Par Péroncel-Hugoz
UN CURÉ ARCHITECTE
Pour en rester à B. de La Guérivière, nos suiveurs ont été parmi les premiers à être informés de sa première parution où le Var, département ressassé et rabâché, est apparu soudain, y compris pour bien des Varois, comme une terre de sites inédits, oubliés, méconnus : par exemple Rougiers, ce nid d’aigle ignoré entre Aix-en-Provence et Saint-Maximin, un haut lieu qu’apprécièrent Marius, Saint Louis et Dumas père ; Correns, le village de longue date tout-bio et pour cela chéri par Ségolène Royal ; le Musée sous-marin de la Tour-Fondue, près Toulon ; la « cathédrale » enterrée de Saint-Martin-de-Pallières ; l’église Saint-Laurent de Rians qui eut le même inventif prêtre-architecte, l’abbé Joseph Pougnet, au XIXe siècle, que la basilique Saint-Augustin d’Hippone (Bône, Annaba) ou la cathédrale Saint-Louis de Carthage et quelque cinquante autres sanctuaires dont les Réformés à Marseille, etc.
PLEINS FEUX SUR LES BASSES ALPES
A présent Mme de La Guérivière s’est attelée à une tâche inédite : rechercher et mettre en lumière les lieux inédits, cachés, tombés dans l’oubli dans le plus austère, le plus modeste (à l’exception des hauteurs skiables) de nos départements métropolitains, avec sans doute la Lozère. D’après ce que j’ai pu savoir sur ce sujet concernant les « Basses-Alpes » (expression tellement plus parlante et pratique que l’actuel prétentieux et interminable : « Alpes-de-Haute-Provence » qu’on pourrait au moins priver de son superfétatoire « Haute » …), les lecteurs qui ont été étonnés par les découvertes varoises de l’auteur, seront stupéfaits devant ses découvertes « bas-alpines », terme, je l’ai constaté sur place récemment, toujours employé par tous à Gap, Digne ou Oraison car il a été impossible d’en fabriquer un sur « Alpes-de-Haute-Provence » …
LE SACRIFICE D’UN POMPIER DE 17 ANS
En attendant cette nouvelle parution, Bénédicte de La Guérivière n’a pas chômé puisque, toujours dans le même esprit « géographie tradi et nouvelle », elle vient de nous donner un très joli livre-guide-album Aix-en-Provence. Sainte-Victoire. Sainte-Baume en lettres et images où, là encore, on va de surprise en surprise.
Notre jeune géographe n’a rien omis, rien de rien, allant jusqu’à consacrer deux pages illustrées à Philippe Noclercq. Vous ne savez pas qui c’est ? C’est un pompier volontaire (cette profession à laquelle le président Sarkozy osa refuser le qualificatif de « métier dangereux » …), mort brûlé vif le 25 août 1986, à 17 ans, le jour de l’incendie géant, dantesque, fouetté par un mistral satanique et qui, de Puyloubier à Aix via Saint-Antonin-du-Bayon, outre la vie du jeune Noclercq, anéantit 1500 hectares de Sainte-Victoire (oui, on ne dit pas en Provence « la Sainte-Victoire » mais « Sainte-Victoire » tout court ; on dit en revanche « la Sainte-Baume »),. Sur le lieu de son martyre, un discret monument avec sa photo casque en tête, attend votre visite, et peut-être votre prière.
De A comme Aigle de Bonelli à Z comme Zola (François, père d’Emile et constructeur, entre Aix et Vauvenargues, sous la monarchie de Juillet, du premier barrage-voûte d’Europe qui abreuva enfin à satiété les Aquisextains pardon mais les « Aixois » ce sont les naturels de l’ile d’Aix ou bien d’Aix-les-Bains), l’auteur nous apprend tout au passage sur la Xérophilie, l’Urgonien ou l’insolite enclave japonaise d’Aix puis nous conduit au plus secret des ermitages de Sainte-Victoire : Saint-Ser, daté 1001. (Photo).
Je ne vous en dis pas plus comme on ne révèle pas la fin d’un film de Clouzot ou d’Hitchcock. Bénédicte de La Guérivière faisait déjà aimer la géographie à ses élèves, désormais elle la fait apprécier à ses lecteurs aussi. Nul ne s’en plaindra. (Suite et fin) ■
Péroncel-Hugoz
- B. de La Guérivière, Aix-en-Provence. Sainte-Victoire. Sainte-Baume. Ed. Christine Bonneton, 63400- Chamalières. Chez le même éditeur : Var. Cent lieux pour les curieux. (Voir notre chronique sur cet auteur paru en 2019 sur lafautearousseau.)
- Les 100 mots de la géographie par Jérôme Dunlop, Que sais-je ? 2009 et 2017.
Banon