Emmanuel Macron, élu entre-temps, contre toute attente, président de la République française.
Faut-il s’étonner s’il y a beaucoup de Français à travers le pays pour se souvenir de la mort du roi Louis XVI, dans les jours qui viennent ? •
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Je recommande, à la suite de ce bel article, la lecture du remarquable ouvrage du grand historien allemand Karl Ferdinand Werner » Naissance de la noblesse » publié chez Fayard. Outre le rejet des préjugés modernes sur le Moyen-Âge vu par l’historiographie républicaine comme un âge de ténèbres et de servitude, le livre de Werner comporte un chapitre passionnant sur les racines du pouvoir monarchique, dans lequel il montre celui-ci non seulement comme la plus ancienne forme de pouvoir dans l’histoire humaine, et la plus universelle, mais comme la plus naturelle eu égard aux fondements religieux de l’ordre politique et social des hommes. De quoi faire réfléchir sur les impasses de la prétention des hommes d’aujourd’hui au gouvernement de la multitude par la multitude.
Merci pour cette référence
Merci à LFAR pour ce bel article effectivement.
Merci à LFAR pour cet article, qui demande à être complété. Il y a ceux qui regrettent d’avoir perdu leurs privilèges, ceux plus nostalgiques qui réécrivent l’histoire. Cet article pourrait permettre de voir le présent et l’avenir, sous des hospices plus à même de servir le bas peuple. Il n’y a jamais plus de liberté dans un groupe, que quant l’ordre est bien défini et bien compris. Le dix neuvième et le vingtième siècles n’ont pas réussi à démontrer que le roi est le père de la nation. Après deux siècles d’incertitudes, le temps est peut être venu pour construire un programme compréhensible pour tous.
Je poursuis: » il nous manque un roi ». C’est ce qu’il a dit.
Attention, il est le roi, de la république. Le beau gosse qui nous charme de ses belles paroles qui sonnent le libéralisme; et le peuple qui y croit subit doucement mais surement une dictature déguisée.
Pour illustrer ces dires. La limitation de vitesse à 80km heure, facile, trop facile. Alors qu’il faudrait compte tenu du nombre de véhicules roulant sur nos routes revoir les infrastructures, le mode de formation de conduite et du véhicule et du savoir vivre sur une route. Quel conducteur n’a pas juré sur le saut brutal d’un « gendarme couché ». Qui n’a pas été surpris par l’imposition d’une vitesse trop basse dans une zone déserte de toute habitation. Mais quel travail intellectuel… Les rois avaient construit des routes que l’on appelle depuis des nationales, la république moderne les a détruites. Alors le roi de la républiques sanctionne; et les plus riches ou les plus bêtes iront encombrer les autoroutes pour enrichir Venci. Un roi, oui, un vrai, un roi qui comprenne ses mandants et son peuple. Un rêve quoi.
C’est bien une des caractéristiques de la société actuelle : liberté de voter pour toute sortes d’occasions ( pas seulement politiques avec candidats présélectionnés ) , liberté entre ses quatre murs avec télévision pour » s’informer » mais , par contre , toute sorte de chicaneries dans la vie de tous les jours ( le cas de l’automobiliste est typique et il y aurait beaucoup à dire )
Le pire , si l’on peut dire est le sentiment qu’il ne s’agisse pas du » fait du Prince » mais de l’action sous jacente , obstinée et insistante d’organisations , de lobbies et associations ( lutte contre la violence routière , le tabac , la chasse , contre les discriminations , Haute Autorité pour encadrer les médecins etc… ) associations , financées et bien sur gavées de respectabilité .
La Première Guerre mondiale fut certainement gagnée par le miracle de la Marne, apparition de la sainte Vierge, selon les autorités militaires allemandes qui ont eu ordre de se taire, mais aussi par le sacrifice obligatoire des poilus. La franc-maçonnerie n’a eu aucun scrupule à les sacrifier sur l’autel de leur idéologie anti-chrétienne.
Ce genre de truc, ça ne fait pas très sérieux.