PAR PÉRONCEL-HUGOZ.
Comme annoncé mercredi, nous reprenons ci-après un texte de notre collaborateur publié en 1990 dans Villes du Sud (Payot, Genève).
AU ROYAUME DE BONGO.
LIBREVILLE : et puis voici des banques et des palais !…
Apparemment la capitale du Gabon n’a rien à dire, fille avouée du seul argent, posée comme par étourderie, un jour de fièvre financière aiguë, au ras bord d’un rivage fin et résistant comme du papier-monnaie. Banques, hôtels, ministères et palais narguent tranquillement l’éventuel raz-de-marée : leurs coffres-forts sont garantis étanches. Le gouvernement donne le ton puisque est au pouvoir le PDG (Parti démocratique gabonais)… Le seul édifice du centre qui n’ait pas l’air d’un établissement bancaire est la mosquée chérifienne offerte par Hassan II, avec en prime une garde prétorienne pour Omar (ex-Albert-Bernard) Bongo, ainsi doublement récompensé de sa conversion à l’islam, en 1973, conversion au demeurant aussi insolite, dans ce pays chrétien à 96 % (dont 65 % de catholiques), que si le roi d’Espagne ou le président italien en faisaient autant… Il n’y a pas 5 000 musulmans sur le million d’habitants, et encore la plupart des membres de cet infime minorité sont originaires d’Etats sahéliens. Les Gabonais ne sont pas moutons de Panurge comme les Russes qui, vers l’an mille, changèrent en bloc de religion pour imiter leur prince, Vladimir le Grand devenu chrétien.
« Toutes ces comparaisons sont oiseuses », estimait un ancien ambassadeur de France à Libreville qui se flatte d’être ami d’Omar Bongo, « du moment que le vieux fonds de paganisme africain est heureusement resté bien vivace, sinon croyez-vous que le président aurait fait démolir sa nouvelle résidence de Franceville, dans sa province natale, sur le simple soupçon qu’elle était fétichée*. Et n’oubliez pas, pour compléter le tableau de la large tolérance gabonaise, que le président est au Grand-Orient bien que l’Islam actuel soit hostile aux francs-maçons ! » Quand la rente pétrolière a diminué c’est tout de même un « ramadan financier » que M. Bongo a annoncé à ses compatriotes… ■
Bongo s’est converti à l’Islam afin d’avoir une position plus solide auprès des lobbies pétroliers dans lesquels les états du Golfe étaient prédominants. Cela dit, il n’en respectait aucun interdit.