« Les poètes tiennent des discours divers aux générations diverses ». Cette formule de Barrès s’applique certainement à Maurras qui s’était lui-même défini comme « simple poète ».
Il s’en explique, parlant de son « vieux cœur de soldat », dans ces vers très célèbres : « Le combat qu’il soutint fut pour une patrie, pour un roi, les plus beaux qu’on ait vus sous le ciel ». Et ce combat fut aussi de l’ordre de la poésie. Poésie de la France, du Roi, des beautés françaises et des beautés du monde.
Cette poésie tient semble-t-il un discours nouveau à la jeune génération. Discours nouveau et discours ancien d’ailleurs très mêlés, discours pérenne retrouvé et intact en tout cas.
On pourra en juger en lisant le tout premier numéro de « Création » consacré justement à Maurras. Voir, feuilleter, lire l’exemplaire ci-dessous s’impose.
On sera d’abord saisi par son portait de couverture où il a la dégaine d’un jeune d’aujourd’hui. Un Maurras évidemment non historique, anachronique et revu à leur image par des jeunes qui en ont fait leur maître mais lui attribuent leurs codes. Maurras s’en fût amusé. Générations diverses, imagerie diverse. Il n’est pas sûr du tout, d’ailleurs, qu’il n’y ait pas quelque chose de cette image aux traits appuyés dans ses portraits de jeunesse. La vraie, l’historique.
Ce premier numéro maurrassien se veut satirique. Il l’est sans doute. Il entend amuser mais aussi apprendre, transmettre, en amusant. Nous trouvons que c’est assez réussi.
« C’est notre maître et c’est un as ». Telle est, d’entrée l’affirmation centrale de ce numéro sur Maurras, somme toute assez classique sur le fond. Formule sympathiquement reprise d’un vieux chant des Camelots du Roi (du Roi, non du Roy) chanté des milliers de fois et en des milliers d’occasions depuis un siècle et quelques années.
Pour le reste, on lit ce numéro sur Maurras par et pour des jeunes avec sympathie et contentement. Nous ignorons qui sont ses auteurs mais nous comprenons bien qu’ils veulent comme nous que l’œuvre de Maurras continue et arrive à ses fins qui sont nationales et royales. Et plus … Comme ils disent.
Nous n’ajouterons pas grand-chose. Qu’on fasse l’effort de lire.
Deux remarques toutefois pour finir :
. Une petite erreur historique s’est invitée à l’intérieur de ce premier numéro de Création.Non le Maréchal Joffre n’était pas présent à la réunion du Vel’ d’Hiv’. La raison est simple : Joffre est mort en 1931. C’est la maréchale Joffre qui était présente au Vel’ d’Hiv’.
. Deuxième remarque. Création nous indique que Maurras aurait mis à profit ses années de prison pour admettre et confesser ses erreurs. Seule question : a-t-on des textes ? Lesquels ? Ce serait une découverte !
Ne boudons pas notre intérêt. Ce diable de Maurras, sous forme relookée se débrouille encore de forcer le respect, l’admiration et la sympathie. Il suscite toujours des fidélités. ■