par Louis-Joseph Delanglade
Algérie, Maroc et Tunisie n’ont cessé depuis leurs indépendances de constituer un des grands sujets d’intérêt, voire de préoccupation ou d’inquiétude, de notre politique étrangère. D’ailleurs, à la suite de M. Giscard d’Estaing, pas un seul des présidents successifs n’a manqué de se rendre au Maghreb, dans tel ou tel des trois pays, parfois les trois, toujours pour des annonces de lendemains communs qui chantent. Une sorte de serpent de mer. Ce qui est nouveau avec M. Macron, si l’on en croit la tonalité de ses deux discours de Tunis (l’un aux députés tunisiens, l’autre aux Français de Tunis), c’est que le conditionnel serait plus satisfaisant : les lendemains pourraient chanter…
Si ses prédécesseurs ont tous souligné le côté souhaitable et même nécessaire de la coopération entre les rives nord et sud de la Méditerranée, M. Macron a le mérite d’avoir compris que, sauf à se contenter de mots, cette coopération doit être structurée. Il a même envisagé la possibilité, dès cette année, d’une réunion euro-maghrébine à Paris, pour avancer dans ce sens. Mais il ressort aussi de ses propos, plus ou moins mais suffisamment pour se révéler dommageable, qu’il associe toujours l’Europe, sous sa forme bruxelloise, à la France et qu’il donne, même en y mettant les formes, des leçons aux uns et aux autres.
Pour réussir, une telle ambition politique doit d’abord être circonscrite. Sans remonter très loin dans le passé, il semblait en 2008, à en croire le très optimiste M. Sarkozy, que son Union pour la Méditerranée, forte de ses quarante-trois membres (vingt-huit Etats de l’U.E. et quinze d’Afrique du Nord, du Proche-Orient et d’Europe du Sud-Est) allait être le remède à tous les maux de la région. Dix ans après, c’est au mieux une usine à gaz. Projet trop ambitieux sans doute et surtout sans bases solides. En revanche, les données conjuguées de l’Histoire et de la géographie physique et humaine (ce dernier point est capital) incitent à envisager, avec les trois pays sus-cités, une forme d’union de la Méditerranée occidentale, à laquelle pourraient, devraient même, être conviés nos voisins européens d’Italie et d’Espagne. Diluer un tel projet en y associant d’autres pays d’Afrique ou d’Europe le viderait de son sens.
Pour réussir, il conviendrait aussi de se garder de tout néo-colonialisme idéologique. Or les discours tunisiens de M. Macron font la part trop belle à l’étalon de la bonne conduite démocratique. Sans doute peut-il paraître habile, à Tunis, de flatter le seul pays arabe qui ressemble un peu aux démocraties européennes. En revanche, la monarchie alaouite n’a aucune leçon à recevoir de M. Macron, pas plus d’ailleurs que le pouvoir algérien. Distribuer (ou pas) des bons points démocratiques à d’éventuels partenaires serait ridicule et contre-productif : comment ne pas comprendre en effet qu’au vu de la montée du salafisme toute logique démocratique et droit-de-lhommiste est dangereuse et, de toute façon, vouée à l’échec ? C’est, au contraire, en privilégiant relations et accords entre les Etats qu’on luttera efficacement contre l’islamisme, contre l’immigration sauvage et pour un développement harmonieux et apaisé de la zone.
Un peu plus de réalisme et de pragmatisme, un peu moins d’européisme et de démocratisme : cette condition nécessaire, mais pas forcément suffisante, s’impose à l’ambition méditerranéenne de M. Macron. •
Vouloir l’union de la France (et a fortiori de l’Europe) et du Maghreb est une utopie que près de deux siècles d’Histoire ont largement démontré. C’est comme vouloir le mariage de la carpe et du lapin. Lorsque deux groupes de civilisations sont à ce point dissemblables, pourquoi s’obstiner à vouloir les unir ? Mieux vaut laisser le monde arabo-musulman continuer sa route incertaine tout seul et nous préoccuper de la nôtre dans le prolongement de notre très longue et riche histoire gréco-romano-judéo-chrétienne multimillénaire. Depuis qu’ils ont choisi Allah, l’Islam et son totalitarisme obtus depuis près de mille cinq cents ans, les peuples du sud de la Méditerranée ne devraient mériter de notre pays que le seul souci pragmatique de maintenir des relations d’intérêts économiques réciproques bien compris sur la base de l’égalité des droits et de façon pacifique. Et en veillant, en ce qui nous concerne, à notre sécurité et notre protection contre l’invasion rampante et déstabilisane que nous subissons depuis un demi siècle au moins. Point barre.
En effet, les nations européennes ont déjà bien du mal à s’entendre vraiment, alors qu’elles partagent la même civilisation.
Aussi l’union méditérannéenne qu’envisage Macron et dont traite cet article ne peut être une union politique au sens plein, si tant est qu’il puisse en exister une entre États souverains et nations historiques anciennes, ce qui est douteux.
Des partenariats, des coopérations, en revanche, si possible cohérents et organisés, ne peuvent pas ne pas exister entre la France et les pays du Maghreb, fussent-ils musulmans. C’est, je crois, le sens de cet article de LJD.
Gilbert Claret désigne ci-dessus quelques domaines où partenariats et coopérations sont souhaitables. Ils constituent à eux seuls un vaste programme.