Il doit arriver un moment dans l’existence humaine mais aussi sociale, où rien ne réussit plus, où les petites et les grandes choses de la vie privée ou publique se soldent toutes ou presque par des échecs, des incompréhensions, des déconvenues plus ou moins profondes ou stupides.
Tout se ligue, y compris le hasard, pour que les catastrophes s’accumulent. Chance et malchances jouent aussi sur la vie des hommes et des États comme leurs mérites ou leurs bévues, leur paresse et leurs errements. Quand tout s’en mêle pour enclencher un processus de descente aux enfers, il semble que rien ne l’arrêtera plus, que la loi des séries est imparable, que le retour à bonne fortune est impensable.
Il est bien possible que ce soit ce qui arrive à Emmanuel Macron et, très accessoirement, à l’équipe inconsistante qu’il a mise en place – de concert avec les oligarques, pour sauver le Système mis à bas par ses prédécesseurs. Le Macron actuel est passé sous l’empire de l’anti-kairos.
Les causes de son échec tiennent sans doute d’abord à l’inadéquation de sa politique aux réalités nouvelles de la France et du monde. Il s’est refusé à prendre en compte que le vent avait tourné en Amérique (Nord et Sud), en Europe, en France et ailleurs, entre les mois de pure exaltation européiste, mondialiste, néolibérale, caricaturalement élitiste de sa campagne, et les changements de fond intervenus depuis le Brexit ; la rupture nationaliste et populiste opérée par Donald Trump, les progrès du même populisme partout en Europe, le grand retour des nations, du politique, la reprise en mains de l’économique par ce dernier, sur tous les continents. Macron ne veut pas démordre de ses options originelles désormais obsolètes. Et, de pure évidence, il est en train de le payer fort cher.
Son échec – qui semble consommé – tient sans-doute en second lieu à sa propre personne, laquelle avait plu de prime abord, parce qu’il était un outsider, qu’il incarnait le dégagisme tant souhaité, qu’il rompait, par son intelligence, sa culture, sa prestance, en bref par un certain charisme, au moins d’apparence, avec la trop évidente médiocrité de ses prédécesseurs et qu’il semblait porter la promesse d’un changement de régime. Cela aussi est désiré des Français. Dans l’opinion publique, la confiance en ces belles qualités d’Emmanuel Macron a fait long feu. La révélation progressive de son arrogance, de son élitisme méprisant pour qui n’est pas de ses amis, ses étrangetés, ses mauvaises fréquentations et finalement les conséquences douloureuses pour nombre de Français de ses décisions politiques, a retourné son image de plutôt positive à très négative et mué l’empathie bienveillante et curieuse des débuts en détestation ou même en haine. Cette seconde cause d’échec nous paraît bien plus grave que la première. On peut changer de politique. Pas vraiment de personnalité. Celle-ci chez Macron s’est dévalorisée pour une raison plus subtile, plus profonde, et somme toute irrémédiable, qu’Emmanuel Todd a exposée avec finesse : depuis ses frasques de l’été dernier (affaire Benalla, fête de la musique de l’Elysée, équipées à Lagos et dans les territoires d’Outre-Mer) son image a désormais les traits de l’enfance. Mais d’un enfant volontaire et capricieux, incapable d’autorité, parce que cette dernière emprunte toujours plus ou moins à l’image du père. Et cette perception dégradée est sans-doute la plus irrémissible de toutes. Luc Ferry a traduit cela de la façon suivante : « nous avons envoyé un gamin à l’Élysée, nous allons le payer très cher ». D’autant que ce gamin n’a pas l’innocence de l’enfance : il a subi le formatage de Science Po et de l’ENA, de profs de même acabit et de quelques gourous visionnaires aux idées très fausses et très nuisibles, dont l’archétype est son mentor, le fumeux Jacques Attali. On ne peut guère trouver pis. ■
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excellent cet article . la personnalité du Président est utilement évoquée , outre les circonstances extérieures ; ce point ( la personnalité ) a toujours joué à toutes les époques et tous régimes .
E.Macron a fait du théâtre dans sa jeunesse ; la verticalité du pouvoir qu’il parût rétablir dépassait elle le cadre du théatralisme ?
De la supériorité du principe dynastique sur le système électif.
Certes excellent articles mais un ptit bémol .Pourquoi citer un personnage sans condamner ses propos récents voulant faire intervenir l’armée contre les gilets jaunes ?Sinon oui et bravo
Totalement d’accord avec Benoît…mais comment cela pourrait-il se faire? et s’établir d’une manière pérenne? Une première condition -mais non la seule, loin de là!-: que le Roi soit la clef de voûte non élue d’un système constitutionnel et parlementaire, avec des institutions exécutives, législatives et judiciaires indépendantes, comme l’est le Roi d’Espagne: Felipe VI fait face à bien des difficultés avec un esprit de service et une dignité qui imposent le respect, démontrent l’utilité transcendantale du principe dynastique, de sa force symbolique unificatrice, apaisante, contre toutes les dérives idéologiques centrifuges, sectaires, voire haineuses, porteuses de graves conflits si elles réussissaient à prendre le pouvoir,.
Nous sommes bien d’accord, mais que faire..
Excellente analyse . Tout est résumé. Mais c’est la faillite d’un système.
Que faut-il entendre par « système constitutionnel » ?
La France n’a-t-elle pas battu tous les records, en matière d’usage et d’usure de toutes sortes de constitutions ?
Patrick Haizet a bien raison.
Je partage l’avis d’Hugues NOEL. Il nous faut un roi mais un roi de notre temps. Un roi qui, surtout, ne gouverne pas car tout gouvernant n’est bon qu’à recevoir des coups avec le risque évident s’il est roi de se voir contraint, en cas de crise grave (comme c’est le cas en France en ce moment), d’abdiquer par un peuple qui en France adore faire abdiquer ses monarques.
L’Europe contemporaine offre des exemples de roi et de reines respectés et souvent aimés par une large majorité de leur peuple respectif, dont le vrai pouvoir tient dans leur aptitude (imposée il est vrai par la constitution) à garder leur distance avec les évènements politiques du moment afin d’offrir leur capacité à maintenir l’unité nationale envers et contre tout, en intervenant dans les circonstances extrêmes, par exemple comme médiateur naturel, comme l’ont fait le roi des Belges Albert II, puis son fils Philippe en ce moment, le roi Juan Carlos puis son fils Felipe récemment en Espagne.
Bref, certains veulent ici un roi fainéant ! Curieuse conception de la monarchie !
Par ailleurs, l’article cite Luc Ferry avec ses propos sur « un gamin à l’Elysée » etc … Cela semble surprenant de contradiction lorsque ce type n’hésite pas à dire qu’il faut en finir avec les gilets jaunes et que la police devrait avoir le droit de tirer à balles réelles ! C’est toute l’oligarchie maçonnique qui est à vomir !
En son temps notre provençal Fernandel avait endossé le costume d’un acteur médiocre sur les planches qui avait été obligé de se promener dans le public avec une tenue d’officier. On peut être acteur mais pas auteur…MARECHAL nous avons notre Maréchal il a été propulsé par les nantis , industriels, banquiers, médias mondialisés. C’était beau , ils y croyaient, mais le monde du web qui a servit ces nantis se retourne contre eux. Internet apporte la ou les vérités que les médias ont du mal à contenir. Les gilets verts se sont les Girondins de la révolution, les amis d’Olympe de Gouge, de Montauban la Gasconne. Ceux qui voulaient garder le roi et cette femme à leur tête rejetée. Comme eux le peuple souhaite retrouver une liberté d’action dans ses provinces. Et, Internet souffle le vent de la liberté, de la connaissance, du raisonnement, et donc de l’intelligence. Nos politique depuis Philippe le Bel n’entretiennent que Paris capitale et on monte à Paris pour faire carrière, Il n’y a pas qu’eux a croire au pouvoir central et à la pyramide des nantis, notre église aussi, écoutons le Pape qui nous dis de nettoyer les écuries de ;..Internet nous porte la solution de la France et de l’Europe…
Un Roi qui ne gouvernerait pas ne serait » à l’abris des coups » . Les critiques seraient d’autre nature
Lui seraient reprochés sa liste civile pour une action nulle , son » anachronisme « .et tutti quanti
Dans un pays comme la France , la » presse » ordurière s’en donnerait à cœur joie avec ses caricatures . Par contre , même ici , la force est respectée pour autant que la Justice l’accompagne ..
Bien d’accord avec Ose. D’où vient cette rage constitutionnelle et ce désir d’un roi qui ne gouverne pas. Résultat: les problèmes rencontrés en Belgique, en Espagne ou au Royaume uni sont très exactement les mêmes que chez nous, Ces fausses monarchies d’opérettes ne ne sont que le masque d’oligarchies financières et marchandes, ne servent à rien et constituent de dramatiques contre exemples..
Je ne suis d’accord ni avec Noël Hugues, ni avec Gilbert Claret. Je ne veux pas d’une monarchie qui prolongerait le Système actuel, aujourd’hui détesté par 75% de Français. Etre de son temps, c’est prendre en compte les réalités actuelles. Les conceptions des deux amis précités sont tout justement obsolètes. Je veux – je voudrais – un roi à la française, c’est à dire qui décide de l’essentiel. Je ne juge pas, en revanche, les monarchies étrangères qui sont le produit de leur histoire et ne sont des contre-exemples que pour nous. Pas dans leur pays. Occupons-nous du nôtre. Nous avons beaucoup à faire avant qu’un roi soit possible. Et ceci, probablement – le cas échéant – après une période transitoire nationale et autoritaire comme le souhaitent, d’ailleurs, une majorité de Français selon plusieurs sondages.
Nous avons désespérément besoin de quelqu’un qui décide de manière salvatrice dans les circonstances exceptionnelles qui sont les nôtres. Si cet homme était l’héritier légitime du royaume, alors il refonderait la souveraineté et nous n’en serions pas à ratiociner sur un roi muet et immobile, sans opinion ni volonté. Mais le temps presse. Il nous reste trente ans pour conserver la France en vie.
En Italie, les Gilets jaunes sont suivis comme un soap opera. Les propos de Français anonymes il y a encore deux mois sont aujourd’hui scrutés, repris et analysés par la presse transalpine. La main tendue lundi aux Gilets jaunes par Luigi Di Maio, dirigeant du Mouvement 5 étoiles (M5S), a donné une dimension européenne à la crise sociale franco-française. « Ne lâchez pas », leur a écrit le vice-président du conseil, tout en les invitant à utiliser la plateforme numérique Rousseau, à l’origine de la structuration du Mouvement 5-étoiles qui l’a aidé à conquérir le pouvoir.
Le numéro 2 du gouvernement italien, le populiste Luigi Di Maio, travaillait jeudi à une rencontre avec des Gilets jaunes. Deux manifestants français seront en effet présents ce week-end à Rome, mais il ne s’agit pas de figures du mouvement. Parmi les leaders emblématiques, Eric Drouet refuse finalement de se rendre en Italie et Ingrid Levavasseur hésite toujours.